[JOUR 2 (Porte)] Texte de Hestianne

Léonard avait 8 ans. 8 ans et demi, même. Il aimait beaucoup regarder les spectacles de cirque, et manger la pâte crue des gâteaux au chocolat. Il détestait la soupe aux poireaux, et les chaussures vernies qu’on lui oblige à mettre chez tante Vermina. C’était un petit garçon comme les autres à vrai dire. A un détail près.

Dans sa chambre, il y avait un monstre. Oh, pas un méchant monstre, non, un monstre gentil, et tout doux. Il avait des cornes oranges rayées de vert, et un pelage tout aussi coloré, des pattes à quatre doigts aux griffes polies et rondes au bout, et de grands yeux, tout bleus. Il s’appelait Gaspard.

Léonard adorait le monstre, et le monstre adorait Léonard. Le soir, quand le ciel s’assombrissait et que la Lune pointait son nez, Gaspar sortait de derrière la penderie, et ils jouaient toute la nuit, amis pour la vie.

Cependant, un soir comme les autres, Gaspard ne vint pas. Léonard, qui lui avait fait un dessin, attendit tristement que le monstre apparaisse. Mais, Gaspard ne se montra pas. Avec un soupir, Léonard posa la tête sur l’oreiller, un peu inquiet. Il glissa la main sous le coussin, et trouva une lettre, écrite à l’encre rouge.

Cher Léonard,
Je suis désolé de ne pas être venu ce soir, mais tu sais, tu as 8 ans et demi à présent, et d’autres enfants plus jeunes ont besoin de moi, et tu es grand à présent. Te laisser me rend triste, mais il faut que tu grandisses sans moi. Tu me reverras peut-être, un jour, mais pour l’instant, tu devras t’endormir sans moi.
Ne sois pas effrayé.
Avec toute mon amitié et mes plus sincères regrets,
Gaspard

Léonard reposa la lettre sur sa table de chevet, sentant les larmes lui monter aux yeux. Il s’enveloppa dans sa couette et s’endormit dès que sa tête toucha l’oreiller.

Le lendemain, Léonard se réveilla avec l’intention de ne pas se laisser abattre. Il chaussa ses chaussons, et avança. Son cœur était empli de tristesse, comme si des ombres l’avaient envahi. Il ouvrit prudemment la porte. La lumière se glissa dans l’interstice, jusqu’à chasser toutes les ombres.