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Message par Suzywa Mer 4 Avr - 16:44

Ca y est, je suis en vacances.
Le temps est au soleil, à la douceur et m’encourage à quitter ma petite maison de banlieue pour de longues promenades avec Leïko. Snowpuff nous suit à distance. C’est vraiment curieux d’observer un jeune chiot un peu foufou gambader au bout de sa laisse, suivi par un félin en pleine liberté. Il n’aime pas trop les mouvements incontrôlés et imprévisibles de notre nouveau compagnon mais je vois bien que Snowpuff fait contre mauvaise fortune, bon cœur.

Imperturbable, il continue donc de me raconter la vie des ancêtres de Mr Ollivander pendant les longues siestes de Leïko. Une vraie épopée, digne d’Homère.

Le doux fléreur s’est assoupi sur mes genoux. Le doux soleil engourdit les membres des êtres sensibles comme ceux-là. Ils le sentent, ils s’insinuent sous leur pelage.
Je lis donc tranquillement dans le divan mais Snowpuff se réveille brusquement.
D’un air inquiet, je lui demande si tout allait bien.
Après un moment de flottement, Snowpuff tourne sa tête vers moi et me ronronne qu’il a fait un rêve étrange, qu’il s’était vu au Collège de Poudlard, du temps des chevaliers.
Je le prends affectueusement entre mes bras pour caresser son jabot en forme de coeur.
- Ce doit être à cause de toutes les histoires de Mr Ollivander, dis-je d’une voix douce. Tu as dis, toi-même, que cet homme avait les qualités d’une machine à remonter le temps ! poursuis-je d’un air amusé. J’aime bien cette image, d’ailleurs ! Et puis, je me souviens des paroles du Professeur Dumbledore : « Tu as de la chance, Adam ! Ce fléreur est plus vieux que toi, il est paré pour écouter ce dont nous allons discuter. »

Snowpuff me regarde plus intensément et se met à ronronner.
- Elles m’ont frappé aussi, ces paroles, quand je les ai entendues… et elles ne me quittent plus, surtout après ce que l’ami d’Adam a raconté pour appuyer cette affirmation qui me dépasse complètement. Es-tu prête pour la suite ? me dit-il avec douceur.
Ma curiosité est piquée au vif et, bien sûr, je n’attends pas pour suivre Snowpuff dans cette nouvelle aventure. Je tombe dans les yeux pailletés d’or de mon ami félin.

Le décor apparaît peu à peu. J’ai l’impression de quitter le sommeil. J’ai parfois cette impression floue, au sortir d’un rêve, de ne plus savoir ni où, ni quand mon être se trouve. En arrivant là où Snowpuff veut m’emmener, j’ai cette même sensation de connaître l’endroit où j’émerge mais j’ai conscience de quelque chose de différent.
Je suis dans la chambre de Mr Ollivander mais je ne retrouve pas la même ambiance. Tout est si clair et si gai dans cette pièce décorée simplement. Dans la qualité de la lumière, claire et éblouissante, dans la fraîcheur de l’air qui s’engouffre dans cette petite pièce, je reconnais un matin de printemps. Nous devons être au mois de mai, de quelle année ? Je ne puis le dire.
Plusieurs mois s’étaient encourus sur la piste du temps. Ca, c’était chose sûre.

Le sorcier aux mille et une baguettes
(huitième volet)


Snowpuff était là sur le l’édredon de Mr Ollivander. Il fixait des photos accrochées au mur, au-dessus de la tête de lit.
Les rayons de soleil matinaux qui jouaient à saute-mouton avec les jeunes feuilles du grand orme éclairaient les personnages de ces photos anciennes. Ces clichés n’étaient pas encadrés mais joliment décorés. Comment vous dire…. Ces clichés avaient pour compagnons de fines branches d’arbres, de petits sacs de jute ou de peau, des feuilles, des plumes et autres composantes végétales et animales inconnues de moi.
Ce pêle-mêle avait un charme indéfinissable. On aurait dit que c’était le souffle du vent qui avait déposé ces traces de la nature, trouvées sur son chemin avant d’arriver dans cette pièce.
Mr Ollivander, quant à lui, était affairé à autre chose. Ses gestes étaient nerveux mais ce n’était pas la colère qui en était la cause. Son visage souriant, ses paumes qu’il frottait vigoureusement étaient des gestes de joie.
Il se préparait à un événement heureux. Il avait ouvert ses bagages et rangeait ses robes sur les étagères d’une vieille armoire faite d’un bois très sombre.
Il se dirigea ensuite vers la fenêtre ouverte pour respirer l’air doux et salé de ce tout nouveau printemps. On entendait le doux ressac de la mer jusqu’ici.
Le jardin était coquet, tout en fleurs. Ce furent ces détails qui me firent comprendre que nous n’étions plus dans la boutique du Chemin de Traverse. Je le saisis juste au moment où Snowpuff se mettait à ronronner et je me glissai prestement dans le personnage du félin

- Adam ? ronronnai-je
- Mmmmhm ? répondit le vieil artisan en fermant son bagage.
- Pourquoi ton ami a-t-il décoré cette chambre comme la tienne à Londres ?
- Parce que c’est mon ami ! répondit Adam mystérieusement. Tu comprendras mieux en écoutant nos souvenirs. Tu as une semaine devant toi pour trouver la réponse à ta question.
Cette énigme ne me plut qu’à moitié. Je n’aimais pas que Mr Ollivander ait un ami plus proche que moi. Mais, je fis taire ma jalousie car je voyais ce vieil homme si joyeux. Mr Ollivander me dévisagea avec attention. Il se dirigea vers moi et me prit dans ses bras. Il me dit au creux de l’oreille.
- Avant de te rencontrer, Snowpuff, je n’avais qu’un seul vrai ami encore vivant. Maintenant je suis de ces heureux hommes qui peuvent en compter deux. C’est parce que je te considère comme tel que je t’ai fait venir ici. Deux amis qui se retrouvent est une joie, Snowpuff. Trois amis qui se rencontrent, c’est une joie infinie.
En écoutant ses paroles, j’imprimai sur l’arête du menton de ce vieil homme, la douce caresse de mon museau.
- Viens maintenant ! Ne faisons pas attendre nos hôtes !
Je sautai sur les épaules de Mr Ollivander et me calai dans sa nuque. Nous descendîmes les escaliers menant au rez-de-chaussée.
Un petit homme moustachu attendait dans l’entrée. Quand nous approchâmes de lui, il ouvrit grand les bras pour serrer Adam contre lui.
Afin de les laisser libres de leurs mouvements, je sautai souplement sur le sol et m’assis à côté d’eux.
Cet homme m’apparut sympathique. Ses rondeurs, son rire franc qui résonna dans le hall en voyant descendre Adam me disait qu’il était d’un tempérament jovial et heureux. Il était de ces personnages qui voient majoritairement le bon côté des choses et sa bonne humeur était très communicative.
Après cet accueil, Adam se tourna vers moi et dit à son hôte.
- Newt, je te présente Snowpuff ! Cela fait six mois maintenant que nous nous fréquentons et il me semblait judicieux de te le présenter. Snowpuff, je te présente Newt Scamander, le célèbre Newt Scamander, ami intime depuis que nous nous sommes rencontrés au Collège de Poudlard.
Le sorcier s’accroupit pour me saluer. Il tendit sa main vers mon museau. J’acceptai qu’il me caresse et en retour je me frottai contre ses genoux.
- Tu ne te sentiras pas seul, ici ! Snowpuff. Je vais te présenter à mes trois fléreurs. Hoppy, Milly, Mordy ? Venez, nous avons de la visite !
Trois félins arrivèrent alors à la queue leu leu. Ils s’étaient faufilés par une porte entrouverte d’où venait un fumet appétissant.
Trois fléreurs aux oreilles énormes, aux yeux lumineux m’entourèrent en ronronnant. Leur pelage était tigré. Ils me sentirent sur toutes les coutures et m’accueillirent dignement avant de repartir vers leurs propres affaires.
Une petite dame aux cheveux gris les laissa passer avant d’entrer dans ce hall bien accueillant. Son visage était souriant. Ses yeux bleus brillaient derrière ses petites lunettes.
- Viens, Porpentina ! Nos invités sont installés.
Les embrassades terminées, la petite dame me regarda avec intérêt. Elle croisa le regard de son mari avec des yeux pleins d’étonnement et je vis Mr Scamander acquiescer avec un grand sourire. Ceci eut le don de m’énerver. Qu’avais-je donc de si spécial que je ne sache pas ?

Nos hôtes nous invitèrent à venir au jardin avant de passer à table. Ils s’installèrent à l’ombre du vieil orme qui commençait à fleurir.
Personnellement, je grimpai sur la corniche pour mieux profiter des rayons chauds du soleil et observer ses nouvelles connaissances avec un peu plus de distance.
Je reconnus le style particulier des petites maisons du Dorset. Cette maison avait un toit de chaume particulier. La haute partie faîtière présentait une moulure en relief, un motif animalier du plus bel effet. Je reconnus la forme caractéristique de la salamandre.
Je feignis donc de me reposer au soleil mais je ne perdais rien des paroles qui s’envolaient de la bouche des sorciers jusqu’à mes oreilles. Les fléreurs ont l’ouïe fine, ne vous en déplaise !

Les verres s’entrechoquèrent sur les vœux de santé que chacun s’accordaient et les amis commencèrent à s’échanger les dernières nouvelles. Rien de bien neuf. Mr Ollivander racontait ses dernières aventures en prenant bien soin de ne point trop en révéler. Mr Scamander relatait ses dernières découvertes à propos des limaces de feu en Amazonie. Sa famille s’était agrandie. La naissance de ses petits-fils était une vraie joie.

Je fis la connaissance des trois fléreurs de la maisonnée. Ils m’avaient rejoint sur cette corniche. C’est en leur compagnie que je visitai ainsi les lieux et me liai d’amitié avec eux.
Malgré tout, je ne me sentais pas à l’aise dans cette demeure, déchiré entre mon amitié pour Adam et par les conventions de politesse de rester avec Hoppy, Milly et Mordy.
En soirée, je décidai de faire parler ma nature profonde et je rejoignis mon ami dans le salon. Je m’installai le plus discrètement possible sur les épaules d’Adam.
Le vieil artisan saisit l’occasion de mon arrivée pour s’adresser à moi.
- Snowpuff, tu arrives à point pour connaître quelques-uns de nos souvenirs de Collège.
Adam croisa le regard de Newt qui ne se détachait pas de ma personne. Mon ami répéta sa proposition et Mr Scamander sortit de ses pensées pour approuver l’idée d’Adam.
- Notre amitié commença dès le début du voyage vers Poudlard. Nous avions onze ans à l’époque et nous ne voyagions pas encore en train. Le point de rendez-vous était bien à l’actuelle gare de King’s Cross. Ce n’était pas des wagons qui nous attendaient mais des diligences tirées par des animaux invisibles.
Mr Scamander avait allumé une pipe. Il interrompit son ami en précisant que c’était cette bizarrerie qui l’avait orienté vers sa passion des animaux. Ces sombrals ont vraiment des caractéristiques exceptionnelles ! marmonna le vieil homme en soufflant un nuage de fumée.
- Nous sommes montés dans la même diligence et avons lié amitié directement. Newt avec son intérêt inné pour la nature et moi avec déjà toutes les connaissances transmises par mon père.
A notre arrivée à Poudlard, nous avons été dirigés dans la grande salle pour subir la répartition dans notre Maison. Le choixpeau magique allait-il nous séparer ?
Je passai l’épreuve avant Newt. Le choixpeau me cacha le visage à moitié. Effrayé, j’entendais une voix venue de je ne sais où analyser mon subconscient…
« Ooooooooh ! dit la voix de l’objet magique. Tu portes toute l’ambition de tes ancêtres ! Celle d’être les meilleurs ! Lourde tâche que la tienne Adam ! Alors ? Mmmh ? Serpentard ? Est-ce la Maison des Serpentards qui t’est destinée ? Tu as soif de voyages et tu veux tout connaître de ce qui touche ton art ! MMmmmh ! Et puis, je vois de grandes capacités intellectuelles….. De celles que l’on met au service des autres en toute abnégation ! MMmmmmmh ….cruel choix pour un choixpeau comme moi. »
Un long silence suivit ce monologue et puis un cri retentit dans mes oreilles. « Serdaigle ! »
Je sortis de ce trou noir assez abasourdi, je réalisais que j’entrais dans un monde totalement différent de celui que j’avais connu pendant onze ans.
Mr Scamander prit alors la parole…
- Oui ! Je me souviens de cet épisode aussi, tu t’étais éloigné du rang et tu rejoignais la table des Serdaigle. Je n’avais plus qu’à attendre mon tour. Une sacrée épreuve que cette arrivée au Collège. Un lieu géant, de la magie partout autour de toi. Vraiment impressionnant. Et puis ce choixpeau, simple chiffon, qui a tant de capacités, tant de pouvoir. Personnellement, j’avais une stature plus ronde que la tienne, Adam ! Le Choixpeau se tenait bien droit sur le sommet de mon crâne. Pourtant, une fois l’objet posé sur ma tête, je ne vis plus rien de ce qui se passait autour de moi. J’entendais juste une voix venue de la tombe, très grave à vous faire frissonner.
« Mmmmh alors vous, jeune homme ! Aucun doute, ce sera : Serdaigle ».
Le choixpeau avait décidé de donner suite à notre amitié naissante.
Nous avions l’avenir devant nous, nos baguettes et des idées plein la tête.

C’est à ce moment-là que mes ronronnements de fléreur interrompirent ce récit.
Cela avait été plus fort que moi, je faisais semblant de dormir et mes ronronnements furent si peu discrets qu’ils arrivèrent aux oreilles de Mr Scamander. Comme si de rien n’était Adam écouta ma question et la traduisit en langue humaine.
« Où et comment avais-je trouvé ma propre baguette ? C’est bien cela que tu voudrais savoir, Snowpuff ? » Moi qui étais destiné à en fabriquer, moi à qui toutes les baguettes obéissent au doigt et à l’œil ? Comment était-il possible qu’une seule baguette m’ait été réservée ?
- Ton fléreur pose des questions profondes, Adam ! dit Newt d’un air pincé et ironique. Je reconnus dans sa voix ce que j’avais craint en arrivant ici. La jalousie s’était aussi emparée du cœur de Mr Scamander.
Dans cette maison, les animaux de mon espèce ne fréquentent pas le salon. Cet homme avait trois fléreurs, bien sûr, mais il ne les connaissait pas ! Pour lui, ce n’était que des animaux fantastiques de catégorie secondaire. Des gardiens protecteurs, pas des amis. Je l’avais tout de suite compris quand mon regard se posa sur les carcasses d’animaux accrochées aux murs de cette pièce comme des trophées de chasse.
Cet homme avait une renommée mondiale, certes, mais aucun égard pour les animaux qui restent des sujets d’étude, à ses yeux. Je voyais bien que cet homme n’avait jamais eu de gros soucis dans sa vie, tout coulait sur le tapis rouge de l’honneur. Je ne le trouvais plus si sympathique que cela, ce Mr Scamander.
Mr Ollivander fut également surpris du ton de son ami mais il décida de ne pas y prêter attention. Il s’appliqua pour répondre le plus exactement à ma question à laquelle finalement, il n’avait jamais réfléchi.
- C’est vrai, Snowpuff, ta question s’avère intéressante. Je me souviens que peu avant d’entrer à Poudlard, mon père avait commencé à tester sur moi les baguettes de la boutique. Aucune ne convenait… ou plutôt toutes convenaient ! Il ne pouvait choisir celle qui donnait plus de pouvoir. Une nuit, il lui vint alors l’intuition de quelque chose.
Le lendemain matin, il n’attendit pas.
Mon père m’emmena au magasin et s’empara de la baguette de Orry. Il la prit en tremblant entre ses longs doigts. C’était de l’appréhension qui se lisait dans ses yeux couleur de brume. Je la pris dans ma petite main qui avait gardé les traces de l’enfance. Il vit un nuage d’étoiles rouges et or en sortir. Rien à voir avec ce que les autres m’avaient fait ressentir ! Celle-ci me transportait presque, me faisant presque quitter le sol dans un élan ascensionnel.
Moi, naïf, je souriais aux anges.
Mon père, inquiet, avait froncé les sourcils.
Il m’expliqua qu’il ne trouvait pas de bon augure de voir la première baguette avoir autant de pouvoir entre les mains du dernier élu vivant.
Le silence répandit ses ailes sur l’espace de la pièce.
Pour faire fuir le trouble que j’avais causé, je posai une nouvelle question.
- Finalement, Adam, quelle était la composition de la baguette d’Orry ?
Le fabricant me prit sur ses genoux. Cette nouvelle interrogation le surprit au plus haut point. Son regard lumineux se planta dans mes prunelles sombres quand il répondit d’une voix émue.
- Bois d’if- 33,5 cm- plume de bergeronnette.
Je compris tout de suite à quoi, il faisait allusion et soudain, le visage de Mr
Ollivander s’éclaira. Il faudra que tu restes avec moi, longtemps, Snowpuff, longtemps !
Pour approuver ces paroles, je me calai contre la poitrine de mon ami et lançai à Mr Scamander un regard de défi.

L’horloge sonna onze fois, et notre hôte en profita pour conseiller à tous d’aller se coucher. Mon sommeil fut agité. Je sentais qu’on me cachait quelque chose et ce manque de franchise ne me plaisait pas, mais alors pas du tout.

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Message par Suzywa Mer 18 Avr - 21:45

J’ai à peine le temps de surgir de cet épisode de la vie d’Adam que Snowpuff m’emmène dans un autre souvenir. La mémoire du félin semble tourner soudain d’une manière frénétique comme si elle suivait un fil d’Ariane.

Le sorcier aux mille et une baguettes
(neuvième volet)

Nous sommes toujours dans la maison cossue de ce naturaliste réputé. Quand j’émerge dans la bulle, je découvre le même salon que j’avais quitté précédemment.
Les deux amis étaient assis dans leur fauteuil près de la cheminée. Snowpuff est calé sur les genoux de Mr Ollivander. Je prends place dans la peau du félin et je me retrouve faisant face à Mr Scamander. A partir de ce moment, je ne le quitte plus des yeux.
Des rires francs et joyeux retentissent dans la pièce décorée de têtes d’animaux les plus divers.
Mr Scamander se reprend de son fou-rire et commente sa bonne humeur.
- Ahahahaha. Aaaah ! Quelle époque fabuleuse que ces années à Poudlard, hein Adam ?
- Tu peux parler pour toi, Newt ! Je peux te dire que, personnellement, je me suis habitué assez tard à ce type de pédagogie très rigoriste et livresque. Imagine-toi passer d’une tradition orale, en pleine nature, en tête à tête avec ton pédagogue de père à un enseignement collégial qui ne voit que la matière des bouquins à faire entrer dans la caboche de ses étudiants !
J’ai été assez déboussolé de passer d’un enseignement individualisé et adapté à ma structure de pensée à une pédagogie de masse. Heureusement que tu étais là, Newt ! Tu as souvent dompté ma rébellion contre ce système. Surtout avec le Directeur que nous avions à l’époque.
- Ahahaha ! Ce cher Directeur : Mr Phineas Nigellus Black… C’était la fin de son mandat mais c’est vrai qu’il apportait un certain piment à nos escapades.
- Ooooooh, Newt, te souviens-tu de celle que nous avions imaginée en lieu et place de la sortie traditionnelle à Pré-au-Lard ?
Mr Scamander prit quelques secondes à retrouver ce souvenir dans tout le lot d’aventures qu’ils avaient partagé.
Il tendit le bras vers Adam et son index tremblait de plus en plus au fur et à mesure que cette péripétie lui revenait.
- Ooooooh oui ! Extraordinaire celle-là. Ecoute-là Snowpuff ! Elle est très amusante.
- Nous étions en troisième année déjà. La première possibilité de découvrir ce village qui ne nous intéressait vraiment pas. Hein, Newt ? interpella Mr Ollivander les yeux rieurs.
- On s’en balançait comme de notre première tétine à bulles magiques ! approuva Mr Scamander d’une voix remplie de joie.
Nous nous étions déjà déplacés jusque là bien avant les autres. Adam m’emmenait toujours, le soir, investiguer les couloirs secrets de Poudlard.
Adam partait toujours du principe qu’il fallait bien connaître la topographie du lieu où le sorcier habitait.
Une règle d’or dans la fabrication des baguettes, enseignée par son père, dixit ses ancêtres .
Ahahaha, le Directeur en a eu du fil à retordre avec nous ! Toi, tu te justifiais toujours avec les phrases cultes de tes ancêtres et cet homme restait toujours le bec cloué devant la profondeur de tes théories qui venaient de la nuit des temps.
Je me souviens encore de toute la palette de ses mimiques : de la plus pincée à la franchement enragée, doigt pointé vers la sortie accompagnée d’un : « Vous irez rejoindre la cabane de Mr Ogg pour récurer à fond les écuries de Poudlard. Ce ne sont pas des adolescents comme vous qui allez faire la loi dans ce Collège réputé ! »
Les deux amis riaient de bon cœur à l’évocation de ces face-à-face avec l’autorité.
Adam se reprit pour continuer le récit.
- Bref, nous avions trouvé un raccourci souterrain allant d’une maison abandonnée de Pré-au-Lard à la Forêt interdite, lieu mirifique, en phase avec nos intérêts respectifs. J’avais proposé de montrer comment on fabriquait une baguette et toi, Newt, tu voulais me montrer une licorne.
Nous avions donc suivi sagement le flot de professeurs et d’élèves en direction du village.
Arrivés là-bas, nous avons illico presto rebroussé chemin via le souterrain.
Nous sommes arrivés dans ce lieu magique, impressionnés par l’atmosphère qui y régnait.
Nous pouvions palper la magie qui en composait l’air et c’est à pas feutrés que nous avons fendu le silence profond de cet endroit. Le moindre craquement de brindille prenait une ampleur inouïe. Nous avions peur de réveiller quelque dragon, nous nous faisions tout un roman imaginaire.
Pour ne pas nous perdre, nous avions fixé des rubans dans les branches des arbres.
Sécurisés par cette idée géniale de Newt, nous entrâmes plus profondément dans la forêt.
Les essences végétales étaient rares. Poussaient là des arbres qui n’avaient rien à voir avec nos contrées plutôt froides. Je découvris avec stupeur des néfliers d’Amérique. La maladie les avait touchés et des branches sombres résistaient sous ma main. De l’ébène ! De l’ébène poussait dans la Forêt interdite. Et pas uniquement cela ! Des palissandres de Madagascar, des arbres qu’on nomme « ivoires roses » et qui viennent d’Afrique, brefs, des spécimens qu’on rencontre sur d’autres continents que le nôtre. Cette découverte nous confirma que la magie que nous avions ressentie dès notre entrée était bien réelle.
C’est sûr, nous étions impressionnés mais pas au point d’oublier notre but.
Je savais que je ne pourrais rien faire avec les branches de ces arbres exotiques aussi, avons-nous poursuivi notre chemin plus profondément dans la forêt.
Nous sommes alors arrivés à un étang.
Mon regard s’éclaira quand je vis une branche flotter sur la surface de l’eau. Je me suis alors retourné vers Newt en lui affirmant fièrement que nous avions atteint le résultat d’une de nos quêtes.
- Moi, entama Mr Scamander, je t’avais déconseillé de prendre cette branche mais, têtu comme tu étais, tu as persévéré dans ta logique, dit Newt en s’enfonçant dans le fond de son fauteuil se protégeant derrière ses deux paumes ouvertes.
- Tu as entièrement raison ! reprit Mr Ollivander humblement… J’étais très têtu et je me prenais pour quelqu’un de très valable. Mon côté serpentard sans doute, décelé par le Choixpeau.
Je persévérai donc dans mon idée et entrai dans l’eau glacée de l’étang. Plus j’avançais, plus la branche s’éloignait.
Ainsi, malgré tes rappels, je m’avançai encore et encore. Puis, malheur, le sol marécageux se déroba sous mes pieds et je me retrouvai enfoncé jusqu’à la taille !
C’est à ce moment-là que je me rendis compte que ce que je pensais être une branche de bois mort avait une autonomie des plus étranges.
Le bâton me fit face et deux mâchoires s’ouvrirent en même temps que mes yeux s’écarquillaient d’effroi. Ce n’était pas un végétal que j’avais face à moi mais un animal dont j’entendis le nom hurlé par Newt.
- Un fangieux ! s’écria Mr Scamander
Mr Scamander se mit à rire et interrompit encore le récit.
- Je t’avais conseillé de ne pas persévérer, je t’avais dit mes doutes et t’avais encouragé à revenir à la rive. Le nom exact de cette sale bestiole m’est revenu en mémoire juste au moment où j’ai vu ses dents pointues.
Je n’ai jamais vu quelqu’un sortir aussi vite d’un marécage que toi ! s’esclaffa Mr Scamander.
Adam riait de bon cœur.
- Aaah… l’insouciance de la jeunesse ! Je me souviens que j’ai failli perdre la baguette de Orry à cet endroit. J’entends encore le claquement des mâchoires de cette bête. Ses dents se sont refermées sur le vide. Depuis cette expérience, je pense toujours qu’elle n’apprécie pas seulement les mandragores.

Les deux compères repartirent sur un fou-rire qui devint très communicatif. Je me laissai gagner par leur bonne humeur. Je me détendis et laissai aller mes ronronnements interrogateurs.
- Etes-vous rentrés après cela ? demandai-je doucement.
- Oh non, Snowpuff ! reprit Adam. Tu ne nous connaissais pas à l’époque. Il nous fallait beaucoup plus que cela pour nous décourager.
Nous avions fait tant de grabuge qu’un centaure est venu à nous.
Un jeune, apparemment, au vu des traits de son visage. Il était magnifique. Nous sommes restés pantois devant son aura.
Il étincelait littéralement. Ses cheveux étaient presque blancs et ses yeux bleu azur avaient un air triste.
Il ne dit pratiquement rien. Je remarquai juste qu’il fixait ma baguette assez longuement. En fait, il ne vit qu’elle puis il leva les yeux au ciel. Ses seules paroles furent celles-ci : « Mars est encore loin de son zénith, ce n’est pas encore le moment mais il approche, il approche…. ». Il s’en alla aussitôt ces paroles prononcées.
- C’était fantastique ! reprit Newt très sérieusement. Jamais de ma vie je n’aurais imaginé croiser un centaure. J’étais enthousiasmé. C’est moi qui ai persuadé Adam de continuer nos recherches. Il me fallait rencontrer une licorne. Cette obsession me poursuivait jusque dans mes rêves.
- Nous avions de la chance, ce jour-là. Nous commencions à rebrousser chemin car le temps s’écoulait inexorablement. A mi-chemin, nous avons entendu un petit galop. Nous pensions que c’était le jeune centaure qui nous surveillait et nous vîmes alors apparaître une licorne dans toute sa splendeur.
Newt prit la parole, très ému.
- Je la vois encore ! Je me suis approché doucement. Elle était farouche. Chaque pas que je faisais en sa direction la faisait reculer d’autant de mètres. C’est alors que le jeune centaure s’interposa pour protéger cette créature magique. Il était imposant mais nous étions vifs et intelligents. J’en profitai pour sauter sur le dos du centaure et Adam tenta de s’agripper à la licorne mais celle-ci rua et se débattit comme un beau diable. Il se retrouva cul par terre en un rien de temps. Je résistai un peu plus longtemps que toi, je pense…
Mr Ollivander regarda son ami en coin avec un petit sourire ironique.
- Oh que nenni ! Egalité, mon cher ! On s’est retrouvé côte à côte sur le sol mouillé avec quelques hématomes en souvenir. Moi, j’avais gagné un trophée inestimable.
- Ouiiii ! je sais ! continua Newt, exaspéré. Tu l’avais bien méritée, cette poignée de crin de licorne.
Les deux hommes se firent face. Ils ne purent rester sérieux bien longtemps et les éclats de rire les unirent à nouveau.

Je ne connus jamais la suite de cette histoire mais je devinais qu’elle avait abouti devant le bureau du Directeur. Ces deux compères avaient dû faire verser beaucoup d’encre dans les registres du concierge de l’époque.
Ce soir-là, ils évoquèrent de nombreuses aventures toutes plus rocambolesques les unes que les autres.

Mr Scamander prit le temps de parler d’une autre étape de leur vie d’étudiants.
- Vint, enfin, le jour de la cérémonie de la remise de nos diplômes. Celle-ci était très gaie et ne clôturait pas pour autant notre parcours estudiantin.
Poudlard avait instauré une tradition qui ne se fait plus. Je trouve cela dommage, d’ailleurs.
Tous les lauréats avaient droit à une huitième année, à l’époque. Nous pouvions choisir un compagnon de route et partir en voyage d’étude, durant une année complète.
Ces quelques mois de pratique magique permettaient aux étudiants d’exercer les pouvoirs qui leur avaient été conférés. Une seule exigence leur était demandée : remettre un travail d’étude sur un sujet particulier au retour de ce voyage dont les frais étaient totalement pris en charge par le conseil d’administration du Collège.
D’ailleurs, les cours de transplanage proposés à Poudlard ont été instaurés en vue de cette année complémentaire. Cet apprentissage persiste encore aujourd’hui mais beaucoup en ont oublié l’origine pratique.
Bref, ces mémoires permettaient à la science magique de pouvoir évoluer. Beaucoup de ces travaux d’étude ont été consultés par les chercheurs et les soigneurs de Ste Mangouste. Ils ont permis de mettre au point de nombreuses potions et de nouveaux remèdes.
Adam reprit la parole. Il était ému aussi.
- Mon père me permit de suivre cette année. Il connaissait ma soif de voyage et de nouveauté. Il mit sa pédagogie dans sa poche et promit de m’attendre pendant une année entière. Nous sommes partis le 1er juillet 1915 et sommes revenus le 30 juin 1916.
Snowpuff, toi qui connais toute mon histoire, tu devineras où nous nous sommes rendus, Newt et moi.
Je proposai l’Inde.
- En plein dans le mille ! s’exclama Mr Scamander. Ce fut notre première destination .
Je repris mon questionnement pour connaître leur sujet d’étude respectif.
- Je m’intéressais au mode de vie du Phénix dans les différents pays où on l’avait déjà répertorié soit en Inde, en Chine et en Egypte. Je voulais savoir si cet oiseau fantastique s’adaptait à son lieu de vie ou s’il choisissait un lieu de vie adapté à son mode d’existence.
Adam répondit à son tour.
- Je me suis consacré aux pouvoirs magiques des plumes de phénix. Cela m’intéressait de savoir si ce pouvoir était unique ou s’il variait en fonction de la culture du pays dans lequel il s’était établi.

Ces réponses me firent réfléchir. Je comprenais leur amitié à présent. Ces deux hommes se complétaient à merveille. L’un apportait à l’autre des connaissances qui les faisait toujours progresser dans la maîtrise de leur art.
Je regardai Mr Scamander avec d’autres yeux mais je m’étonnais toujours de ne pas voir Milly, Mordy et Hoppy venir rejoindre affectueusement leur maître.
Cet homme s’intéressait aux animaux mais il le faisait sans véritable affection. Pourtant son sujet d’étude avait envisagé le mode de vie du phénix…. l’avait-il fait en ne prenant en compte que « l’instinct » de ces animaux fantastiques ou avait-il envisagé que ces animaux pouvaient être motivés par quelque chose de plus élevé que je pourrais appeler « des sentiments »?
Mr Scamander ne supporta pas mon regard. Il le décrocha pour le poser sur son ami. Mais je ressentis un trouble au plus profond de cet homme comme si j’avais réveillé une remise en question. Newt fixait son ami mais son regard était suspendu comme concentré sur lui-même.

Adam reprit la parole.
- Nous avons transplané en Inde, à Delhi plus précisément. Je te l’avais dit, Newt,… Newt ?
Mr Scamander sortit de sa réflexion en entendant son ami l’appeler. Il se raccrocha à la réalité pour écouter Adam.
Oui ! Je disais que nous avions transplané en Inde pour une raison simple que je t’avais confiée. Je voulais retrouver la trace de Maya et découvrir la Magie indienne. Elle avait complété les connaissances d’Orry et je savais qu’au fil des siècles, cette magie était toujours présente en filigrane dans notre Art de fabricants de baguettes. Je ne fus pas surpris en apprenant de ta bouche que le phénix vivait en Asie et notamment en Inde. J’avais d’ailleurs souri quand tu me l’avais appris, tu te souviens, Newt ?
Tout en nous consacrant à notre étude, nous faisions des recherches.
Je ne trouvai rien sur la jeune Maya, mais je découvris une tonne d’informations sur les castes de cette civilisation toujours tournée vers le cheminement de l’âme, leur immortalité.
Un jour, je rencontrai deux brahmanes. L’un était angiras considéré comme magicien envoûteur et l’autre était atharvan, sorcier guérisseur. Ils s’arrêtèrent, accrochés à mon regard gris. Ils s’approchèrent de moi et m’embrassèrent pour ensuite repartir ensemble sur un chemin qui les emmenait je ne sais où.
Je découvris aussi de nombreux contes. En les apprenant, je compris que j’avais vraiment des racines dans ce pays. Moi qui détestais l’apprentissage par les livres, je me régalais d’en découvrir les trésors.

J’interrompis la conversation par mes ronronnements interrogateurs.
- Comment pouvais-tu lire ces livres, Adam ?
- Mon père m’avait encouragé à apprendre d’autres langues. Lui-même s’était intéressé au sanskrit. Quelle chance ! Mon père avait l’intuition que ma tâche serait lourde, une fois adulte. Mon grand-père aussi avait cette intuition que les temps deviendraient plus périlleux pour le monde de la Magie.
Si Newt a travaillé à ce répertoire sur le bestiaire fantastique, je pense que c’est pour la même raison ? N’est-ce pas Newt ?
Mr Scamander ne semblait pas avoir suivi la conversation avec beaucoup d’attention.
- Euh ! Oui ! Bien sûr ! Notre monde de la Magie subit de graves dégradations, tu me l’as, maintes fois, fait apparaître, Adam.
Ce bestiaire, je le poursuis encore car de nombreuses espèces restent inconnues au bataillon. Je dois poursuivre cette tâche pour la postérité, je pense même qu’il faudra envisager, tôt ou tard, l’équivalent des zoos moldus afin de donner une chance d’échapper à leur extinction. Mais, je suis dans une phase de doute, depuis peu.
Je me demande si je n’ai pas été un peu trop scientifique dans mes études... conclut le naturaliste.

Adam fut surpris de cette réponse. Il croisa mon regard et je lui lançai des comètes par milliers.
- Adam ? ronronnai-je en plissant mes moustaches pour sourire. Je commence à l’aimer ton ami, Newt !

Comme il se faisait tard, je rejoignis mes nouveaux amis fléreurs ! Nous ne nous sommes pas endormis très tôt, cette nuit-là. Le sommeil pouvait attendre. Je préférais leur raconter notre soirée au pied du feu. Ils en ronronnèrent de plaisir, là, réunis sous la pleine lune.

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Message par Suzywa Jeu 26 Avr - 23:19

Le sorcier aux mille et une baguettes
(dixième volet)


Le séjour s’était passé très sereinement, finalement ! Le printemps embaumait et nous avions profité des premières vraies chaleurs. La cheminée s’était retrouvée seule dans le salon. Porpentina avait laissé s’éteindre le feu qui y avait dansé pendant tout l’hiver.

Nous nous retrouvions tous au jardin. Le soleil était bas, ses rayons projetaient un monde très étrange sur le sol.
Je jouais avec Milly, Mordy et Hoppy sur le muret entourant la propriété. Nous prenions la même pose et observions nos ombres gigantesques. Nous imaginions des animaux inconnus et féroces et nous riions de leurs longues pattes ainsi que de leurs oreilles extraordinaires.
C’était une des dernières soirées passées ensemble et je dois avouer que je regrettais de quitter cette maison, nichée en pleine nature. Nous n’avions plus que deux jours à passer en cette agréable compagnie et, comme toujours dans ces cas-là, le temps filait comme l’éclair.

Mr Scamander et son épouse avaient fait des merveilles.
Ils avaient dressé une table digne de celle des contes des « Mille et une nuits ».
Des bougies magiques brillaient doucement sur la pelouse et sur la cour. Elles passaient par toutes les teintes de l’arc-en-ciel et lançaient des nuées d’étincelles dorées. Des salamandres en terre cuite dormaient sur les branches de l’orme. Newt avait allumé l’huile qu’elles renfermaient. Le grand arbre se dressait, son écorce brillait sous des milliers de feux follets. J’aimais cette ambiance. On aurait dit des petites doxies qui tenaient leur lanterne à la main ou des salamandres qui se baignant avec plaisir dans le feu.
La longue table était dressée à même la pelouse, des bouquets de pois de senteur s’épanouissaient en son centre. Un vrai régal pour les yeux avant de déguster le bon repas que les elfes nous avaient préparé.

L’atmosphère de la maison avait changé depuis la veille.
Bien sûr, nous avions trouvé nos marques dans cette agréable maison et cela y était pour beaucoup mais c’était surtout dans l’attitude des trois fléreurs que le changement s’était fait remarquer.
Ils s’étaient rapprochés de leurs maîtres, venaient plus souvent sur leurs genoux.
Après le repas, nous étions tous réunis autour de la table. Mr Scamander avait allumé sa pipe. Milly se prélassait sur les pieds de son maître et Mordy au creux de son bras gauche.
Porpentina se balançait doucement dans son rocking-chair en caressant Hoppy.
J’avais ma place habituelle sur les épaules de mon ami et je lui léchais le lobe de l’oreille.
- Arrête, Snowpuff ! protesta Mr Ollivander. Je ne suis pas un de tes petits, voyons ! Je souris dans mes moustaches et arrêtai mon manège agaçant.
Au fait, tu m’avais posé une question en arrivant ici…
Je confirmai par un ronronnement très doux.
- Oui, Mr Scamander ! Pourquoi la chambre de Mr Ollivander est-elle la même que la sienne, Chemin de Traverse ? Pourquoi est-ce que je retrouve le même orme ici et là-bas ?
Je fus surpris de ne pas entendre la voix de Newt entamer le récit. Contre toute attente, ce fut Porpentina qui répondit. Ses yeux bleus brillaient intensément derrière ses petites lunettes rondes.
- C’est un souhait de ma sœur Flora ! dit-elle tout simplement. Ma sœur jumelle s’est mariée avec Adam, il y a un peu plus de soixante ans maintenant. Elle aimait cet endroit tout comme le Chemin de traverse. Elle voulait toujours se retrouver dans le même cadre où qu’elle aille. C’est elle qui les a décorées. Elle adorait ajouter ces touches si personnelles dans ses petites œuvres d’art décoratif.
- C’est au mariage de Newt que je fis sa connaissance…. précisa Adam. Un coup de foudre immédiat ! dit-il tendrement.
Nous nous sommes mariés l’année suivante, jour pour jour. Nous fêtions ainsi nos anniversaires de mariage ensemble. Aujourd’hui, nous aurions célébré nos soixante-quatre ans de mariage.
Nous avons eu un fils…
Je ne pus retenir plus longtemps mes ronronnements de surprise. Mr Ollivander les écouta les yeux fermés.
- Un fils ? Alors que vous m’avez dit que vous n’aviez personne à qui transmettre le savoir ? A moins qu’il ne soit peut-être…… mort ? lui dis-je plus doucement.
- Non ! reprit Mr Ollivander en me prenant dans ses bras. Laisse-moi le temps de t’expliquer ce qui est arrivé. C’est plus compliqué que tu ne le penses.
Nous attendions tous la naissance de Thomas. Charles, mon père, guettait le berceau pour être le premier à croiser le regard de ce petit bonhomme. Ce jour arriva et c’est l’étonnement qui surprit nos cœurs. Thomas avait les yeux vairons. L’un était couleur de lune et le second était vert. Les yeux de Orry et de Maya réunis.
Le temps fut comme suspendu. Quelle attitude devions-nous adopter, Flora et moi-même ?
Je décidai d’attendre. Rien ne pressait, mon épouse et moi-même désirions d’autres enfants. Mais, bien sûr, l’être humain peut se trouver bien démuni devant les décisions de la nature. Le temps passa et nous n’eûmes pas de seconde chance.
Mon père revenait toujours avec la même question, me demandant ce que j’allais décider à propos de Thomas.
Le petit avait quatre ans à l’époque. Je décidai de ne pas lui enseigner les bases de notre art car il ne répondait pas aux critères exigés par Orry.
Charles ne l’entendit pas de la même oreille. Pour lui, le fait de posséder un œil gris mettait Thomas en ligne de course. Il décida donc de lui enseigner ce qu’il m’avait transmis.
Malgré la vieillesse, il y mit toute sa patience et son savoir-faire. Ils devinrent inséparables.
Moi, j’étais écartelé entre le remords et le bon sens. Flora me rassura maintes fois en me disant que le temps mettrait un terme à cette incertitude, que finalement, il était bon qu’un Ollivander connaisse toutes les ficelles du métier. Je lui répondais que Thomas n’avait pas le magnétisme des élus de la famille et qu’il devait se trouver une autre voie. Je regrettais que mon propre père n’ait pas voulu admettre cette évidence, aveuglé par la peur de voir notre lignée s’éteindre à court terme.
Le temps passa donc.
Onze années défilèrent en un clin d’œil, onze années minées par les conflits entre pères et fils.
L’entrée à Poudlard sonna enfin. Je voulais que Thomas s’ouvre à d’autres connaissances. Le collège de Poudlard, même si je l’avais souvent critiqué, avait le grand privilège de former des jeunes sorciers complets, capables de découvrir leurs forces et leurs faiblesses. J’espérais que ces sept années à venir permettraient à Thomas de prendre du recul. Mais c’était sans compter sur l’entêtement de mon fils.
Il ne voulut pas entendre parler du Collège. Il assurait que son grand-père connaissait assez de choses pour éviter cette grande école. Je le forçai à suivre la voie que j’avais moi-même suivie. Mais ce fut une catastrophe. Thomas refusa le système. C’était un être taciturne et solitaire. Il voulait marquer ses différences et laissait parler ce sentiment de rébellion que j’avais moi-même ressenti à son âge. Moi, j’avais eu la chance de trouver Newt sur mon chemin. Thomas, lui, ne se laissa pas convaincre. Il fugua à plusieurs reprises et fut renvoyé du Collège à quinze ans.
Flora souffrit énormément de cette situation. Elle ménageait la chèvre et le chou mais cela ne résolvait rien du tout.
Thomas revint donc à la boutique, mon père poursuivit son enseignement sans se rendre compte du mal qu’il allait provoquer.
Notre fils n’avait pas le magnétisme nécessaire. Il refusait de l’entendre, encouragé par les mots de son grand-père.
A dix-sept ans, quand Thomas eut l’âge voulu, il s’attela à la fabrication de sa première baguette. Ce fut évidemment un échec complet ! C’est là que mon père ouvrit enfin les yeux. Il en mourut de chagrin sans oser avouer à son petit-fils que j’avais raison.
Juste après le décès de mon père, Thomas fit son bagage. Il déclara qu’il s’en allait de cette maison à tout jamais. Il me regarda en face et me dit qu’il partait rejoindre la famille Gregorovitch. Il partait pour une autre dynastie où on l’accepterait tel qu’il était vraiment.
Flora tenta de le dissuader. En vain.
Le jour où il claqua la porte de la boutique sans se retourner, mon cœur se figea dans ma poitrine. Je ne laissai rien paraître mais, à l’intérieur, j’étais anéanti. Je devins dur comme la glace pour ne pas m’écrouler. Je m’enfermai dans mon atelier, j’y passais des heures et des heures dans un isolement si total que j’en oubliai Flora.
Quelle folie quand j’y repense. Oublier Flora ! Elle qui avait tenté, des années durant, de rétablir la concorde dans nos murs. J’ai été injuste envers elle. Je l’ai laissée seule avec son chagrin sans plus rien partager, ni projet, ni intérêt commun.
Ma tendre épouse en tomba malade et un an plus tard, je me retrouvai seul dans ma petite boutique du Chemin de Traverse.
Mr Ollivander se mit à pleurer comme un enfant.
- Porpentina ! Me pardonneras-tu, un jour, d’avoir rendu ta sœur si malheureuse ?
Les larmes coulaient le long des joues de cette petite femme. Elle ne dit rien mais se pencha pour serrer la main de son beau-frère et le rassurer.

Une brise froide passa dans les branches de l’orme et une fleur se détacha de l’arbre pour venir se poser sur les genoux d’Adam. Le vieil homme la recueillit au creux de sa paume desséchée et lui parla avec regret.
- Oui, ma belle Flora, toi qui embellissais tout avec des riens, je sais que tu m’accompagnes encore dans le souffle du vent, dans la brindille, dans la fleur que je contemple. Tu me manques tant…

Newt était ému. Il se leva pour éteindre les salamandres et les doxies avant d’aller se coucher. Dans le noir, les larmes peuvent couler plus aisément.

Dans la chambre, je m’installai sur le lit pour mieux admirer la décoration qui était née de l’imagination de Flora. La fenêtre était ouverte.
La brise froide nous suivit dans cette petite pièce faisant frissonner les photographies. L’une d’elle se détacha du mur et un petit sac de peau tomba à ses côtés sur l’édredon, habillé de frais.
L’épreuve représentait toute la famille d’Adam. Thomas était au centre, petit bonhomme d’environ sept ans, suspendu entre son grand-père et sa mère. Il avait enroulé ses deux bras autour de leur cou et il riait. Thomas n’avait d’yeux que pour Charles mais il serrait plus fortement les épaules de Flora.
Troublé par le phénomène qui venait de se passer sous mes yeux, je me mis à renifler le petit sac fait de peau.
Il était fait en peau de lézard. Son odeur était forte. Elle réveilla mon instinct de chasseur. Je me mis à jouer avec la ficelle qui le tenait fermé puis je pris la bourse entre mes griffes et commençai à tirer dessus avec mes dents pour l’ouvrir. C’est à ce moment précis que mes yeux de félin découvrirent que cette pochette n’était pas vide. J’arrêtai le mouvement. Une forte bourrasque s’engouffra à nouveau, elle m’enveloppa énergiquement m’empêchant d’agir comme je le voulais. Le vent entra dans la bourse de cuir et en libéra quelques feuilles de papier pelure jaunies par les années.
Je ronronnai pour attirer l’attention d’Adam.
- Par le diadème de Rowena ! Que fais-tu avec cette pochette en peau de Moke, Snowpuff ! C’était Flora qui l’avait accrochée au mur.
- Elle s’est détachée avec le vent, Adam. Je n’ai fait que l’ouvrir et la dernière brise vient d’en dévoiler son contenu. Regarde ! Soufflai-je d’un air convaincant.

Le vieil homme s’empara fébrilement des feuillets de papier fin qui s’étaient éparpillées sur le parquet et sur la housse en lin blanc.
De stupeur, le vieil artisan s’assit lourdement sur le lit.
- Ce sont des lettres de Thomas… dit-il le souffle court. Thomas a donné de ses nouvelles à ma femme et moi, je n’ai rien su de tout cela, dit-il d’une voix lasse.
Je ne répondis rien. Je savais que les humains pouvaient être bien compliqués dans leurs relations, aussi proches soient-ils.

Mr Ollivander se mit à les dévorer sans plus attendre. Il ne put résister à en lire une à haute voix.

Maman,

Mon parcours se poursuit.
Je n’ai pu rester chez Gregorovitch. Je n’ai rien reconnu de ce que grand-père m’avait appris. Aucun respect de la nature, ici. J’y ai trouvé malgré tout un trésor précieux. J’ai fait connaissance avec sa fille unique, une jeune femme merveilleuse. Nous nous aimons et avons décidé de partir ensemble en Inde. Amisha m’a raconté l’histoire de sa famille. Le premier des Gregorovitch a épousé une jeune sorcière d’origine indienne, il y a des milliers d’années. Elle fut malheureuse, séparée de ses racines, obligée de transmettre ses connaissances. La tradition dit qu’elle fut emmenée de force dans ces contrées froides. Elle donna naissance à la lignée des Gregorovitch dont Amisha, elle-même, est l’unique et dernière descendante. Sa mère vient de mourir. Elle se sent malheureuse ici. Nos deux solitudes ont donné naissance à un grand amour et je l’emmène loin d’ici, même si son père s’y oppose.
Nous avons fui cette nuit, en direction de ce pays magnifique. J’y vois comme un retour aux sources. En cette période de fin de colonisation anglaise, j’y bâtirai notre nid ! Je ferai en sorte d’aider ce peuple à se libérer du joug britannique.
Voici donc les nouvelles toute fraîches. Pense à nous très fort demain car ce sera le jour de notre mariage. Ne dis rien à papa ! Comme toujours, il ne comprendrait rien à ce que je fais.
Je t’embrasse très fort. Caresse pour moi le tronc de notre cher orme pour saluer grand-père. Je vous porte tous les deux dans mon cœur. Il battra toujours plus fort quand je penserai à vous.

Delhi, 5 octobre 1937.
Bien tendrement
Thomas et Amisha.


Les mains d’Adam tremblaient. Je ne pouvais dire si c’était la colère, la tristesse ou le soulagement qui les animaient. Les trois sans doute. Adam commenta ce courrier d’une voix ferme et enjouée.
- Ainsi, Thomas n’a pas pu résister. Il a ressenti la nécessité de fuir Gregorovitch. Mon père a donc bien fait de lui enseigner notre savoir-faire. Il semble avoir trouvé un sens à sa vie. Ahahaha ! Je le vois bien aux côtés de ce célèbre moldu… Ce Gan … ce Gandhi, c’est ça ? Aaaaah Thomas ! Mon fils rebelle, attiré par l’Inde. La convoitise de Gregorovitch nous avait ôté l’amour de Maya et Thomas nous le fait revenir dans nos cœurs.

Une dernière brise d’air chaud enveloppa le vieil homme et fit s’échapper la lettre de ses mains. Etrangement, le vent replaça les missives au creux de la pochette en peau de Moke.
Je humai l’air qui passa devant moi et je vis apparaître le fantôme d’une petite femme ressemblant étrangement à Porpentina.
Flora était vraiment là avec nous, en cette soirée d’anniversaire de mariage. La prière de son époux avait dû réveiller sa mémoire et elle lui avait offert ce précieux cadeau, en cette nuit de printemps. Je vis sa silhouette se pencher pour poser un tendre baiser sur les lèvres de son mari solitaire.
Les larmes séchèrent instantanément sur les joues du vieil homme et un doux sourire s’épanouit sur ses lèvres minces.

Le fantôme s’évanouit dans un léger souffle d’air. Il éteignit la lumière avant de rejoindre le ciel étoilé et répandit sur nous un nuage doré qui plongea nos corps dans un sommeil profond et serein.

Notre séjour se termina paisiblement. Adam préparait sa valise sans se presser. Avant de la boucler, il lança un regard circulaire sur cette pièce qui m’avait dévoilé un de ses secrets les plus tendres. Ce regard était doux et souriant. Il tomba néanmoins sur le petit sac en peau de Moke, accroché à la photographie de Thomas. Le tout était resté sur l’édredon. Il le prit délicatement sans arrêter pour autant de le contempler.
- Que ferais-tu à ma place, Snowpuff ? Emporterais-tu cet objet précieux ou le remettrais-tu à sa place, là sur le mur aux souvenirs ?
Je plongeai mes yeux dans ceux de mon ami pendant un long moment. Je me mis à ronronner très doucement
- C’est à toi de décider, Adam. Tout dépend de ce tu ressens au fond de ton cœur ! Le considères-tu comme un cadeau qui t’a été offert ? Représente-t-il une preuve de réconciliation, un pardon ou plutôt une preuve de ta bêtise, une punition ?
Mr Ollivander me sourit tendrement et conclut :
- Je l’emporte….. Je sais ce qu’il contient tout en sachant que je ne pourrai plus jamais le relire. Oui, je l’emmène et j’accrocherai ce trésor à un endroit de ma boutique, toujours bien en vue.
Il déroula la cordelette et l’accrocha autour du cou. J’eus cependant un pincement au coeur en constatant que mes griffes et mes crocs y avaient laissé quelques déchirures.

Nous descendîmes lentement. J’avais peine à quitter cette maison.
Comme tout bon fléreur, je m’attache ainsi à certains endroits et puis, je m’attache à leur propriétaire.
Les deux deviennent inséparables car, souvent, le premier est le reflet profond de celui qui y habite.
Je me suis souvent posé la question de savoir si c’était l’âme du lieu qui débordait sur la personnalité de celui qui y vivait ou si, à l’inverse, c’était le maître du lieu qui gravait son empreinte sur son lieu de vie…. Un bon sujet d’étude, en somme !
Tout en descendant les marches, je jetai des regards furtifs sur Newt, Porpentina et leurs trois fléreurs, tous réunis dans le hall. Quel tableau différent en comparaison des images de mon premier souvenir. Je remarquai le joli ruban d’affection qui s’était enfin tissé entre eux, une proximité qui me faisait chaud au cœur.
Les amis s’embrassèrent, se souhaitant de se retrouver bientôt.
Newt, quant à lui, me prit dans ses bras et m’embrassa tendrement entre les deux oreilles.
Il me souffla lentement des mots bien troublants.
- Snowpuff, souffle de neige. Tu m’as révélé un secret bien caché, une évidence que je n’avais pas envisagée : les êtres doués de vie ressentent quelque chose d’assez semblable à ce que nous appelons l’amour et la haine. Toutes mes prochaines études les pendront en considération et je transmettrai le message à mes petits-enfants. Je te le promets. En échange de ce cadeau de roi, je voulais t’en faire un, moi aussi.
Les fléreurs sont des êtres très doués mais toi, tu as cette particularité de révéler ce qui est caché. Mon ami Adam a changé depuis qu’il te connaît, c’est incontestable.
Ton pelage étincelant comme la neige sous le soleil n’est pas du tout courant parmi les fléreurs.
Porpentina et moi-même avons tout de suite pensé à la même chose, la première fois que nous t’avons vu.
Nous avons pensé à Freyia, la déesse mythologique.
Freiya avait deux chats qui tiraient son char. C’étaient les chats protecteurs de son foyer, des Katermann comme on les appelle en Allemagne, ce que les Keltes appellent aussi des Kattuzes. Freyia y était très attachée.
Ce que je vais te dire, Snowpuff risque de bouleverser ta vie… Veux-tu connaître ce que j’ai à te dire ou préfères-tu que je le garde ?
Je pris un moment de réflexion. J’allais enfin savoir ce non-dit que j’avais perçu à mon arrivée. Je donnai mon accord en caressant le menton de Newt de mon museau pointu et Mr Scamander poursuivit son récit.
- Freyia a transformé un de ses chats en un fléreur blanc comme la neige en remerciement d’un service rendu. Freyia était, entre autres, la déesse de la Magie, ce fut facile pour elle de créer la race des fléreurs.
- Quel est ce service rendu ? ronronnai-je avidement, les yeux écarquillés sous l’effet de surprise.
- Pour attacher le loup Fenrir, les Dieux Tyr, Thor, Njord et Aegir ont fait appel aux Nains de Svartalaheim. Ils leur ont demandé la faveur de créer un lien indestructible, le Gleipnir.
Pour ce faire, ces êtres forgerons avaient besoin de six ingrédients : la racine d’un rocher, la barbe d’une femme, l’âme d’un poisson, la fiente d’un oiseau, le soupir d’un ours et le bruit de pas d’un chat. La corde fut réalisée grâce au don généreux de ceux qui ont bien voulu participer à ce prodige. La corde était incroyablement solide, longue de cent pieds. Elle parvint à immobiliser le loup féroce.
Chacun des donateurs fut, bien sûr, récompensé par les Dieux. Freyia accorda à son chat le statut de fléreur, la vie éternelle, son pelage éclatant de blancheur. Ce félin avait déjà les yeux couleur d’ambre mais la déesse les mit en valeur en y dessinant des comètes par milliers.
Un court silence se posa entre nous. Nos yeux se croisèrent. Mr Scamander ne les quitta pas quand il dit à voix haute sa conclusion en tout bon scientifique qu’il était
- A toi, d’en tirer, maintenant, toutes les conclusions.

Depuis que Snowpuff a raconté ce souvenir, il n’est plus le même. Ce souvenir a remué Snowpuff au plus haut point.
Il n’a pas beaucoup à raconter, la pensée rivée à ce dernier souvenir. Cela en devient une torture. Snowpuff tourne comme un lion en cage, espérant que la mise en mouvement de son corps pourrait ouvrir la porte de cet inconnu qui s’est révélé à lui.
En fait, le temps n’a pas de prise sur ce félin. Il utilise le présent pour me raconter le passé. Je comprend maintenant que ce passé n’a plus la limite que nous nous étions fixée, Snowpuff et moi, quand il est arrivé ici.
Ce félin pouvait remonter jusque… Jusque ?
En posant cette question, je suis prise d’un vertige. Je m’imagine être dans la peau de ce chat, en équilibre entre un passé dont on ne voyait pas le début et un avenir sans fin…… Un poids s’effondre soudain sur mes épaules. Je me sens toute petite, prête à basculer dans la folie.
Je me dirige vers Snowpuff pour partager cette sensation très inconfortable.
Je le prends dans mes bras pour arrêter son va-et-vient incessant. Je le caresse en regardant le petit jardin rempli de jonquilles et de pensées.
- Que vas-tu faire de tout ce temps, Snowpuff ? Pourquoi n’es-tu pas resté près de ta déesse, au Walhalla ?
Snowpuff me regarde avec détresse.
- Je ne sais pas, je ne sais plus ! Tout cela est si loin, enfoui dans ma mémoire.
Je reste là, plongée dans mes réflexions. Je me déplace pour m’asseoir dans le sofa baigné par la chaleur tendre du soleil. Je veux que Snowpuff ne rate rien de mes pensées. Le félin se laisse faire, porté par ma volonté de l’aider et, pour mieux nous concentrer, nous fermons nos yeux.
- Quel est ton plus ancien souvenir, Snowpuff ? Je parle d’un souvenir entier, tu entends bien ?
Le fléreur me répond dans un ronronnement saccadé.
- Celui que je t’ai raconté quand j’ai croisé ton regard… La mort de ma maîtresse, Mrs Smith. Je reste bloqué sur celui-là mais quand je te raconte mes souvenirs plus récents, j’ai parfois des flashes très anciens qui traversent mon esprit. L’histoire de Freyia me fait évoquer quelques images fugaces…..
En entendant ces paroles, je me remémore les souvenirs de Mrs Smith, Figg et de Mr Ollivander.
- Dans tes aventures, Snowpuff, j’ai l’impression que tu révèles toujours des choses importantes dans la vie de tes amis. Cela les aide à faire des choix, cela les apaise, les remet sur un chemin tout neuf et plein d’espoir.
Pourquoi fais-tu cela, Snowpuff ?
- Je ne sais pas ! Je suis comme cela, je suis un être protecteur, c’est tout ! ronronna-t-il plus fort.
- Je remarque aussi que dans chacun de tes souvenirs, il y a comme un fil que tu suis à l’aveugle. Un fil à toi qui va te reconduire à tes propres origines….
Veux-tu savoir ce qui s’est réellement passé dans ta vie à toi ? Veux-tu que je t’aide à connaître le pourquoi de cette errance ?
Je vis passer une nuée de comètes dans ses yeux dorés.
- Tu ferais vraiment cela pour moi ? dit-il
- Je veux bien essayer ! répondis-je. Même si je ne sais pas comment on va y arriver.
- Tu n’auras qu’à m’écouter et suivre ce fil invisible avec moi.
Mes pensées tournent en boucle, je me cale plus confortablement dans le fauteuil aux coussins mœlleux. Snowpuff ronronne de plaisir et je ne peux résister au sommeil.

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Message par Suzywa Mer 2 Mai - 20:47

Le sorcier aux mille et une baguettes
(onzième volet)

1982….1983….1984
Je vis défiler les années que Snowpuff passa auprès de Mr Ollivander. Des années consacrées à la sécurité de ce précieux sage jusqu’à ce que Vous-Savez-Qui et ses fameux mangemorts ne soient vraiment plus en état de nuire.
Je me laissai tomber dans ce tourbillon temporel qui se cachait dans la profondeur des ronronnements du fléreur.
Ma chute se ralentit soudain et je me retrouvai dans un cadre que je connaissais aussi bien que Snowpuff, à présent.

La vie en cette année 1984 avait repris son cours normal. Les années de terreur n’étaient plus qu’un souvenir lointain. La réputation de Mr Ollivander reprenait ses lettres de noblesse.
Le fabricant avait créé la baguette du Lord des Ténèbres, certes cela lui porta préjudice pendant quelques années mais maintenant que ce dernier semblait défait, l’artisan retrouvait une clientèle fidèle et son petit commerce redevenait florissant.

Un soir de printemps, alors que le vieil orme était recouvert de fleurs, je décidai de quitter mon ami pour de nouvelles aventures.
J’étais assis sur le rebord de la fenêtre ouvrant sur le jardin en friche.
Mr Ollivander, lui, était occupé à répertorier les nouvelles substances animales qu’il
venait d’acquérir quand je lui annonçai mon projet.
Le vieil homme arrêta son rangement et me regarda tristement.
- Oh, bien ! fit-il troublé. Je pensais que tu resterais plus longtemps…. Une pause suivit cette hypothèse. En fait, je pensais que tu resterais toujours ici. Je ne t’ai même pas montré comment on finissait une baguette magique, tenta le vieil homme pour me retenir.
Je répondis pour justifier ma décision.
- Le danger semble écarté, à présent, Adam. Il faut que je continue ce que j’ai à faire mais je n’abandonne jamais mes amis. Chaque automne, je reviendrai dans cette maison que j’aime et passerai un peu de l’hiver auprès de ces grands sangliers de pierre. J’attendrai le retour de Orry avec toi. C’est promis !
Adam sourit ou, plutôt, fit semblant de sourire car je ne vis qu’une grimace apparaître sur son visage ridé.
- Où vas-tu aller maintenant ? Qu’as-tu donc de si important à faire ? dit-il d’une voix rauque.
- Je dois poursuivre mon chemin… Connaître d’autres gens !
Je ne sais pas bien comment je suis arrivé ici, je ne sais pas non plus où je vais… Je ne suis qu’un flocon poussé par le vent de la destinée…. Un souffle de neige ne peut rester toujours à la même place, Adam, et, là, je sens que la brise se lève…. répondis-je en regardant les branches de l’orme se balancer.
Je sais que la solitude te pèse mais tes journées sont bien occupées, maintenant, et moi….
- Et toi, tu t’ennuies près de moi…
Je tournai brusquement la tête vers mon ami.
- Tu ne peux pas dire cela, Adam ! hurlai-je dans un feulement avant de reprendre plus calmement. Jamais, je ne m’ennuie près de toi ! Même quand tu ne parles pas, j’observe tout ce que tu fais et c’est comme une longue conversation.
J’aime cette maison. Je serai toujours lié à elle, même quand tu auras rejoint tes ancêtres, au pied du grand orme. Je suis lié à tous les êtres qui y habitent et qui y habiteront puisque je suis un petit morceau d’éternité. Je me demande même si je ne suis pas lié à ceux qui y ont vécu, durant toutes ces lunes….
Mr Ollivander quitta la table de travail pour me rejoindre à la fenêtre. Il me prit dans ses bras et me serra fort contre sa robe de lin.
- Excuse-moi, Snowpuff. Tu as raison. C’est comme la force de la nature qui me pousse à la recherche de ces branches qui se transformeront en baguettes. Je la sens aussi, cette énergie-là. Je t’aime et tu seras toujours chez toi, ici.
Quand comptes-tu partir ?
- Quand tu te rendras chez Newt, à la prochaine pleine lune… dis-je tristement.

C’est ainsi que nous nous séparâmes, en cette nuit de mai, illuminée par mon amie la Lune. A chaque cycle, je la contemple et j’y retrouve les yeux des meilleurs fabricants de baguettes magiques que le monde sorcier ait jamais connus.

Les arbres ainsi refleurirent maintes fois... deux pattes et deux ongles si je compte bien.
Chaque année, je revenais le lendemain du jour d’Halloween pour fêter l’anniversaire de notre première rencontre. Cette année-là, par contre, une force incœrcible me poussa à me rendre chez Mr Ollivander bien avant la date prévue. Je me suis rendu au Chemin de Traverse au début du moi d’août, si je me rappelle bien.
Malheureusement, j’y aboutis réellement avec quelques jours de retard. Je m’étais fait bêtement piéger dans le quartier et j’avais dû faire preuve d’imagination pour me sortir de ce clapier à rats.
Quand j’arrivai à la porte de la boutique, je vis que les volets n’étaient pas placés.
Le noir le plus complet régnait dans la maison. Mon poil se hérissa instantanément.
Je me glissai dans le soupirail qui menait à la cave.
Ma première réaction fut de me rendre au jardin. L’orme perdait ses feuilles.
Adam était donc encore en vie.
Je tentai alors une incursion dans la boutique.
Je sentis directement que quelqu’un rôdait dans la pièce. Je n’avais fait aucun bruit et l’intrus ne m’avait pas entendu. Je connaissais les lieux comme ma poche, pas besoin d’illuminer mes pupilles. Je longeai les étagères derrière le comptoir pour rester caché dans l’ombre épaisse.
J’avais l’individu en ligne de mire.
Petit, caché sous une large robe noire … Une silhouette que j’avais déjà croisée, sûr de sûr de mémoire de fléreur !
Le bonhomme cherchait, tâtait les murs. Il se rapprochait….La bonne affaire.
Sa main s’arrêta à hauteur de tête. Je reconnus l’emplacement où Adam avait accroché la pochette en peau de Moke.
Un voleur ! Un voleur dans la boutique d’Adam !
Sans réfléchir, je rassemblai toute mon énergie dans mes pattes arrière, ajustai la distance qui me séparait de ce brigand et me propulsai dans les airs, mû par la force de la colère. J’émis le plus terrible de mes grognements et atterrit sur les épaules de ce vaurien.
Un cri horrible sortit de sa bouche quand je plantai mes griffes dans sa carcasse maigre et musclée.
- Laissez-moi, je vous en prie… j’fiche le camp, là. J’fais rien d’mal, m’emmenez pas !
L’homme se débattait comme un beau diable. Il m’asséna un coup de coude violent qui me déséquilibra. Je retombai prestement sur le parquet pour me cacher derrière le comptoir. Le voleur ne demanda pas son reste et s’encourut dans la rue déserte.
Il avait emmené le petit sac de peau et cela me rendit profondément triste.
J’avais failli.
Mr Ollivander n’était sûrement pas parti de sa propre initiative.
La boutique était vide. Les rayonnages n’exposaient plus la moindre baguette, pourtant, je ne voyais aucune trace de lutte.
Je reniflai le sol et mon poil se dressa sur mon échine quand je sentis une des traces de pas laissée sur le sol…. Voldemort était passé par ici ….
Bonne Freyia ! Si je pouvais retrouver le Professeur Dumbledore, ce serait vraiment une bonne chose.
C’est ce que je tentai de faire mais en vain. J’étais même allé jusqu’à cette grande maison qui pue le serpent, mais elle aussi était déserte. Je ne m’y étais rendu qu’une seule fois avec Adam mais elle était restée gravée dans la mémoire de mes sens. On n’oublie pas une maison comme celle-là.

J’ai rôdé dans les alentours pendant une année. Je cherchais la moindre trace, la plus petite piste fut exploitée. C’est six saisons plus tard que ma patience fut récompensée.
Tout le monde fêtait la victoire de Harry Potter et la mort de Lord Voldemort.
A la pleine lune du mois des fleurs, je pus vivre le retour de mon ami.
Il était entouré d’une famille que je ne connaissais pas. Ils avaient tous les cheveux couleur de feuilles mortes. Ils accompagnaient Adam avec une infinie douceur, l’un portant sa valise, l’autre le soutenant du bras, le troisième écartant la foule qui s’amassait autour de lui pour lui souhaiter la bienvenue.
Quand Adam me vit au pied de la porte vitrée, il s’arrêta et me sourit.
Pauvre ami ! Dans quel état me revenais-tu ? Je restai pétrifié devant sa silhouette affaiblie, un poil plus consistante que celle de Flora quand je l’avais croisée.
Ses yeux couleur de lune lui mangeaient le visage.
- Je reste avec toi, Adam ! ronronnai-je pour l’encourager à revenir chez lui.
Ses yeux se voilèrent en entendant ce doux message de retour.

Les jours passèrent. L’orme n’avait pas encore fleuri.
Chaque jour, je veillais sur l’arbre, espérant découvrir la floraison tant espérée. Adam avait repris quelques forces mais je savais qu’il était fatigué de vivre. Il aspirait à un autre voyage.
A petit pas, Adam me rejoignit à la fenêtre pour constater que l’arbre ne fleurissait pas encore.
C’est à ce moment précis que la clochette de la boutique tinta. Je regardai Adam d’un air interrogateur.
Je descendis en éclaireur pour observer ce visiteur. Mr Ollivander n’avait pas encore rouvert sa boutique. Ses baguettes avaient été cassées. Tout le stock avait disparu avec son enlèvement. Seuls quelques exemplaires avaient échappé au carnage et attendaient patiemment dans l’étalage.
J’aperçus un jeune homme élancé. Il n’avait pas encore refermé la porte vitrée comme s’il avait peur de déranger. Avec délicatesse, il s’approchait timidement du comptoir. Sa démarche était gauche. Moi, j’avais reconnu immédiatement les yeux verts, les petites lunettes de celui qui avait vaincu le pire mage noir de tous les temps. J’étais émerveillé, la gueule ouverte. Je le voyais s’avancer vers moi.

- Mr Ollivander ? Vous êtes là ? héla le jeune sorcier.
- Qui est là ? demanda mon ami d’une voix rauque et tremblante.
- C’est Harry Potter, Mr Ollivander. C’est moi… Je voulais vous montrer quelque chose. Mais, je vous dérange peut-être ?
- Oooh ! Mr Potter ! Quel heureux hasard. Moi aussi je voulais vous revoir ! Snowpuff ! Montre le chemin à notre ami.
La voix d’Adam était gaie.
Enfin.

Harry Potter et Mr Ollivander s’étaient assis dans le salon. Ils étaient l’un à côté de l’autre en face de la cheminée éteinte. Adam s’était confortablement installé. Une couverture de laine réchauffait ses jambes et ses pieds.
- Mr Ollivander, dit Harry avec joie , je voulais vous montrer ceci.
Le jeune homme tira sa baguette magique de sa poche. Mr Ollivander suivit tous les gestes de son invité. Il tendit la main sans rien dire. Ses yeux étaient exorbités. Harry Potter croisa ses yeux couleur de lune et déposa la baguette sur la paume du vieil homme.
- Comment…. Comment cela est-il possible ? Qui l’a réparée ? dit Adam très ému.
Harry répondit très simplement.
- La Baguette de l’Aîné, Mr Ollivander.
- La Baguette de l’Aîné ? reprit Mr Ollivander éberlué. Lord Voldemort a réparé cet instrument ? Comm..
Le jeune homme interrompit Adam avec un sourire amusé.
- Non, Mr Ollivander ! Vous ne connaissez pas encore tous les détails de l’histoire ! Non. Par un heureux hasard, le Bâton de la Mort m’obéit à présent, même si je ne la possède plus.
Mr Ollivander était bouche bée en entendant ces paroles. Ses yeux pétillaient de malice quand il reprit le cours de la conversation.
- Quelle bonne nouvelle, Mr Potter ! Il faudra que vous reveniez dans quelques temps pour me faire connaître tous les détails de votre épopée. J’adore qu’on me raconte des histoires surtout quand elles finissent heureusement.
- Mr Ollivander, reprit Harry Potter. Je voulais vous voir pour vous demander quelques précisions concernant cette baguette qui m’a choisie à mes onze ans. Je dois vous avouer que vous m’avez toujours impressionné dans votre manière de parler. Quand je vous écoutais, vous paraissiez toujours en admiration devant les actions de Voldemort. Cela me dérangeait vraiment.
Mr Ollivander prit son menton entre son pouce et son index. Il réfléchit un moment avant de se décider à parler.
- Mr Potter, il faut que vous sachiez que la réputation de ce mage était renfermée dans une prophétie remontant à l’Antiquité.
Le premier de ma lignée en avait déjà parlé en 382 avant J-C. J’ai été bercé par sa mélodie durant toute mon enfance et je dois avouer qu’elle exerçait sur moi une fascination quasi hypnotique. Cette fascination était d’autant plus forte que je fus celui qui fut choisi pour vous aider dans votre lourde tâche. Je ne fus qu’un tout petit acteur dans cette histoire. Humblement, j’ai mis l’Art de mes ancêtres à votre disposition. Mais, je n’ai rien fait de bien extraordinaire en comparaison de tout ce que vous avez entrepris pour nous libérer de ce joug.
Adam s’interrompit pour regarder ses longues mains amaigries couvant la baguette de Harry Potter puis, dans la force d'un soupir, avoua ce qu’il avait sur le cœur.
- Je dois même dire que j’ai agi bien lâchement au cours de mon emprisonnement au Manoir des Malefoy.
- Je ne comprends pas bien, Mr Ollivander ! Quel rôle avez-vous joué dans cette histoire ? demanda Harry Potter en se penchant en avant pour accrocher le regard de son interlocuteur.
Adam sourit tristement en entendant la question du jeune sorcier.
- Quand nous nous sommes vus, à la Chaumière aux Coquillages, vous m’avez posé beaucoup de questions profondes à propos des baguettes. Vous étiez très impressionnant, Mr Potter. J’avais le sentiment que vous lisiez en moi comme dans un livre ouvert. Pourtant je suis assez doué en occlumencie. Je sais fermer mon esprit très efficacement. C’est cela qui m’a sauvé de la mort quand j’étais confronté au Seigneur des Ténèbres, même si la torture était terrible. Et vous, en quelques questions, vous cerniez ce que je désirais cacher. Vraiment, vous m’avez impressionné : concision, calme, efficacité.
Vous aviez une aura extraordinaire. Vous aviez la noblesse de Fumseck ! Vous auriez fait peur aux pires de vos ennemis s’ils vous avaient fait face à ce moment-là.
Vous aviez les paroles du courage et de la vérité pour vos amis présents. Oui, je suis fier de vous, Mr Potter, vous avez beaucoup appris de notre cher phénix. Sa plume vous a littéralement transformé. C’est magnifique ! conclut le fabricant de baguette.
- Je n’ai aucun mérite, Mr Ollivander. Je n’ai jamais pu appliquer les principes de l’occlumencie. Je ne lisais pas dans vos pensées à ce moment-là, vous savez ! J’avais juste une connexion particulière avec Voldemort qui me permettait de vivre en pensée ce qui se tramait dans son esprit.
- C’était donc cela ! dit Mr Ollivander en ouvrant tout grand les yeux.
Bien sûr, j’avais des choses à cacher à Vous-Savez-Qui et je ne pouvais pas vous les révéler alors que ce mage risquait encore de gagner la bataille finale.
Je ne pouvais prendre le risque de vous révéler ce que j’avais fait et ce que je voulais enfouir au fond de mon cerveau.
- Que connaissiez-vous, à l’époque, Monsieur ?
- Oooh ! Plusieurs choses, dit le vieillard d’une voix lasse. Je savais que c’était Albus qui possédait la Baguette de l’Aîné… Vous comprenez l’importance de ce secret, maintenant, mon cher ami.
- Mais alors, pourquoi avez-vous dénoncé un innocent ? Pourquoi avez-vous fait en sorte d’accuser Gregorovitch ?
Harry avait réagi vivement, il ne pouvait cacher sa réprobation. Mr Ollivander la lisait sur les traits du visage du jeune sorcier. Cela lui fit de la peine et le remords étreignit le cœur du vieillard.
- C’est là que réside ma grande lâcheté, Mr Potter, mais ne jugez pas trop vite….Ne jugez pas trop vite, s’il vous plait, car j’ai honte du procédé que j’ai dû utiliser.
Il était tout simplement nécessaire et, à presque cent ans, je n’avais plus la force de votre jeunesse. D’ailleurs, ce que j’ai fait ne me donne aucune gloire. C’est le seul moyen que j’ai trouvé pour me défaire d’un ennemi qui a constamment porté préjudice à notre famille depuis que notre Art existe. Je suis tout petit devant votre droiture et votre intelligence.

Mr Ollivander résuma l’histoire que nous connaissons. Il le fit pour tenter d’expliquer le pourquoi de ses actes.
- De toute façon, ma lignée s’éteint aussi ! Regardez cet orme qui se meurt dans le jardin. La fin des Ollivander approche inexorablement, Mr Potter. Je n’ai que la monnaie de ma pièce. Que deviendra le Monde de la Magie quand j’aurai disparu ? Il faudrait un miracle.
Harry avait écouté le récit du vieillard.
- Je comprends mieux maintenant, Mr Ollivander. Vous aviez aussi votre tâche de défenseur de votre Art, bien sûr et vous me l’avez caché juste au moment où Voldemort violait la tombe de Professeur Dumbledore. Qu’aviez-vous encore à me cacher, ce jour-là ?
Mr Ollivander se concentra sur la question. Il était fatigué mais il voulait tout dire à ce jeune homme courageux. Ce débat l’intéressait et cela remettait toutes ses facultés intellectuelles en état de marche. L’artisan reprit la magnifique baguette en bois de houx et la leva à hauteur d’yeux pour la contempler.
- Vous m’aviez posé une question très intéressante sur la réaction de votre baguette. Vous m’aviez dit que cette merveille avait agi toute seule, lors de votre combat aérien avec Voldemort.
Votre instrument avait détruit une autre baguette que celle en bois d’if. Je savais que votre baguette avait péri et je ne pouvais vous répondre de crainte que vous perdiez courage.
Si vous avez survécu au premier Avada Kedavra de ce mage terrible, c’est parce que votre chère mère avait choisi de faire un sacrifice d’amour. Notre regretté Albus avait raison en disant que cette magie ancienne avait opéré comme un bouclier protecteur. Cette magie-là vous a protégé car le sang de votre mère coulait dans vos veines. Mais ce n’est pas tout... A mon sens, bien sûr.
La plume de Fumseck et le bois d’if ont eux aussi réagi, cette nuit-là.
Pendant des années, Tom Jedusor a refusé d’entendre les enseignements de cette combinaison extraordinaire.
Il a imposé des sortilèges abominables à sa baguette. Celle-ci n’a pu accepter plus longtemps ce traitement. En lançant l’Avada Kedavra du 31 octobre 1981, je suis pratiquement sûr que la baguette d’if a agi de sa propre initiative pour punir son propriétaire en le dématérialisant. Elle a fait en sorte d’être physiquement séparée de celui qu’elle avait reconnu aux portes de l'âge adulte.
- Oui, Mr Ollivander, je comprends bien mais Voldemort après avoir repris consistance humaine a réutilisé sa baguette.
Le vieil artisan sourit.
- Oui, mais la donne avait changé à ce moment-là. Fumseck a donné deux plumes de sa robe, à deux moments bien différents. Il me confia la première en 1926, année de naissance du mage et la seconde en 1942, après un premier plan de meurtre fomenté par cet individu et un an avant l’ouverture de la Chambre des Secrets.
Fumseck avait compris que le premier instrument avait échoué dans sa tâche de remettre Tom sur le bon chemin. Il a donc prévu la création du remède que je vous remets en main propre.
Mr Ollivander replaça la baguette de Harry dans le creux de sa main jeune et vigoureuse avant de poursuivre.
- En 1981, cette baguette en bois de houx existait mais n’avait pas encore choisi son compagnon de vie.
Par contre, à partir de 1991, c’est vous qui l’aviez en votre possession, mon cher Harry. Et qu’avez-vous observé ?
- Peter Pettigrow l’utilisait régulièrement. C’est lui qui a tué Cédric sur ordre de Voldemort parce que ce dernier ne pouvait pas la manipuler.
- Vous êtes sur la bonne voie, Mr Potter, continuez votre raisonnement.
- Quand je me suis battu avec lui, le soir de l’épreuve du labyrinthe, il sortait du chaudron et pensait m’éliminer. Il en a été incapable à cause du « Priori Incantatum ». Ma baguette s’est imposée face à celle de Voldemort et j’ai fait jaillir les fantômes de ses dernières victimes.
- Tout à fait, jeune homme. Ce « priori incantatum » équivaut à un duel traditionnel. Votre baguette a vaincu celle de votre redoutable adversaire, à ce moment précis.
Poursuivez encore, je vous prie, vous allez trouver vous-même la réponse à votre question, maintenant que je vous ai soumis ma théorie.
Harry se remémora tous les combats.
- Voldemort n’a plus jamais réussi à me vaincre avec sa baguette ! C’est vrai ! Il s’est résolu à en utiliser d’autres comme vous l’aviez conseillé pendant votre détention et vous l’avez mené sur une fausse piste pour gagner du temps.
Durant le combat dans les airs, la plume de Fumseck est entrée en réaction avec ce que représentait l’individu et non plus seulement avec sa baguette. Ma baguette pouvait vaincre Voldemort et me protégeait coûte que coûte …. c’est cela, Mr Ollivander ?
Le vieil homme acquiesça.
- Très bon raisonnement, Mr Potter ! Mais cela ne pouvait se réaliser qu’à une seule et unique condition : vous deviez être irréprochable et pur. Si je comprends bien, vous aviez en vous quelque chose de terrible qui vous permettait d’être en contact intime avec votre ennemi. Vous auriez pu devenir aussi terrible que lui si vous l’aviez voulu mais vous avez eu la sagesse de rester vous-même, d’écouter ce que Fumseck voulait vous apprendre. Vous vous êtes engouffré dans la voie du bien et votre âme a grandi. Votre baguette ne pouvait que vous rendre ce service en reconnaissance. A ce moment du combat, c’est elle qui a pris vie car vous ne formiez plus qu’un seul être avec elle. Cette symbiose demeure extraordinaire, exceptionnelle ! Jamais je n’avais observé ce phénomène de ma vie.

Cette révélation unit les deux hommes dans le silence de la réflexion et j’en profitai pour intervenir.
Je sautai sur les genoux de ce jeune homme si courageux pour le regarder au fond des yeux. Je fis passer les comètes du firmament dans l’or de mes iris et je commençai à ronronner pour exprimer le fond de mes pensées.
Le jeune homme me regarda attentivement.
- Mr Potter, avec tout l’estime que je vous porte, je voulais attirer votre attention sur le fait que Mr Ollivander est un créateur de baguettes vraiment exceptionnel. Vous avez remporté un combat sur vous-même et sur votre pire ennemi durant ces années de souffrance. Je voulais vous dire que l’Art de Mr Ollivander a une petite place dans votre victoire. Tous ceux qui vous aiment ont apporté ce qu’ils avaient de meilleur pour le mettre à votre service.
Le jeune sorcier caressa mon pelage. Dans ses yeux, je vis défiler une jeune fille aux cheveux bouclés, un garçon aux cheveux couleur de feuilles mortes, un elfe de maison coiffé d’une pile de bonnets de laine, Mr Dumbledore et bien d’autres personnes que je ne connaissais pas….
- Tu as tout à fait raison, Snowpuff ! dit le jeune homme rêveusement. En fait, j’ai beaucoup plus d’amis que je ne le pense.
Je me tournai vers Mr Ollivander et lui ronronnai.
- Dis, Adam ! Tu ne trouves pas que Mr Potter a les yeux de Maya ?
Le jeune homme sourit d’étonnement en entendant mes paroles et se tourna vers le vieil artisan.
- Tu as raison, Snowpuff ! Ta question me rappelle que j’avais aussi quelque chose à vous demander, mon cher Harry.
Le jeune homme releva les sourcils et tendit l’oreille.
- Oui, j’ai observé, il y a quelques semaines, que vous aviez une bourse en peau de Moke. L’avez-vous toujours ?
Harry Potter sortit la pochette en peau de lézard de dessous sa robe, la libéra de son cou et la tendit au vieux sorcier.
- C’est bien ce que je pensais ! dit Adam. Regarde, Snowpuff, on voit les traces de tes dents et de tes griffes, ici.
Adam s’adressa à Harry.
- Comment est-elle arrivée entre vos mains, Mr Potter ? Cette bourse appartenait à mon épouse.
- Oh ? fit Harry. En fait, c’est un cadeau d’anniversaire de mon ami Hagrid. Il travaille comme garde-chasse au Collège de Poudlard. Je n’en sais pas plus, malheureusement. Je vous la rends puisqu’il s’agit d’un souvenir…
Je coupai la conversation par mes ronronnements.
- Quand je suis revenu à la boutique, j’ai vu qu’on la volait…. C’est après que je me suis souvenu de l’identité du voleur : c’est ce Mondingus !
- Reprenez cet objet, Mr Ollivander ! insista le jeune sorcier.
- Non, Mr Potter ! Gardez-le. Je suis vieux et cet objet m’a déjà rendu service dans le passé. Je suis heureux que cette bourse vous en ait rendu d’autres. Je dois même dire que cela m’amuse beaucoup de savoir qu’on peut encore agir par delà le voile noir de la mort.

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Message par Suzywa Mer 9 Mai - 22:03


Le sorcier aux mille et une baguettes
(douzième volet)


Snowpuff est joyeux aujourd’hui. Il fait des cabrioles dans le jardin avec Leïko. Ils se roulent dans l’herbe tendre, tournent comme des fadas en essayant d’attraper leur propre queue.
Le fléreur s’écroule sur son flanc, il offre sa face au soleil de midi et retrousse ses babines comme s’il riait de bon cœur.
Il revient dans le salon pour boire dans son écuelle et je le rejoins dans la cuisine.
- Tu m’as l’air de bien bonne humeur aujourd’hui, Snowpuff !
Le fléreur s’arrête de laper pour me répondre.
- Normal ! Tous les ans, aux environs du 2 mai, on compte beaucoup de réjouissances dans le monde Sorcier. On y fête la chute de Voldemort. Nous avons énormément de commémorations. Nous fêtons tous ceux qui ont combattu vaillamment durant la bataille finale. Nous nous souvenons de ceux qui sont morts dans cette lutte contre le mal. Des corsos fleuris défilent dans les rues. Les sorciers se déguisent comme à Halloween. Tu remarqueras que la date de la victoire est tombée quasiment six mois après cette fête. Un joli brin d’espoir n’est-ce pas ?
Et puis, plus personnellement, c’est aussi en souvenir du miracle Ollivander que je participe à la joie commune.
- Le miracle Ollivander ? dis-je en fronçant les sourcils. Que me chantes-tu encore, Snowpuff ? Tu dois avoir la tête qui tourne trop fort après tes jeux de chaton.

Mes paroles n’éteignent pas la bonne humeur du fléreur. Il se dirige sur la terrasse et m’invite à m’asseoir pour que j’écoute son histoire.

- Tu te souviens de l’échange entre Harry Potter et Mr Ollivander ?
Je confirme d’un signe de tête et Snowpuff poursuit.
- Il avait dit que seul un miracle pouvait sauver son orme…
- Quoi ?! m’exclamai-je, Mr Ollivander est toujours en vie ? Mais il doit avoir…
- 111 ans, exactement ! répond Snowpuff, rapide comme l’éclair.
- Je ne te crois pas ! Son orme n’avait pas encore fleuri dans ce souvenir alors qu’il aurait dû l’être depuis plusieurs semaines.
- C’est ce que je te dis ! C’est le miracle Ollivander !
- Je ne comprends rien à ce que tu racontes, Snowpuff, dis-je exaspérée.
- Alors, suis-moi dans mon souvenir ! Allez, saute dans mes yeux dorés, dit le félin amusé.

Je le fais sans attendre une minute de plus.
J’ai droit à plusieurs flashes en guise d’introduction.
Fugacement, je vois un individu sur une échelle devant la boutique de Mr Ollivander.
Cette personne jette un sort sur l’enseigne ancestrale de ce magasin. Je distingue un rafraîchissement des lettres dorées qui détaillent le nom et la date antique de 382 avant J-C mais l’enseigne me paraît plus longue que celle que j’ai maintes fois aperçue.

Le flash s’estompe pour faire place à un autre souvenir.

J’entre dans l’atelier et vois Mr Ollivander à sa table de travail. Il n’est pas seul. Une petite silhouette est à côté de lui.

Le souvenir s’évanouit à nouveau et un autre apparaît. Ce dernier est plus net que les précédents.

Je reconnais la boutique.
Les étalages sont pratiquement vides. Une dizaine de boîtes en carton ont été disposées sur l’étagère du bas. Cela faisait vraiment minable en comparaison du foisonnement que j’avais connu dans les souvenirs plus anciens.
Mr Ollivander semble avoir repris des forces. Il parvient à se déplacer, aidé d’une canne. Son dos voûté porte encore le poids des épreuves qu’il a dû endurer pendant sa captivité mais il arrange sa boutique avec entrain.
Des guirlandes de fleurs fraîches décorent le comptoir et de petits cartons de félicitations flottent tout seuls dans les airs. Dehors, des cortèges défilent au son du tambour et de la trompette. C’est la fête à l’intérieur et à l’extérieur de cette boutique aux senteurs boisées.
Moi, je suis couché sur la surface du comptoir ciré. Je regarde ce que mon ami fait.

La porte de la boutique s’ouvre doucement, laissant entrer toute l’allégresse des défilés commémoratifs.
Mr Ollivander relève la tête. Je vois avec bonheur que le vieil artisan a retrouvé son ardeur. Son visage était serein, ses yeux vifs et brillants.
- Bonjour. Que puis-je pour vous ? demanda doucement Mr Ollivander.
- Beaucoup sans doute… répondit une voix jeune.
Le client qui était entré avait un immense chapeau pointu plongeant son visage dans l’ombre. D’immenses lunettes noires en cachaient le haut. Le regard de Mr Ollivander fut attiré par la grande robe faite en soie couleur crème. L’individu tenait son balai à la main. Il le posa sur le porte-accessoire accroché au mur avant de s’approcher du comptoir.
- Je viens vous acheter une baguette magique.
Mr Ollivander arbora une mine déconfite.
- Je crains que vous ne veniez un peu tôt ! J’inaugure aujourd’hui l’ouverture de mon magasin. Quelques problèmes de santé, quelques soucis ont traversé les deux années qui viennent de s’écouler. Je n’ai malheureusement pas grand-chose à vous proposer.
Adam se tourna lentement vers le rayonnage et dévoila les quelques boîtes qui attendaient d’être enfin manipulées.
- On peut toujours essayer ? demanda la jeune voix d’un air enthousiaste.
Mr Ollivander se baissa derrière le comptoir pour prendre son mètre ruban aux marques argentées et se déplaça, à petits pas, vers son client.
- Etes-vous droitier ou gaucher ?
- Je suis droitier.
- Tendez votre bras, je vous prie.
Mr Ollivander prit note des différentes mesures, parfois si abracadabrantes que j’en retroussai les babines de plaisir. Mon ami en arriva à devoir prendre une mesure plus précise.
- J’ai besoin de connaître votre tour de tête. Auriez-vous l’obligeance de retirer votre chapeau pour que je puisse disposer de cette information capitale ?
Après un court moment d’hésitation, le client procéda. Il ôta le couvre-chef et laissa apparaître des cheveux très courts. Ils avaient l’éclat lustré du plumage du corbeau quand il étale ses ailes pour les réchauffer au soleil. Les traits du visage étaient jeunes. Il pouvait avoir 17 ou 18 ans, pas plus.
Ce client m’intrigua car la lumière naturelle laissa également apparaître une couleur de peau particulière.
Les lunettes noires aussi m’interpellaient. Ce sorcier avait-il des problèmes de vue ?
Adam prit la mesure et se gratta le haut du crâne.
- Tous les exemplaires de baguettes qui me restent pourraient vous convenir. Le plus simple sera de les essayer. Veuillez vous installer confortablement sur cette chaise, s’il vous plait.

Adam ouvrit délicatement une boîte et en sortit une baguette de bois clair.
- Baguette en bois de peuplier, 26,1 cm, crin de licorne, très efficace pour les sorts de défenses. Mais fragile, trèèèèès fragile !
Le jeune sorcier s’en empara et une pluie d’étoiles en jaillit.
Moi, je me redressai. Quelque chose n’allait pas. Cette baguette de peuplier évoquait toujours en moi une personne blonde à la peau claire et aux yeux brun vert. Or, ce n’était pas du tout le modèle correspondant au sorcier que j’avais devant les yeux. Pourtant, cette baguette fonctionnait correctement !
Mr Ollivander m’observa. Comme il me connaissait bien, à présent, il avait lu dans mon regard que j’étais intrigué.
- Je pense que nous avons trouvé votre bonheur. Mais comme le choix est limité, je vous propose d’essayer les sept exemplaires que j’ai en stock.
Le jeune sorcier approuva. Je découvris un sourire franc et sympathique et je penchai la tête pour mieux pénétrer ce visage avenant.
Mr Ollivander proposa une baguette en bois de saule, plume de vif d’or, 29, 5 cm.
Il resta immobile quand il s’aperçut qu’elle fonctionnait tout aussi bien entre les mains fines du sorcier.
Il ne dit cependant rien, ne laissa rien paraître de son étonnement. Il n’en était pas de même pour moi. Je commençais à ressentir ce fourmillement dans les pattes quand un sujet me turlupine. Je me levai pour faire quelques pas sur le comptoir.
- Voulez-vous essayer ceci ? proposa Adam dans la foulée.
C’est une baguette en bois d’ébène avec crin de licorne. Elle est petite puisqu’elle ne fait que 21,25 cm. Elle est très ancienne et je pense qu’elle vous ira parfaitement.
Quand je revis cette baguette, un éclair passa dans ma cervelle de félin. La silhouette du sorcier qui se dessinait dans ma tête épousait parfaitement celle du sorcier à moitié caché derrière les lunettes.
Quand le client prit la baguette dans ses mains, ce fut un feu d’artifice d’étoiles qui explosa au plafond de la boutique.
Mon regard croisa celui d’Adam. Il sourit de bonheur et conclut avec enthousiasme.
- Cette merveille aura attendu plus de 500 ans avant de vous rencontrer, Mademoiselle.
Je fixai le visage surpris de la jeune sorcière. Troublée d’avoir été découverte, elle demanda doucement.
- Combien vous dois-je, Mr Ollivander ?
- 7 mornilles.
La jeune femme prit une jolie bourse en peau de Moke et en sortit quelques pièces usées. Mais il faisait sombre dans la pièce et pour mieux distinguer la valeur de la monnaie, elle décida de retirer ses grosses lunettes noires qui ne servaient plus à grand-chose, maintenant.
Elle rassembla le compte exact, prit les piécettes dans sa main aux doigts fins et gracieux. Elle se redressa et paya le vieux marchand.
Mr Ollivander resta interdit en recevant les mornilles. Il ne les vit même pas. Il ne vit que deux yeux gris pâles, identiques aux siens. La jeune femme lui sourit, passa derrière le comptoir pour embrasser le vieillard comme on embrasse un grand-père.

La bulle du souvenir éclata et je m’empressai de poser des questions à Snowpuff tant mon étonnement était grand.
- Cette jeune femme est de la famille de Mr Ollivander ?
- Oui. C’est son arrière petite-fille !
- Oh, Bon Dieu ! Quelle histoire. Mais c’est une fille ? Les Ollivander avaient-ils déjà eu des druidesses, fabricants de baguettes ?
- Non ! Jamais, tu le sais bien puisque je t’ai raconté toute leur histoire, me rappela Snowpuff sur un ton bougon.
- Que sais-tu de son histoire à elle ?
- Thomas et Amisha se sont mariés en 1937. Ils ont vécu à Delhi et ont eu un fils qu’ils prénommèrent Shakti. Point d’yeux gris au rendez-vous, malheureusement, mais comme Thomas était rebelle, il lui transmit ses connaissances en Art de fabriquer les baguettes.
Shakti vécut de manière sereine et épousa la fille d’un brahmane. Ils eurent une fille, Thrupti. C’est Thrupti Ollivander que tu as croisée dans mon souvenir.
Shakti a commencé à enseigner à sa fille ce qu’il avait acquis de son propre père. Malheureusement, ces années de bonheur furent de courte durée. Elle perdit ses parents dans un accident de train.
Elle s’en sortit indemne et fut accueillie dans un orphelinat. Elle avait dix ans quand ce drame a cassé le cours heureux de sa destinée.
Elle resta sept années à l’orphelinat. Comme elle était déjà âgée, personne ne l’adopta.
A sa majorité, la Directrice de l’institution lui remit ce qui lui restait comme souvenir de sa famille : un grand album photo, hérité de Thomas. C’est ainsi que la jeune femme retrouva la Boutique du Chemin de Traverse.
- C’est fabuleux ! Vraiment fabuleux comme histoire, Snowpuff.
Pourtant, que se passera-t-il si Thrupti se marie, elle perdra son patronyme ?
- Thrupti a décidé que si elle se mariait, elle garderait les deux noms accolés à son prénom. Elle a pris ses dispositions pour que ses enfants suivent cette règle d’or. « Ollivander » sera toujours écrit en lettres d’or sur la publicité accrochée au-dessus de la boutique.
- Mais alors qu’a-t-on changé sur l’intitulé de l’enseigne ? J’ai repéré des modifications quand tu m’as emmenée tout à l’heure dans tes souvenirs.
Snowpuff retroussa ses babines.
- Thrupti a juste ajouté une précision : « Ollivander, père, fils et filles- Fabricants de baguettes magiques depuis 382 avant J-C ». Une nouvelle ère s’ouvre.
Le jour même où Thrupti est arrivée à la boutique, l’orme connut une floraison comme il n’en avait plus porté depuis deux ans.

Je retombai contre le dossier de ma chaise de jardin. L’histoire était belle et j’avais la joie au cœur.
Snowpuff ne me laissa pas de répit, pourtant.
- Ne rêve pas trop, je t’emmène pour découvrir un autre miracle Ollivander !
- Encore ? demandai-je avec stupeur.
- Oh Oui ! Un merveilleux qui te réjouira au plus haut point, souffla-t-il mystérieusement.

Snowpuff se cala contre mon cœur et je partis au pays des souvenirs sur les vagues de ses ronronnements.
Je retrouvai la vision fugace que j’avais eue une heure avant.
J’étais assis sur la tablette de travail et j’observais tous les faits et gestes.
Mr Ollivander était dans l’atelier. Il travaillait à sa grande table burinée. Thrupti était à côté de lui. Ses cheveux noirs étaient un peu plus longs que dans le souvenir précédent. Sa peau mate était mise en valeur par l’éclat lumineux de ses yeux.
Elle écoutait attentivement les paroles d’Adam qui était occupé à lui transmettre ses connaissances.
Ils étaient concentrés sur le bois fendu d’une baguette. Adam expliquait la manœuvre à suivre pour colmater la brèche. Thrupti était penchée sur l’ustensile et mémorisait les conseils de son aïeul.
- Tu as bien compris, Thrupti ? Alors vas-y, procède.
Mr Ollivander m’envoya un clin d’œil traduisant son bonheur de pouvoir enfin jouer son rôle de transmetteur du savoir.
Thrupti s’empara d’une grosse section de branche de saule. Elle utilisa sa baguette d’ébène pour en découper une fine lamelle. Elle prépara une coupelle de verre. « Wingardium leviosa » ! Le morceau de bois s’éleva dans les airs et la jeune sorcière la déplaça au-dessus du petit récipient.
« Pasta labor » lança-t-elle de sa voix claire. Sous mes yeux ébahis, je vis tous les ustensiles de Mr Ollivander se mettre en ordre utile. Les ciseaux, la bouteille d’huile de lin, le pilon, le petit pot de colle à bois et la cuillère se rangèrent en file indienne devant Thrupti.
Les ciseaux commencèrent à découper menu la lamelle de bois tendre. De tout petits morceaux tombèrent dans l’assiette creuse. La bouteille s’actionna et versa d’elle-même un filet d’huile de lin sur le contenu de l’assiette. Ensuite, le pilon entra dans la danse, écrasant les morceaux de bois pour les réduire en fibres. Une mixture brunâtre apparut et le petit pot de colle à bois s’envola dans les airs laissant tomber quelques gouttes de son contenu dans la pâte à bois. Enfin, la cuillère se dressa et se planta verticalement dans la pâte de bois. Elle mélangea soigneusement tous les ingrédients pour créer la pommade qui sauverait la baguette endommagée.
Quand la cuillère eut fini son office, celle-ci se déplaça pour revenir auprès de ses compagnons de travail.
- Parfait ! s’exclama Adam en posant un baiser sur la joue de son arrière-petite-fille. Tu as très bien suivi les consignes. Maintenant, aborde la suite.
Attention, cette manoeuvre est vraiment délicate. Tu dois y mettre tout ton amour ! Avant d’agir, imagine celui que j’ai apporté dans la fabrication de cette baguette. Dès que tu le sentiras, ajoutes-y tout l’espoir de voir revivre cet objet sous tes doigts. Les sentiments sincères que tu apporteras ici seront absorbés par le bois et par le crin de licorne que tu as pu observer. C’est cette force-là qui ranimera mon œuvre.
Retiens bien cela. Le magnétisme que tu as reçu ne suffit pas pour faire de bonnes baguettes magiques, Thrupti. Il faut aussi que tu y mettes de toi-même. Pense d’abord à l’amour de ton métier, pense ensuite positivement à la personne qui emportera ton œuvre même si tu ne la connais pas. Fabriquer des baguettes, c’est la fusion de trois éléments essentiels : Le végétal, l’animal et l’humain unis pour le meilleur et parfois aussi contre le pire.

Thrupti ferma les yeux et se concentra sur sa tâche future. Elle médita les paroles de son arrière grand-père. Quelques minutes s’écoulèrent.
Soudain, Thrupti ouvrit les yeux. D’un geste sûr, elle s’empara de la baguette de saule. Deux étincelles jaillirent du crin de licorne qui battait en son cœur. La jeune sorcière la fixa délicatement dans le petit étau que je connaissais bien. Elle ajusta l’objet de telle manière que la blessure soit bien apparente. La jeune femme se pencha pour observer la faille puis s’empara d’une pipette de verre et la plongea dans la pâte de bois. « Aspiro » souffla-t-elle. L’ustensile absorba la dose voulue. Thrupti boucha l’extrémité du tube de verre pour arrêter l’action. Délicatement, elle déposa la pommade sur la blessure. Un sourire radieux éclaira son visage penché si près de la baguette. Ses yeux ne quittaient pas l’objet. Une fois, l’action terminée, la jeune femme caressa la baguette affectueusement pour enlever les dépôts qui avaient débordé. Elle mit en jeu la manette de l’étau et celui-ci referma l’entaille. La sorcière essuya de ses doigts la pâte qui avait coulé sous l’effet de la pression.
Elle se redressa et laissa ses yeux traîner sur la baguette pendant quelques minutes.
Quand elle chercha Adam du regard, elle sourit. Mr Ollivander acquiesça d’un battement de paupières, l’un se reconnaissant dans l’autre.

Thrupti alla se rincer les mains, elle revint quelques instants plus tard. Elle s’arrêta devant la branche d’orme qui attendait depuis des années, maintenant. Elle s’en empara pour admirer le savoir-faire de Mr Ollivander.
- Pumamasa ? interrogea la sorcière. Tu es occupé à fabriquer une nouvelle baguette ?
Je sautai sur la table de travail pour rejoindre cette jeune fille bien curieuse.
- Oui ! Un projet qui remonte à plus de cinquante ans ! soupira Adam.
- Tant que ça ? dit la jeune fille les yeux écarquillés.
Adam confirma.
- Oui. Un projet pour une amie cracmolle. Je doute toujours qu’elle le soit vraiment.
Je pris part à la conversation et m’approchai un peu plus de la jeune indienne.
- Arabella Figg a habité ici, avec ses parents, pendant quelques années. Adam s’est occupé de cette petite famille avec beaucoup d’affection. Adam voulait trouver la baguette magique qui révèlerait les dons magiques cachés d’Arabella mais il ne l’a jamais trouvée.
- C’est bien cela, Snowpuff ! confirma l’artisan. Je n’ai que deux ingrédients en main : mon affection pour Arabella et le bois d’orme qui, dans le calendrier celte, est l’arbre protecteur des enfants nés en juillet. Le troisième me manque……
- As-tu une photographie d’Arabella, Pumamasa ? demanda Thrupti.
Mr Ollivander fronça les sourcils et réfléchit.
- Non. Son image n’impressionnait pas notre pellicule magique, malheureusement !
J’intervins alors.
- Moi, je peux t’aider, Thrupti ! Tu peux la voir dans un de mes souvenirs. Je choisis le plus beau, le dernier que j’avais d’elle quand elle chantait sa jolie chanson en regardant les joies d’Halloween, en 1981.
Thrupti me prit dans ses bras et les croisa autour de moi. Elle n’avait pas lâché la baguette. Pour mieux observer les images qui allaient se former, elle ferma les yeux et posa son front délicat contre mon museau. Quand je sentis la jeune sorcière prête, je lui racontai ce souvenir du début à la fin.
Mr Ollivander était témoin de la scène. Ce qu’il vit pendant ces quelques moments d’intimité, jamais, il n’aurait cru le voir de ses yeux de son vivant.
Un nuage d’étincelles sortit de la baguette de bois d’orme durant toute l’évocation de ce souvenir.

Quand nous revînmes dans le présent, nous nous tournâmes vers Mr Ollivander. Thrupti voulait exprimer quelque chose mais elle s’interrompit en voyant des larmes couler sur les joues d’Adam.
- Magnifiques ! Vous êtes magnifiques, tous les deux, dit le vieillard.
- Tu es trop émotif, Pumamasa. Tu ne dois pas te mettre dans des états pareils.
- Vous êtes magnifiques ! J’ai enfin trouvé ce je cherchais. Thrupti, tu as trouvé ce qui manquait à cette baguette. Le bois s’est mis à vivre dans tes mains quand tu avais Snowpuff dans tes bras.
Nous restâmes pétrifiés en entendant ces paroles. Thrupti m’embrassa et me fit tournoyer avec elle autour de la grande table. Il y avait si longtemps que les rires n’avaient plus résonné aussi fort entre ces quatre murs.
Quand nous arrêtâmes notre ronde folle. Je sautai sur la grande table pour m’affaler sur sa surface. Ma tête tournait tant que je ne pouvais plus rester sur mes pattes. Je profitai de cette sensation d’ivresse pour ronronner un mot à Thrupti.
- Approche, Thrupti ! Viens vite…. Profite de mon étourdissement pour arracher une de mes moustaches. Fais vite, c’est le cadeau que je t’offre. Utilise-la pour cette « création spéciale Mrs Figg » !

Thrupti donna vie à sa première baguette. Cela ne prit pas beaucoup de temps. Elle était douée, cette jeune sorcière ! Quand, je vis l’œuvre terminée, la plus belle des photos souvenir se grava dans mon esprit, celle d’Arabella se penchant vers moi, les yeux étincelants de comètes.
Mr Ollivander avait perçu mes images lui aussi. Il comprit que c’était une totale réussite.

Je revins dans le jardin de ma petite maison de banlieue. Je ne sus quoi dire.
Je comprenais les jeux fous de Snowpuff sur la pelouse. Il revivait, chaque année, la danse folle avec Thrupti autour de la table de travail. Il voulait revivre cette sensation d’accomplissement qui l’avait enchanté. Il voulait fêter son cadeau à Arabella Figg.
- Et Mrs Figg ? Qu’a-t-elle dit de cette surprise ? demandai-je.
Snowpuff sourit dans ses moustaches et me répondit.
- Tsssssst ! Tu es trop gourmande. Ca ? C’est une autre histoire…

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Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 Empty Re: Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours)

Message par Suzywa Mer 16 Mai - 20:53

Combien de fois avais-je vu Snowpuff aller et venir en proie à une réflexion profonde depuis que j’avais fait sa connaissance ? Je ne pouvais plus les compter.
Cela fait déjà six mois qu’il vit dans ma petite maison de banlieue et ce n’est que maintenant que je commence à découvrir la face cachée de sa propre histoire.
Il est arrivé en pays moldu mais pourquoi de ce côté-ci du monde terrestre ? Et puis, comment est-il arrivé ici ? Un fléreur ne semble pas doué pour le transplanage ! Avec qui est-il venu, alors ?
Ces questions ne trouvent pas de réponses….
Elles vont et viennent dans les lobes de mon cerveau, tel des félins faisant les cents pas…

Je dois cependant découvrir le mystère de Snowpuff. Il le faut car, sans cela, je ne trouverai jamais le repos.
Il est manifeste que mon ami souffre d’amnésie. Il cherche des indices pour retrouver le fil de sa propre mémoire. J’en tiens une extrémité.
Pour mieux l’aider dans sa quête, j’ai trouvé un vieux bouquin de Jean Mabire sur la mythologie nordique.
Je plonge dans ses chapitres à la découverte de ces histoires de Dieux et Déesses imaginées dans ces contrées si froides et je tombe sur ceci. Je le partage avec vous :

Les premiers actes des Dieux.

Prenant place comme à l'accoutumée à Idavoll, le lieu de réunion des Dieux qui est le centre de l'univers, les Éternels entreprirent de délibérer sur le destin du monde et sur son état, envisageant ses caractéristiques les plus diverses.

Ainsi apprirent-ils en particulier qu'un homme du nom de Mundilfari avait deux enfants si beaux qu'il les avait nommés Sol, le soleil, et Mani, la lune. Estimant qu'il s'agissait là d'une bien grande prétention, les Dieux réfléchirent au moyen de châtier une telle témérité, car c'eût été chose grave de laisser de simples humains se réclamer des astres créés par les Très-Hauts eux-mêmes. Du coup, ils enlevèrent Mani et Sol laquelle venait tout juste de se marier à Glem.

Usant d'ironie, ils choisirent de faire respectivement de ces enfants les auriges des chars qui dirigent la lune et le soleil dans leur périple. Le soleil étant issu des flammes de Muspellheim, il importait que le char de Sol fût bien refroidi et que les chevaux Arvak et Alsvid qui le tirent fussent protégés de son incandescence. Aussi les Dieux placèrent-ils sous les coursiers de grands soufflets qui projettent un vent appelé Isarnkoll, le froid de fer.

Quant à Mani qui préside à la croissance et à la décroissance de la lune, il enleva à son tour deux enfants, Bil et Hjukin, afin de chasser sa solitude et d'en faire ses compagnons, la fille Bil étant visible lors du décours et le garçon lors de la croissance de la lune. Depuis ce temps, l'astre est associé à l'élément liquide et préside aux marées, car ce fut alors qu'ils étaient partis chercher de l'eau à la source de Byrgir que les deux enfants furent enlevés.


J’interromps ma lecture car tous ces noms compliqués rendent la compréhension du chapitre difficile mais aussi parce que mon esprit ne peut s’empêcher de faire des liens avec Arabella et Adam. Les contes d’origine norvégienne, « East of the sun, west of the moon » et « East of the moon, west of the sun », me reviennent en mémoire. Je vois les yeux couleur de lune d’Adam, son aïeul venu des contrées du nord, j’entends sa voix parlant de Freiya. Non, ces récits de Snowpuff ne doivent pas être le fruit du hasard…

Bien qu'ils paraissent éternels, les astres subissent une menace perpétuelle et c'est cette crainte qui les fait courir tout au long des jours et des nuits. En effet, à l'est de Mannheim s'étend la forêt de fer dans laquelle vivait une géante qui mit au monde des rejetons à l'apparence de loups. Parmi eux naquirent ceux qui furent lancés dans les cieux pour dévorer les grands astres. Depuis, Skoll poursuit inlassablement le soleil et Hati, la lune. De là provient la course effrénée qui ne prendra fin qu'avec le Crépuscule des Dieux, quand disparaîtra ce qui fut agencé par les Très-Hauts à l'instar du soleil et de la lune qui seront dévorés par les héritiers des géants. C'est pour cette raison qu'il importe de bruyamment faire fuir Skoll quand en une éclipse il semble rattraper le soleil ou quand Hati se rapproche trop de la lune, faisant disparaître les astres à la vue des hommes qui croient avoir affaire à une simple éclipse.

Je pose à nouveau mon car je découvre que le monde des Dieux du Nord n’est pas éternel. Deux loups pourchassent les deux astres de manière perpétuelle. Quand ils les auront dévorés, le Crépuscule des Dieux commencera et dans cette génèse, les loups ont un lien évident avec la fin du monde.

J’avais la profonde conviction que les quelques indices laissés dans les récits de Snowpuff étaient des rendez-vous à ne pas rater. Je me replonge donc dans la lecture de ces contes et légendes venus du fond des temps car une hypothèse commence à germer…

Snowpuff choisit ce moment-là, précisément, pour m’empêcher de reprendre ma lecture.
Il fait tomber mon livre sur le tapis et s’installe sur mes genoux.
Le fléreur met son museau dans ma main droite et la renifle doucement. Son souffle et ses moustaches chatouillent ma paume.
- Tes mains sont douces et chaudes. J’ai rencontré de belles mains tout au long de ma vie mais j’en ai vu de terribles aussi, tu sais !
J’écoute Snowpuff attentivement car je le connais mieux à présent.
Je sais qu’en commençant ainsi, il va m’emmener vers un autre coin de sa mémoire.
Sensible à ma réaction, mon ami poursuit son monologue.
- Les mains des humains sont le prolongement de leur cerveau.
Eux pensent et leur main exécute. Elle complète la communication mais exprime aussi la puissance et l’autorité. La main rend justice, elle peut guérir également par simple imposition.
On peut y lire l’avenir dans les lignes de la main droite, on peut trouver le passé familial dans celles de la main gauche.
Snowpuff change de position et se retrouve couché sur mes genoux pour bien me faire face.
- Te souviens-tu des derniers épisodes que je t’ai racontés à propos de Mr Ollivander ?
J’acquiesce silencieusement sans quitter le fléreur des yeux.
- Je t’avais dit que je m’étais fait piéger dans un endroit horrible. Un homme m’a poursuivi peu avant que je n’arrive à la boutique de mon ami et m’a attrapé. En un tour de main, je fus emprisonné dans un sac de bure.
L’homme m’emmena dans un quartier que j’avais toujours évité. Je fus conduit dans une autre boutique qui puait la magie noire. On me plaça dans une cage à côté d’un objet impressionnant dont j’ai appris beaucoup.
Avant de conclure, Snowpuff émet un ronronnement venu du gouffre de l’au-delà.
- Je vais te raconter ce que je sais de cet objet qu’on appelle

La Main de Gloire.

- Tu as deviné où je me suis retrouvé, n’est-ce pas ? reprend le chat dans un ronronnement de souffrance.
- Oooh oui ! approuvé-je. Sûrement dans l’Allée des Embrumes, dans la boutique de Barjow et Beurk ! Malheureux ! Mais par qui as-tu été kidnappé et pourquoi ?
Le fléreur réfléchit avant de répondre.
- Je suis persuadé que c’était intentionnel. On surveillait mes allées et venues. On connaissait mes habitudes.
Je voulais arriver plus tôt que de coutume à la boutique. C’était la fin du septième mois, je m’en souviens très bien. J’avais la perception d’un danger enveloppant la destinée de Mr Ollivander. Je pense que, ce jour-là, quelqu’un m’a empêché de rejoindre Adam pour mieux l’enlever à son tour.

Je réfléchis à cette hypothèse et la trouve logique. Je tente quelques spéculations pour deviner qui avait bien pu agir.
Je me replonge dans ce que je connaissais du tome 6 de Mrs Rowling.
Nous étions en été, Harry Potter et ses amis allaient entrer en 6ème année à Poudlard.
Ce jeune sorcier était déjà au Terrier depuis la mi-juillet.
Durant ces mois de vacances, Draco Malefoy avait dû s’affairer près de cette boutique pour trouver le matériel nécessaire en vue de réaliser ce que Voldemort exigeait.
Il devait avoir repéré le collier d’opale que Katie Bell allait emporter en octobre à Pré-au-lard. Il devait être intéressé par l’armoire qui lui servirait de passage le soir du drame de la Tour frappée par la Foudre.
La silhouette du jeune homme se dessina plus précisément dans ma tête au fur et à mesure que je me parlais.

Snowpuff avait suivi mon raisonnement. Il m’approuve dans un battement de paupières.
- C’est bien ce jeune homme qui a dévié ma course. J’ai reconnu ses traits dans ton esprit. C’est lui que j’ai vu quand il m’a placé dans cette cage minuscule.
Impossible de me retourner là dedans ! J’ai soufflé ma rage quand j’ai entendu le cliquetis du cadenas qui scellait ma prison. J’ai griffé sa main quand il s’est penché vers moi avec ce sourire méprisant. Draco Malefoy l’a retirée immédiatement en me traitant de vulgaire chat de gouttière.
Il sifflait comme un serpent et sa voix traînante transpirait la menace et le mépris. Il avait le dessus et en profitait pleinement.
Snowpuff me fait écouter le message que ce jeune sorcier lui avait réservé dans la boutique de Barjow.
« Ne t’avise plus de recommencer ce que tu viens de faire, tu entends ? Je me réjouis de voir les nouveautés présentées dans cette boutique. Savais-tu que les os de fléreur sont fort recherchés en magie noire ? Tu auras beau griffer, souffler toute ta fureur, personne ne sait que tu es ici et ce n’est pas Mr Barjow qui révèlera ta cachette. C’est un allié sûr aussi muet qu’une tombe, en certaines circonstances. »
J’entendis un petit ricanement tranchant comme la lame d’une guillotine :
« Tu ne retrouveras plus jamais ta liberté et, en temps voulu, tes os seront vendus pour créer la pire des potions de magie noire. En attendant, je te souhaite un excellent séjour ! »


J’avais écouté Snowpuff très attentivement.
Ce message n’augurait rien de bon mais il était plein de sous-entendus bien intéressants. Après avoir mis ces informations en attente dans ma mémoire, je pose au félin cette question qui m’avait toujours intriguée.
- Snowpuff, Draco était-il tout seul quand il est venu dans cette boutique ?
- Non. Quelqu’un d’autre l’accompagnait. Draco semblait en avoir peur. Cet être était en retrait, caché sous un grand capuchon noir. La robe de mangemort était trop étroite pour sa stature. Il n’est pas entré dans le magasin. Il faisait semblant d’admirer les objets exposés en vitrine mais, en réalité, il surveillait les moindres gestes du jeune Malefoy.
- Qui était-ce ?
Un flash passe dans les yeux dorés du fléreur. Je ne vois qu’une mâchoire gigantesque dépasser de sous le capuchon mais elle est facilement reconnaissable.
- Fenrir Greyback !
Snowpuff acquiesce avant de reprendre son récit.
- Le jeune Malefoy n’est pas resté longtemps. L’obscurité de l’arrière-boutique m’enveloppa de son noir manteau. J’ai juste observé qu’il s’était attardé devant une grande garde-robe antique. Il a ouvert la double porte, y est entré pour en ressortir après un moment assez long.
Je réagis prestement :
- Le passage vers la seconde armoire située dans la Salle sur demande. Elle était cassée à cette époque de l’histoire et allait servir d'accès secret aux Mangemorts en fin de livre.
- C’était donc ça ! Je me suis toujours demandé le pourquoi de cette attitude. Le jeune sorcier n’était pas satisfait en sortant de là. Il se plaignait. Il disait que son projet risquait de prendre du temps. Le loup, lui, se frottait les mains de plaisir derrière la vitrine.
- Voldemort avait dû lui faire des promesses alléchantes en cas d’échec du plan.
- Ils sont partis ensuite en transplanant….précise le fléreur.

Je me rappelle le passé inconnu de mon compagnon. Je trouve troublant de constater qu’un loup soit présent dans la saga de Harry Potter et dans la mythologie scandinave.
C’est tout de même un personnage spécial sans comparaison avec celui de Lupin. J’ai la nette impression que Fenrir Greyback gardait une apparence animale même en dehors des heures de pleine lune.
Je fais part de mon trouble au fléreur :
- Snowpuff ? T’es-tu rendu compte que ce Fenrir Greyback porte le même prénom que le loup de la mythologie scandinave ? Qu’as-tu ressenti quand tu as vu cette bête ?
Le félin se fait tout petit quand il entend ma question.
- J’ai vu une corde fine. J’ai vu que cette corde reliait le loup à un énorme rocher plat sur une île abandonnée. J’ai vu les entrailles d’un monde enfoui et une forge de Nains. Je me souviens juste que quelque chose de funeste est lié à cette bête…. Snowpuff s’interrompt. Ses yeux se perdent au loin. Il cherche vraisemblablement un nouveau point d’ancrage dans sa mémoire défaillante. Je me force à ne plus intervenir. Je sens intuitivement que je dois respecter son silence.
Quand son regard s’accroche à nouveau au mien, j’entends une voix de femme parler dans mon subconscient :

A l’Austri est assise la vieille femme, dans la Forêt de Fer,
Ici est élevé le tourbillon des mauvais vents fécondants les monstres ;
Un jour, la progéniture de l’un d’entre-eux, le pire de tous,
Dévorera le Soleil, et il aura l’apparence d’un Loup.

Il se nourrira de la chair des Hommes tombés
Dont le sang souillera les sièges des Ases ;
La lumière du Soleil froncera dans les étés prochains.
Les orages apporteront le malheur.


- La prophétie du Dit de la Voyante ? demandé-je à Snowpuff. Je viens de la lire dans les bouquins que j'ai trouvé à la bibliothèque.
Il a juste le temps d’approuver de la tête, je suis happée dans le souvenir qui se cache loin derrière les comètes de ses yeux ambrés.
Maintenant que je connais mieux ce mystérieux félin, je décide de ne plus être seulement témoin de ses souvenirs.
J’aiguise mon sens critique pour mieux cueillir des détails que mon ami a enregistrés sans pour autant y prendre garde.
J’ai décidé d’aider le fléreur à retrouver le pourquoi de sa venue dans le monde de la Magie terrestre et tous mes sens entrent en action.

Je tombe dans le vide pour, finalement, me retrouver doublement emprisonnée.
J’étais dans le corps de ce pauvre fléreur, immobilisé dans sa cage de fer minuscule. A peine suis-je arrivée que déjà je souffrais de l’inconfort de cette situation.
Je ne peux que bouger la tête et j’en profite pour faire l’état des lieux. Cela correspondait exactement à l’image que je m’en étais faite à la lecture du second tome. Je me retrouve à la droite de cette Main de Gloire qui avait joué son rôle dans la mort de mon personnage préféré: le Professeur Dumbledore.
Un globe oculaire s’approche de la cage. Il arrête de pivoter sur lui-même pour me fixer avec intérêt.
Sur ma droite, la seconde vitrine de coin de la boutique donne sur une rue perpendiculaire à l’Allée des Embrumes.
En face de moi, se dresse la fameuse garde-robe magique autour de laquelle s’entasse un bric-à-brac d’épouvante.
Cette main squelettique est terrible.
Déjà, en tant qu’humaine, j’en ressentais toute l’horreur au travers des mots du livre, mais là, dans la peau de Snowpuff, mon instinct en devine toute la monstruosité.
Cette main est vivante. Je vois ses veines palpiter, j’aperçois les légers tressautements de ses tendons.

- Elle dort pour le moment ! dit une voix que je ne parviens pas à localiser.
Je sursaute.
Dans cet antre épouvantable, tout était de l’ordre du possible, même la présence de Vous-Savez-Qui.
Cette intervention me fait tant horreur que je me confonds entièrement dans la peau du félin.

Je tourne donc la tête dans tous les sens et j’allume mes pupilles pour y voir plus clair.
Une autre voix se fait entendre.
- Ahahaha ! Pauvre fléreur ! On aurait mieux fait de te conduire à la « Ménagerie Magique » plutôt que dans ce trou du Diable !
Mes oreilles de chat localisent l’endroit d’où viennent ces voix d’outre tombe. Je distingue un mur recouvert d’une tapisserie rongée aux mites.
Avec un peu plus de concentration, ma vision féline appréhende deux formes accrochées au mur. Une petite et une autre aux proportions bien plus grandes.

Ces êtres mystérieux m’ont repéré et s’avancent vers moi.
La lune se lève au-dessus des toits des maisons voisines éclairant brusquement la pièce, posant sa traîne de lumière sur le sol poussiéreux.
Le premier personnage apparaît progressivement dans le rayon de lune.
Un museau arrondi, deux narines bien rondes et des mâchoires entrouvertes. La tête a une forme oblongue. C’est un animal qui approche, un animal sans corps. La tête flotte seule dans les airs.
Un masque de félin s’arrête à un mètre environ de ma cage.

La lune éclaire progressivement le second personnage qui a parlé dans cette obscurité oppressante.
Une bouche s'ouvre comme pour mordre le faisceau de lumière. Quatre dents mal implantées brillent dans la clarté pâle.
Les orbites vides ont une expression féroce sous les sourcils froncés. Une mèche blonde flotte sur un front bas.
Le masque de bois d’un homme en colère s’arrête à côté de celui du chat. Le visage était grand et impressionnant à côté de celui du félin qui semblait plutôt sourire de manière ironique.
Le silence persiste pendant que les masques m’observent. Ils fouillent les tréfonds de mon être.

Soudain, le masque humain se met à parler d’une voix forte.
- Ton pelage blanc me fait penser à un animal que je connais ! Comment te nommes-tu ?
- Attends avant de répondre ! interrompt le masque de chat. Laisse-moi deviner ! Ne serais-tu pas le célèbre fléreur qui a aidé les Nains à créer la corde sacrée qui maintient toujours Fenrir prisonnier ?
Je n’ose ronronner la moindre parole mais mon silence est plus éloquent que la plus longue des tirades.
La peur mouille les coussinets de mes pattes et mon poil commence à se dresser sur mon échine.
- Que fais-tu ici au lieu de remplir la tâche que Freyia t’avait confiée ?
Je ronronne timidement :
- Je ne m’en souviens pas, hélas. J’ai beau chercher au plus profond de ma mémoire, aucune clé ne vient ouvrir la porte de ce mystère ! dis-je après avoir répété la question, maintes fois dans ma cervelle de félin.
Je reprends la parole avec un peu plus d’aplomb:
- Mais je me nomme Snowpuff et si je suis ici, c’est certainement pour une bonne raison car je suis un fléreur, fidèle à Freiya ! Je suis capable de tout pour garder son affection et rester digne de la confiance qu’elle m’a accordée.
- Il est sincère. Ce fléreur dit vrai ! N’abattez pas votre courroux sur ce valeureux compère.
Il a dû perdre la mémoire en arrivant dans ce Monde des Hommes où même nous, masques antiques, avons été oubliés.

La main solitaire s’éveille au moment même où le masque du félin a cessé de parler.
Pour une raison que j’ignore, le masque humain recule le premier et se retranche dans l’ombre de la pièce.
En parfaite synergie, l’œil roule sur lui-même pour reprendre sa place initiale près de sa compagne aux cinq doigts.
Le masque se cache juste avant que la main ne se redresse.
Par contre, celui du chat roublard reste un peu plus longuement. Il prend le temps d’observer les mouvements de cette main qui vivait indépendamment de son propriétaire avant de se reprendre sa place contre le mur du fond.
Tout comme les chats, la Main de Gloire semble avoir une vie nocturne. Elle se redresse droite et fière sur son coussin de velours rouge. Elle dégourdit ses phalanges squelettiques comme l’aurait fait un violoniste avant d’entamer un air de Paganini puis se tient dressée, attentive.
Attendait-elle quelqu’un aujourd’hui ou suivait-elle ce rituel tous les soirs ?

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Message par Suzywa Mer 23 Mai - 13:41

La Main de Gloire
(second volet)

Minuit tapant, la réponse à ma question arrive au dernier coup exactement.
J’entends des pas traînants dans cette caverne aux mille horreurs.
Une silhouette aux épaules voûtées se déplace dans ce labyrinthe avec une aisance déconcertante.
L’individu entre dans le rayon de lune. C’est un vieillard aux longs cheveux gras.
Mr Barjow, sans aucun doute.
Il s’arrête devant ma cage. Dans son regard torve, je peux déjà lire la petite fortune qu’il pense tirer de ma pauvre carcasse.
- Alors, fléreur ! dit le marchand de sa voix ironique. J’espère que tu apprécies ton voisinage direct. Une pièce de collection, un objet rarissime, une merveille de magie noire, héhéhé.
Pour toute réponse, je souffle ma colère d’être ainsi enfermé.
Je secoue la cage tout en sachant que je risque de la faire tomber sur le sol.
- Oh là ! Je te conseille d’arrêter ça tout de suite ! dit le vilain bonhomme en maintenant la cage bien fermement sur la table de bois. Tu n’y gagnerais rien si ce n’est quelques fractures et tu peux être sûr que je ne te soignerai pas… dit-il d’une voix mielleuse et sadique. Je ne voudrais pas que mes clients entendent tes râlements de douleur. Cela ferait mauvais genre. Barjow a la réputation de chouchouter sa marchandise. Mais je confirme, plus vite tu passeras, mieux ce sera. Quelqu’un attend ton squelette avec impatience ! ajoute-t-il dans un rire sardonique.
Je me calme donc et fais mine de me soumettre.

Le sorcier se tourne alors vers mon voisin et lui parle comme à un ami de longue date. Je devine une pointe d’affection dans le ton de sa voix.
- Cher objet, tu vas offrir tes services, ce soir ! Un des serviteurs de Tu-Sais-Qui va arriver pour t’emporter.
Je t’ai loué pour une petite fortune… dit-il en se frottant les mains de satisfaction.Tu vas obéir à ce nouveau maître qui viendra te chercher. Il faudra que tu lui donnes entière satisfaction.

Comme si elle avait compris le message, la main se dégourdit à nouveau les doigts puis s’immobilise comme un soldat de bois. Le vieux marchand sort une bougie toute neuve de la poche droite de sa robe. Il la présente à la Main de Gloire, les doigts squelettiques s’emparent du bâton de cire pour le maintenir bien fermement.

Soudain, un homme, enroulé dans une cape noire, longe furtivement la vitrine. Il s’arrête, une fraction de seconde, pour jeter un coup d’œil à l’intérieur du magasin. Il repère la présence du marchand et rejoint l’ombre qui régne dans l’Allée des Embrumes.
Mr Barjow s’empare de la Main de Gloire et la porte dans la pièce voisine. Son pas est rapide. J’entends la porte s’ouvrir. Des chuchotements, de petits ricanements arrivent jusqu’à mes oreilles.
J’ignore qui peut être ce mangemort mais la colère me monte aux narines.
Je sais à quoi cette Main de Gloire va servir. Je l’ai déjà vue à l’œuvre des années auparavant ! Alors je me mets à bousculer ma cage de fer en espérant empêcher une parole, un conseil. En me démenant ainsi, je veux que Mr Barjow ait un moment de distraction et oublie de transmettre ce détail qui va faire gâcher le plan de Voldemort !
J’espère de tout mon cœur que quelque chose empêchera l’enlèvement de Mr Ollivander.

- Arrête cela ! dit la voix du masque de chat. Tu as entendu ce marchand. Si tu te blesses, tu ne recevras aucun soin. Tu ne feras qu’ajouter des souffrances bien inutiles. Arrête ! Tu ne pourras pas changer le cours du Destin.
- Qu’en sais-tu ? Toi que je ne connais pas ! lançé-je dans un feulement de rage. Je suis un fléreur et ma tâche est de protéger ceux que j’affectionne. Moi, je sais ce qui va se passer. J’ai cet avantage sur toi.
Cette Main de Gloire est invention de sorcier voleur et je l’ai déjà vue agir entre les doigts du plus terrible des sorciers de ces temps. Il a assassiné ma maîtresse et est capable de vaincre la Mort elle-même. Je sais tout mais je ne peux rien faire…
Je continue à me démener dans ma minuscule prison, sourd à tout renoncement, et à tout conseil. Je dois bouger ! Sans cela, je risque de devenir fou et je le fais jusqu’à l’épuisement le plus complet.

Enfin, je me laisse aller tant bien que mal dans cet espace réduit qui m’est dévolu. J’appuie ma tête contre les barreaux de la cage. Mes secousses brutales ont dangereusement fait avancer ma petite prison vers le bord de la table. Je vais m’endormir quand mon regard se pose sur un petit trousseau de clés.
Mr Barjow a dû les poser sur la surface de la table pour maintenir ma cage immobile. Il a sans doute oublié de les reprendre. Je jubile intérieurement.
Mon excitation m’a fait un bien énorme et a modifié quelque peu le cours des événements.

Je sors les griffes de ma patte avant droite et m’attèle à accrocher l’anneau central du trousseau à l’une d’elle.
Je réussis après quelques tentatives et cache les clés sous moi.
Epuisé mais heureux, je m’endors enfin.

Je me réveille en sursaut sans pouvoir estimer la durée de mon temps de sommeil. Les deux masques sont revenus près de moi et semblent m’avoir observé bien attentivement pendant mon assoupissement.
L’œil unique roule sur la table pour s’approcher de ma cage. Il frôle la base de ma prison et son iris bleu acier est dirigé vers moi.
Immédiatement, je suis sur mes gardes. Une désagréable impression d’être jugé me met mal à l’aise.
La Main de Gloire n’est toujours pas revenue à sa place initiale.
La nuit règne encore en maîtresse mais la lumière lunaire n’éclaire plus le magasin. L’astre a poursuivi sa course céleste.
- Qui êtes-vous et que me voulez-vous ? soufflé-je entre les barreaux de la cage. Pourquoi m’épiez-vous ainsi ?
- Ta présence m’interpelle ! dit la figure humaine. Je suis un masque divin et ceux que je représente vivent dans un des neuf Mondes que porte l’Yggdrasil, notre Arbre-Monde. Je ne suis pas de ce monde humain.
La face féline répond également.
- Moi, je suis le masque du Matagot, ce chat d’argent qui croise parfois les hommes en recherche de fortune. Je suis un roublard qui vient de l’enfer et je prends l’âme de ceux qui acceptent l’argent que le Diable leur donne. Si on me fournit quotidiennement de quoi manger, j’assure la vie terrestre la plus fantastique. Il n’en est pas de même après la mort puisque j’emmène mon maître en Enfer ! conclut-il en ricanant.
- Alors, je n’ai rien de commun avec toi !
- Oh que si ! reprend le masque de félin. As-tu oublié que je t’ai défendu, il y a quelques heures ? Je lis en toi comme à un livre ouvert ! Je lis la vérité et le mensonge et je serai encore plus précieux pour toi dans quelque temps.

L’œil, lui, n’exprime rien d’autre qu’une fixité bien étrange. Il continue de me détailler tout comme le masque divin qui flotte dans la pièce encombrée.
Sa voix retentit une nouvelle fois et pose une question.
- Comment te nommes-tu, fléreur ?
- Mon nom est Snowpuff et je vis à Londres.
- Mmmmh ! Tu m’as parlé de Freyia, tout à l’heure, comment la connais-tu puisque tu prétends vivre dans cette ville ?
Cette question me trouble et je réponds :
- Un ami m’a raconté l’histoire du Gleipnir. Il trouve que je ressemble fort au compagnon de Freyia. Les faits de ce récit ont éveillé quelques vagues souvenirs d’un passé très lointain qui m’échappe totalement.
Le masque à la mèche blonde se tait quelques instants puis reprend la parole.
- En effet, ton apparence ressemble fort à celle de Wingith, le Brave que Freyia a récompensé en le transformant en fléreur. Wingith signifie « Ecume de Neige » dans notre langue elfique car ce fléreur a reçu, comme toi, un pelage aussi étincelant que la poudreuse au soleil.
- Snowpuff veut dire « Souffle de Neige » dans la langue humaine… Etrange rapprochement ! reprend le masque de félin. Ainsi donc, tu ne te souviens de rien ?
- Je vois certaines images très précises. Je vois le chariot de Freyia que je tirais avec mes compagnons de voyage. Je vois le Gleipnir, cette corde de soie longue de cent pieds sortir de l’antre des Nains. J’entends la prophétie de la Völuspa et quand elle résonne dans mes oreilles, je me vois sur une île perdue au milieu d’un grand lac. Mais comment se fait-il que vous me connaissiez, grand masque divin ? demandé-je en inclinant humblement la tête.
- Je te connais car tu es brave. Tu es parti seul au Pays des Nains alors que cela représentait un grand risque. Tu aurais pu ne jamais revenir de cette épreuve. Je sais aussi que tu as une tâche primordiale à remplir avec ceux qui ont participé à la réalisation de cette corde qui maintient Fenrir prisonnier. Il vit sur l’ Ile qui parfois hante ton esprit. Cet endroit s’appelle l’Ile de Lyngvi. Un lac immense l’isole de Asgard, le Monde des Dieux. C’est à cet endroit que tu devrais être et non ici dans le Mannaheim, dans le Monde des Hommes.
Ces paroles suscitent en moi un profond malaise dont j’ignore la raison mais je n’en tiens pas compte, une question s’envole avec mes ronronnements.
- Masque divin, que faites-vous ici dans le Mannaheim, perdu dans cette réserve de magie noire ?
- Je surveille ce monde, Wingith ! Les Dieux surveillent tous ces mondes qui les entourent. Ils craignent le Crépuscule des Dieux. Vigilance ! Vigilance constante !
Un Dieu ne pourrait venir en personne sur ces terres secondaires, aucun humain ne survivrait après avoir croisé les yeux des Maîtres d’Asgard. Quatre de ceux qui vivent là-bas m’ont créé avec leurs armes dans une branche de l’if sacré, axe de l’univers. Chacun m’a donné une mèche de cheveux ainsi qu’une de leurs dents.
Leur pouvoir ainsi ancré dans le bois de L’Yggdrasil me donne vie. J’avais deux yeux, initialement. Deux yeux d’un bleu acier. L’un fut vendu par l’ignoble propriétaire de cette boutique. Je fus un temps borgne, comme Odin, mais le temps a fait son œuvre. Mon second oeil s’est détaché de ma face divine. Ce maudit marchand a posé ta cage dans son proche environnement. C’est mon second oeil qui t’a vu et qui a attiré mon attention sur toi. Je suis ici car cette boutique sert de passage entre nos neuf Mondes. Je surveille aussi un objet qui appartient aux Dieux et qu’on utilise ici à mauvais escient ! dit le masque avec mauvaise humeur. Et ce que j’ai appris a éveillé ma colère.

Le masque de chat se met à rire ironiquement.
Je prends le risque de poser une dernière question.
- Masque divin, avec tout le respect que je vous dois, qu’y a-t–il ici qui vous appartienne ?
Le masque répond simplement.
- La Main de Gloire, Wingith. La Main de Gloire que tu as vue tout à l’heure.

Ces paroles restent accrochées aux portes de ma compréhension.
Je rétorque, abasourdi.
- Comment est-ce possible ? Les Mains de Gloire sont récoltées sous les gibets. Ce sont des mains de voleurs condamnés à la pendaison ! Elles ont dû subir une série de manipulations et de sortilèges avant de pouvoir être utilisées par d’autres voleurs sans scrupules !
- C’est vrai ! répond le masque du Matagot. Les adeptes de magie noire font ainsi que tu le dis mais cette Main-ci est particulière. Son histoire remonterait à celle des Dieux de Asgard…

Des pas de course interrompent notre échange.
Les masques reprennent silencieusement leur place sur le mur.
Je m’installe dans la position du chat qui dort en prenant bien soin de cacher le trousseau de clés dans l’épaisseur de mon pelage blanc.
Je ferme les yeux mais les garde entrouverts pour ne rien perdre du remue-ménage qui se fait entendre dans la boutique.
Je vois Mr Barjow revenir avec le coussin de velours rouge entre les mains. La Main est toujours dressée maintenant la bougie, éteinte à présent.
Une grande tristesse m’envahit.
Le vendeur flatte cet objet dont je connais maintenant l’origine.
Ma première nuit de détention s’achève sur ma peine, sur une révélation et sur un nouveau mystère à découvrir.

Snowpuff et moi-même remontons à la réalité avec un certain soulagement.
Ma petite maison de banlieue me paraît si vaste et confortable après cette sensation d’emprisonnement.
Je me rends compte que je souffre de claustrophobie.
Sortie de ce souvenir, je ne peux m’empêcher de me dégourdir les jambes et je suis heureuse de pouvoir sortir au jardin pour respirer de grandes bouffées d’air pur.
Snowpuff me suit et je le vois profiter de la chaleur du soleil.
Il s’est couché sur le petit banc de bois devant les cyprès qui répandent un délicieux parfum de résine.
C’est là que je le rejoins, suivie de Leïko, après avoir emporté mon livre sur la mythologie nordique, celui de Jean Mabire.
J’ouvre le livre tout en caressant mes amis qui sont couchés contre moi. Plusieurs détails de ce souvenir m’ont interpellée. Mannaheim, Asgard… Tous ces noms n’évoquent rien en moi.
Je cherche, dans la table des matières, l’itinéraire qui me mènerait à leur découverte.
Je m’arrêtai page 44 et je lis le passage à voix haute pour que mon ami félin entende le récit.
- « Il n’existe pas moins de neuf mondes. Neuf est d’ailleurs un nombre sacré. Ne compte-t-on pas neuf mois de gestation pour donner le jour à un homme ?
Ce sont des êtres très différents qui habitent ces domaines, mais il arrive qu’ils se rencontrent, s’entraident ou se combattent. Tous voyagent d’un monde à l’autre car l’Univers n’est pas figé. Un grand mouvement ne cesse d’animer la création. Elle n’est pas un point immobile dans l’espace ni dans l’histoire. La terre et les cieux connaissent la distance comme les êtres la durée. Il n’est pas d’infinité ni d’éternité mais un perpétuel devenir.
L’aventure des dieux du Nord, c’est une chevauchée.
De la connaissance des neuf mondes, découle la conception nordique de l’univers.
A Muspelheim, dans l’absolu de la lumière et de la chaleur, règne le géant Surt, comme un volcan crachant le feu.
A Niflheim, où tout se dissimule derrière des écharpes de brume, se terre le dragon Nidhug, l’Amer-Rongeur.
A Helheim, dans les ténèbres hostiles, se rassemblent les morts qui n’ont pas eu le privilège de tomber au combat.
A Jotunheim, vivent les géants, que ce soit les colosses de la montagne ou les Thurses du givre.
A Asaheim, se réunissent les Ases, dieux de la souveraineté et de la force.
A Vanaheim, se retrouvent les Vanes, dieux de la fertilité et de la richesse.
A Alfaheim, volent les Alfes, génies aériens et lumineux que la tradition française nomme les elfes.
A Svartalaheim, vivent les Alfes noirs, que l’on nomme aussi nains ou trolls, industrieux et malins.
A Mannaheim, enfin, règnent, bataillent et peinent les hommes qui descendent tous d’Ask et d’Embla. »


Je me mets à rêver de ces mondes et je repense aux paroles du masque divin.
Ce masque était dans la boutique de Barjow et Beurk.
Cet endroit servait de passage entre les différents mondes. Mais une autre question effleure mon esprit : Comment ces mondes sont-ils agencés entre eux ? Je me souviens aussi de l’Arbre-Monde, l’Yggdrasil et je cherche plus d’informations à son propos.
Je découvre qu’il s’agit d’un if et cette découverte me frappe. Je repense à la baguette de Voldemort et de Orry Ollivander.
Ses énormes branches soutiennent les Neuf Mondes Scandinaves avec sous son pont Bifrost, les trois royaumes des Dieux et des Elfes, les Mondes des Humains, des Nains et des Alfes Noirs surgissant de l'Océan le bordant, avec sur la rive, le monde des Géants.
Sous les eaux sombres s'étendent les royaumes de Hel, du Froid et du Feu où les plus basses racines d'Yggdrasil luttent contre le mal.
Les trois temps, le passé, le présent et l'avenir, les Nornes qui ressemblent étrangement aux trois Parques, sont à ses pieds.
Elles "tracent" les runes et arrosent l’if avec l'eau de "la fontaine sacrée", pour qu'il reste toujours vert.
Sur la plus haute branche d'Yggdrasil est perché un aigle qui surveille Nidhögg, le serpent, lové dans les racines de l'arbre et qui le ronge. Un écureuil agile monte et descend, excitant l'aigle et le serpent pour les dresser l'un contre l'autre.

Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 1792050-yggdrasilmapmarvel_icon


Snowpuff regarde la représentation de l’Yggdrasil avec beaucoup d’intérêt.
- Cette image te rappelle-t-elle des souvenirs, Snowpuff ? demandé-je doucement en continuant de prodiguer mes caresses.
- Non, malheureusement… ronronne le félin.

Je referme le livre d’un coup sec. Snowpuff sursaute.
Je repense au souvenir que je viens de revivre et m’attarde sur un instant qui avait été très pénible. Le vieux marchand avait raconté que quelqu’un était intéressé par les os de Snowpuff. Je me remets à caresser le fléreur avant de lui faire partager ce moment macabre.
- Te souviens-tu des paroles de Barjow ? dis-je d’une voix douce. Quand il a dit qu’il réservait ton squelette pour quelqu’un qui s’y intéressait ?
Le félin ronronna affirmativement.
- Cela voudrait-il dire que ton enlèvement était directement dirigé vers toi et non pas pour t’empêcher de rejoindre Mr Ollivander ?
Snowpuff me regarda sans rien dire et je lis dans ses yeux qu’il n’avait pas envisagé ce cas de figure.
- Penses-tu à quelqu’un en particulier ? me demande-t-il.
- C’est peut-être Draco ! On pourrait très bien imaginer qu’il avait en tête de préparer une potion mortelle destinée à tuer le professeur Dumbledore. Tes os lui auraient été bien utiles pour la réaliser. En tout cas, je ne vois que quelqu’un du clan de Voldemort qui te voudrait du mal ! Draco ou……

Une nouvelle vision m’apparaît, celle de Fenrir se frottant les mains derrière la vitrine après que Draco soit sorti de l’armoire magique.
- Et si c’était Fenrir Greyback, Snowpuff ! dis-je d’une voix animée.
Je prends le félin sous les pattes avant pour l’amener bien en face de mes yeux.
Revois-tu le loup-garou qui se frottait les mains ? Et si ce geste de satisfaction te concernait toi et non Draco ! Ce monstre savait que tu étais en mauvaise posture, il a pu très bien demander à Malefoy de lui réserver ta dépouille !
Je ne vois que lui, Draco et Barjow à connaître l’endroit de ta détention.
Si tu es bien Wingith le Brave, au Pays d’Asaheim ou d’Asgard, si Fenrir Greyback est bien le loup du monde des Dieux, alors, vous vous connaissez !
Fenrir n’a peut-être pas perdu la mémoire, lui, et il t’a reconnu.

Snowpuff écoute attentivement mon raisonnement et réagit instantanément.
Il regarde le ciel comme pour mieux découvrir les pensées qui semblent descendre de ce monde si différent du mien et se met à évoquer ce souvenir tout neuf.
- Oui ! Fenrir était emprisonné au rocher. Je revois l’île. Les dieux étaient là. Quatre dieux… Freyia était devant moi. Je n’étais pas seul dans cet endroit. J’étais à l’écart, bien sûr, mais Fenrir m’a regardé un instant quand j’ai passé la tête pour voir ce qui se passait. De peur, je me suis vite réfugié derrière ma maîtresse.Tous regardaient le loup se débattre pour rompre le Gleipnir. Tous sauf moi… Oui, je me souviens que Fenrir m’a regardé dans les yeux quand il a compris qu’il ne pourrait plus rien faire d’autre que de se soumettre.
Quand Freyia fut sûre que Fenrir était vaincu, elle rassembla, autour d’elle et moi, l’oiseau, l’ours, le poisson, la femme et ensemble, nous nous dirigeâmes vers le long rocher plat qui, comme nous, avait participé à la fabrication du Gleipnir. Elle nous ordonna de surveiller cet animal féroce. Il ne fallait surtout pas qu’il s’échappe.

Snowpuff s’arrête de parler.
Il me regarde au fond des yeux et, dans ma tête s’élève un cri insoutenable.
Le hurlement fait vibrer l’air d’une telle intensité que, dans un réflexe inutile, je pose le fléreur sur mes genoux pour me boucher les oreilles des deux mains. Je maintiens mon regard dans les pupilles de Snowpuff et je vois la scène qui se lève à l’horizon de sa mémoire en lambeaux.
Un être rayonnant de lumière s’écroule sur le sol.
Il est à genoux, replié sur lui-même. On ne voit qu’une toison blonde, une nuque pâle. Du sang apparaît, coulant sur les genoux, mouillant les cheveux d’or et abreuvant le sol assoiffé.

* Lien vers l'Yggdrasil pour agrandir la représentation : http://www.comicvine.com/yggdrasil-the-world-tree/34-55875/all-images/108-220777/yggdrasilmapmarvel/105-1792050/

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Message par Suzywa Mer 30 Mai - 22:16

La Main de Gloire
(troisième volet)

Ce souvenir de Snowpuff tout frais, tout neuf, me laisse sur ma faim. J’avais tant espéré qu’il m’en apprendrait plus.
Bien sûr, le fléreur m’avait révélé les termes exacts de la mission confiée par Freyia aux six compagnons de fortune ayant contribué à fabriquer ce lien indestructible. Tous les six devaient surveiller ce loup afin qu’il ne s’échappe pas de l’Ile de Lyngvi mais je ne sais toujours pas qui est ce personnage écroulé sur le sable ni ce qui s’était réellement passé.
Snowpuff a juste entendu ce cri abominable. Il n’a vu qu’un être aux prises avec sa douleur insoutenable.

De plus, les jours passent et Snowpuff reste emprisonné dans un mutisme que je ne lui ai jamais connu.
Je pense qu’une sorte de peur s’est éveillée. Le regard furtif que Fenrir avait posé sur lui à Lyngvi a dû être terrible.
Je ne harcèle plus mon ami de questions car je ne souhaite pas le torturer davantage. Je choisis plutôt de me replonger dans le livre de Jean Mabire.
Ne connaissant rien de Fenrir, je trouve plus judicieux de combler mes lacunes en mythologie nordique pour découvrir la place réelle de cette bête dans le monde de Asgard.

Il s’avère que Fenrir est de descendance divine. C’était le plus âgé des enfants du Dieu Loki et même si ce dernier était le frère de Odin, ils étaient malgré tout très différents l’un de l’autre. Autant Odin était sage, autant Loki était fourbe et sans parole. Aussi surprenant que ce soit, Fenrir est tout simplement le neveu d’Odin.
J’apprends aussi que les Dieux avaient pris le loup en charge dès sa naissance et l’avaient confié au Dieu Tyr pour qu'il l'élève.
Le jeune animal a grandi très vite et est devenu de plus en plus agressif tant et si bien que plus aucun Dieu, excepté Tyr, n'osait l'approcher.
Inquiet de cette évolution, Odin alla ensuite consulter les Nornes, ces femmes qui figurent le passé, le présent et le futur. Elles lui prédirent que ce loup le tuerait au Ragnarök, terme scandinave utilisé pour nommer la fin du monde.
La décision fut donc prise d’enchaîner Fenrir.

Forte de tous ces nouveaux renseignements, je rejoins Snowpuff dans le jardin pour m’asseoir à côté de lui sur le petit banc de bois de teck.
J’ouvre le livre sur la mythologie nordique et regarde dans la table des matières. Je feuillette l’ouvrage et m’arrête à la page 143.
Du doigt, je cherche le paragraphe qui allait servir à rafraîchir la mémoire de mon ami fléreur.
A cette fin, je me mets à lire à voix haute le passage expliquant comment Fenrir fut maintenu prisonnier.

« ….Mais le plus dur de la besogne reste à faire. Les Dieux doivent maintenant enchaîner Fenrir et le loup redoutable ne semble pas disposé cette fois à se laisser faire. Il montre les crocs et grogne quand on s’approche de lui… »
Snowpuff intervient sans attendre.
- Oui, je me souviens, maintenant. Freyia m’avait raconté que Fenrir était le fils du Dieu Loki. Ce Dieu était intrigant. Il avait la capacité de changer d’aspect comme les animagus très doués et s’arrangeait toujours pour mettre les autres divinités dans l’embarras. Toutes les disputes avaient pour initiateur, Loki.
Ce Dieu eut plusieurs enfants dont Hel, gardienne des Ténèbres du Helheim. Son sang coule également dans les veines de Jörmungand, le Serpent des mers et bat dans le cœur de Fenrir.
Tous les trois auront un rôle à jouer dans la Fin du Monde qu’on appelle aussi le Ragnarök…
Snowpuff interrompt son récit puis reprend le fil de ses souvenirs.
- Les Dieux avaient déjà tenté d’emprisonner Fenrir à deux reprises. Malheureusement, les liens précédents n’étaient pas assez solides, c’est pour cela que les Dieux ont demandé aux Nains de Svartalaheim de fabriquer le Gleipnir, cette corde magique.
Les différents ingrédients utiles à sa réalisation étaient vraiment étranges. Cette bizarrerie en fit, sans doute, son indestructibilité…
Snowpuff se tait et des frissons glissent sur mon dos en réalisant que mon ami fléreur a participé à l’histoire que je lis à voix haute..

« …Les Dieux se rendent alors sur le Lac Amsvartnir et gagnent l’Ilot Lyngvi. Aucun lieu ne leur semble plus propice pour devenir la prison du sauvage Fenrir. Ils appellent alors le loup mais l’animal sent qu’il va encore être ligoté et il grogne de plus en plus férocement.
Malgré ces menaces, les Dieux lui montrent la chaîne Gleipnir et lui disent :
- Ce lien est en soie ! Tu parviendras sans nul doute à le briser facilement ! Laisse-toi attacher…
Tout en attirant le loup, les Dieux s’amusent à tirer les uns les autres sur le lien et constatent qu’ils n’en ont jamais vu de si fort.
- Impossible de le rompre, se réjouit Odin. Mais, méfions-nous car Fenrir est beaucoup plus fort que nous !
Le monstrueux fils de Loki les regarde tirer sur la chaîne Gleipnir et leur dit :
- Avec une si mince cordelette, je n’aurai aucun mérite à me délivrer !
Mais justement, la faible apparence de Gleipnir l’intrigue et inquiète Fenrir. Il craint là qu’il n’y ait quelque ruse. Il pense que les nains de Svartalaheim sont capables d’avoir réalisé avec cette chaîne en soie l’un de leurs habituels artifices. Le loup est bien décidé à ne pas se laisser prendre au piège et craint, plus que tout, le nouveau lien que lui tendent les Ases avec des sourires engageants.
- Tu as brisé des chaînes de fer et tu aurais peur d’un ruban de soie ? lui lancent les Dieux d’une seule voix.
Fenrir grogne et les regarde tour à tour avec un air incrédule. Les Dieux en profitent pour argumenter davantage.
- Si tu ne peux pas mettre en pièce ce lien, tu n’es vraiment pas dangereux. Alors, nous n’aurons aucune raison d’avoir peur de toi et nous te rendrons ta liberté.
- Si vous m’attachez et que je ne puisse me libérer moi-même, alors qui me délivrera ? interroge alors Fenrir. Je sais bien que vous me laisserez prisonnier sur l’Ilôt de Lyngvi au milieu du Lac Amsvartnir.
En entendant ces mots, les Dieux sentent que leur piège est éventé et désespèrent de pouvoir entraver Fenrir qui leur lance :
- Je ne suis pas disposé, même par jeu, à me laisser attacher. Mais je crains que vous m’accusiez de manquer de courage. Alors, voici ce que je vous propose.
Le loup leur offre un étrange marché qui va leur apparaître comme la seule chance de mettre le monstre hors d’état de nuire.
- Voici, dit Fenrir : que l’un de vous mette sa main dans ma gueule. Ce sera le gage que vous ne me prépariez aucune traîtrise et que vous détacherez ce soit disant ruban de soie à ma demande.
Les Ases se regardent les uns les autres. Aucun d’eux ne semble assez téméraire pour risquer une main dans cette aventure, d’autant qu’ils sont bien décidés à ne pas tenir parole et à laisser Fenrir attaché à la chaîne Gleipnir.
Alors Tyr intervint.
Le Dieu de la Guerre et de la Justice est prêt à se sacrifier pour la communauté des Dieux d’Asgard.
Tandis que ses frères entravent le monstre avec le ruban magique tissé par les Nains de Svartalaheim, il plonge sa main dans la gueule béante.

Dès qu’il sent qu’il ne pourra pas briser cette nouvelle entrave et qu’il devine que jamais les Dieux ne le détacheront, l’horrible fils de Loki referme brusquement ses énormes mâchoires.
On entend le craquement des os du poignet qui se brisent. La main de Tyr se trouve coupée net. Un flot de sang jaillit de son moignon. Les crocs du Loup ont tranché les chairs du poignet comme une épée passée et repassée sur la pierre à aiguiser… »


Je relève la tête en direction du fléreur.
- Te souviens-tu de cet épisode, Snowpuff ? demandé-je.
Snowpuff ne dit rien mais je comprends que c’est le cas quand je vois son regard perdu dans le vague.
Il accroche ses pupilles dorées dans les miennes et je suis aspirée par un nouveau souvenir.
Je pense rejoindre la lumière du Monde de Asgard mais, à ma grande déception, je plonge vers l’obscurité de la boutique de Barjow, vers l’exiguité de la minuscule prison de métal.
Je ne peux faire marche arrière et pour calmer mes angoisses, je prends une énorme bouffée d’air avant de me fondre dans la peau de mon ami félin.

La nuit règne encore dans cet endroit maudit.
Je viens à penser que, même en plein jour, l’obscurité devait régner en maîtresse dans cette pièce.
Ce devait être la seconde nuit que Snowpuff passait dans sa prison. Dès que je prends pied dans le corps de mon ami, je suis assaillie par des sensations désagréables de faim et de soif.
Je reconnais à ces signes que je ne fais plus qu’une avec le fléreur.
J’imite le félin qui dort mais j’ai gardé tous mes sens en éveil.
Un mouvement dans la pièce attire mon attention. Quand j’entrouvre les yeux, je vois la Main de Gloire effondrée sur son coussin de velours râpé.
Rien ne viendra interrompre son sommeil, cette nuit. Apparemment, aucune mission ne doit la maintenir en éveil.

Après un moment, j’entends un bruit de roulement sur la table en bois. Je devine que l’œil de verre change de place et s’approche de ma cage.
Au même instant, je sens qu’un des masques se déplace jusqu’à moi.
J’ouvre un de mes yeux et je souris quand je découvre lequel des deux objets s’est déplacé en premier.
Plus aucun doute à avoir, tout comme je ne fais plus qu’un seul individu avec Snowpuff, l’œil et le masque divin sont, quant à eux, liés à la vie, à l’éternité.
A mon grand étonnement, j’observe que l’œil bleu pivote sur lui-même pour observer la Main de Gloire assoupie. Je ne suis plus son point de mire.
Le second masque apparaît alors à côté de son compagnon de fond de boutique.
Le silence qui règne de manière si pesante me dit que les masques rassemblent leurs idées.
Le Matagot se met à parler à voix basse :
- Ils dorment tous les deux. Il faut profiter de ce moment pour nous mettre d’accord. Ce fléreur va nous départager, n’est-ce pas, cher compère ?
Dans quelques heures, nous saurons qui de nous deux a raison.
En bon Matagot, je reconnais en cette Main de Gloire, la main de mon premier maître humain qui a cédé au chantage du Diable.
Ce dernier m’a promis la liberté si j’en retrouvais la trace. C’était un voleur de grand chemin, le premier de la lignée des Gregorovitch qui a vécu bien avant la naissance du fils de Dieu. Cette Main de Gloire a servi à ses descendants pour voler les secrets de la fabrication des baguettes magiques.
Si cette Main de Gloire est une vulgaire main de voleur, ce fléreur ne sera qu’un simple félin magique et il prendra ma place comme serviteur de Satan.
Le masque divin interrompt son compagnon.
- C’est la Main de Tyr qui repose devant nous. J’en suis presque sûr ! Si le fléreur parvient à répondre aux questions qui lui seront posées, ce félin sera alors Wingith le Brave.Tu as raison, Matagot. Agissons tant que la Main de Gloire se repose. Il ne faut pas qu’elle connaisse le secret que nous venons d’échanger. Elle doit rester en dehors de tout cela. Le moment est venu de savoir !

Un hurlement de corne résonne dans mes oreilles et je fais semblant de m’éveiller.
J’avais entendu ce dialogue sans en comprendre la signification profonde mais je sens que le moment est crucial. Il faut absolument que je joue avec finesse. Je sens qu’un danger me menace. Je ne suis pas prêt à vivre dans l’antre du Diable.

La trompe s’arrête de sonner. De toute évidence, la Main de Gloire n’a pas la même sensibilité que moi. Elle se repose toujours sur son coussin de velours rouge.

Quand le grand masque se met à parler, j’ai le sentiment d’être une poussière dans l’univers. Je ne suis qu’une présence en face d’une force supérieure.
Je tremble comme une feuille.
Je ne sais plus qui je suis.
Suis-je un être qui peut traverser l’éternité ou un simple fléreur qui n’a devant lui que quelques longues vies ?
Ma grande faiblesse physique m’empêche de voir clair en moi-même et la fureur de la voix qui sort de cette bouche béante a le pouvoir de me détacher du grand arbre de la vie.
- Cette Main est sans doute propriété d’Asgard, Wingith le Brave, et je m’en vais te rafraîchir la mémoire puisque tu n’en es plus maître. Mais es-tu Wingith le Brave ? Il faudra d’abord nous le prouver en répondant à ces énigmes.

Le silence s’installe à nouveau.
Une des dents du masque se met à scintiller dans sa bouche.
Peu après, une mèche de cheveu étincelle comme un rayon de soleil dans l’obscurité profonde de la pièce.
Une voix de femme s’élève.
Mon poil se hérisse. Mon cœur se met à battre à tout rompre.
Le sortilège m’épouvante même si la voix cristalline est aussi douce que la soie. Ce timbre velouté, je le connais ! C’est celui de ma maîtresse Freyia !
- Voici ce qui s’est passé en ce jour heureux de la capture de notre ignoble ennemi, Fenrir.
Quand ce fils aîné de Loki fut maîtrisé, j’ai imposé une tâche de surveillance.
J’ai demandé à tous les compagnons qui avaient participé à la confection du Gleipnir d’être vigilants.
Fenrir ne pouvait pas s’en libérer. Il fallait que le Ragnarök n’arrive jamais. Vous deviez empêcher que le nœud du Destin enfermé dans le lien de soie ne se dénoue.
Si, malgré tous nos efforts, ce monstre parvenait à se défaire de sa corde de soie, j’avais demandé qu’on prévienne Heimdall, le Dieu de la lumière qui garde le Walhalla, le Royaume des Dieux Ases.
A cette fin, j’ai confié un objet à la femme barbue afin qu’elle apporte ce signal de danger jusqu’au Pont de Bifröst et le remette à notre frère divin comme preuve de la libération de Fenrir.
Qu’ai-je donc remis à cette femme ? Voilà ma question, fléreur.

Le silence revient et le masque reprend l’aspect le plus noir.
Soudain, une seconde dent émet une lumière pâle dans le noir et une autre mèche de cheveux brille intensément dans la nuit profonde.
Une voix grave résonne dans la pièce exiguë et s’exprime avec noblesse :
- Fléreur, c’est le Dieu Odin qui te parle !
Face à la colère de Fenrir, j’ai agi avec courage afin de neutraliser notre ennemi !
Au cas où Fenrir parviendrait à se libérer comme me l’avaient annoncé les Nornes, il fallait que tu apportes quelque chose au Dieu Heimdall pour nous avertir que le Ragnarök allait commencer.
Qu’ai-je fait de si particulier ? Que t’ai-je remis ?

Un lourd sentiment de culpabilité s’empare de mon cœur. Mais aucun répit ne m’est accordé. Le masque reprend vie après s’être éteint quelques instants.
Une dent éclaire la bouche ouverte sur la colère.
Une autre mèche de cheveu rayonne dans l’obscurité.
Une voix masculine crache sa désapprobation.
- C’est le Dieu Thor qui te parle et te rappelle ce que ta mémoire a oublié !
J’ai aidé mes frères à maîtriser Fenrir. Lorsque celui-ci fut prisonnier, lorsque celui-ci fut totalement immobilisé, j’ai vu couler la bave immonde de sa gueule. Elle formait une rivière qui s’écoula dans le lac de Amsvartnir qui entoure l’Ile de Lyngvi ! J’ai nommé ce cours d’eau « Wan » qui signifie « Volonté » J’ai pris ce que les Nains avaient façonné à mon intention. Je l’ouvris et recueillis un peu de ce liquide abject. Je confiai ce trésor à l’ours afin de l’apporter à Heimdall au cas où Fenrir se retrouverait libre de toute entrave !
Qu’ai-je donc confié à l’ours ? tonne la voix divine. Si tu es vraiment celui que tu prétends, tu dois pouvoir me le dire.

Je ne réponds rien et baisse la tête en signe de soumission.
J’attends l’intervention du dernier dieu. Elle ne se fait pas attendre.
Le masque s’illumine une nouvelle fois.
La voix qui sort de la bouche n’exprime pas la colère mais une profonde tristesse.
- Je suis le Dieu Tyr et j’ai sacrifié ma main droite afin de déjouer la ruse de Fenrir. Quand elle est tombée sur le sol et quand je l’ai vue plonger dans la seconde coulée faite de bave et de sang qui jaillissait de la gueule de Fenrir, le flot était si violent qu’il avait la force d’une rivière. Je n’ai aucune certitude mais je suis persuadé que ma main fut emportée sans que je ne pusse faire quoi que ce soit. Dans ma douleur, je nommai ce cours d’eau « Wil » qui veut dire « Espoir ». Afin de lui donner cette vertu, je me levai malgré la douleur cuisante, j’ai pris un objet que j’ai toujours utilisé pour nourrir Fenrir depuis sa naissance, je l’ai plongé dans le liquide immonde qui sortait de sa gueule, puis j’en bus une gorgée. Je confiai enfin cet objet divin à l’oiseau afin qu’il l’amenât à Heimdall, comme preuve de la libération de notre ennemi mortel !
Réponds à ma question. Qu’ai-je donné à l’oiseau ?

Enfin, après quelques instants de silence, le masque s’éclaire dans sa totalité. Quatre dents éclairent une bouche béante, les quatre mèches brillent comme un soleil, quatre voix n’en font plus qu’une pour me faire part de leur volonté divine :
- Fléreur, si tu es bien Wingith le Brave, tu dois pouvoir répondre à nos questions.
Qu’avons-nous fait, chacun à notre tour après avoir maîtrisé Fenrir sur son rocher ?
Si tu réponds correctement, nous te libérerons de ta prison. Si tu es bien celui que tu prétends, nous en aurons le pouvoir.
Il faut que tu te souviennes ! Tu ne sortiras pas d’ici avant de nous avoir tout révélé !

Le masque s’éteint définitivement et l’œil de verre roule sur la table pour retrouver sa place initiale à la gauche de la Main de Gloire.
Avec l’aube naissante, les objets magiques ont retrouvé leur immobilité dans la boutique.
Avec le matin, le compte à rebours commence. J’ai peu de temps pour me souvenir de ce qui s’est passé sur l’Ile de Lyngvi.

Un nouveau jour naît et je découvre que Mr Barjow est un lève tôt !
Il rôde dans cette partie du magasin. Il tourne plusieurs fois autour de ma cage.
Son regard traîne sur la table, l’homme s’accroupit plusieurs fois.
Moi, je sais ce qu’il cherche et pour éviter de croiser son regard, je fais semblant de dormir. Je ne veux pas qu’il voie la cachette du petit trousseau de clés dans le mordoré de mes iris.
L’homme voûté se met à parler.
- Où diable ont disparu mes clés ? Je suis presque sûr de les avoir posées ici ! bougonne le commerçant en me regardant de manière suspecte.
Il tente de passer ses longs doigts dans ma cage. Ce geste me révèle qu’il envisage que son trousseau peut se trouver dans ma cage. Il touche mes pattes avant et je fais mine de sursauter.
Pour qu’il me laisse tranquille, je mords ses longs doigts et le dos de sa main ridée.
J’y prends un malin plaisir. Aucune honte ne m’étreint le cœur.
Des hommes comme ça, il faut vraiment les faire souffrir pour venger tous les innocents qui ont dû perdre la vie dans cette boutique des horreurs !
Le marchand retire sa main en vitesse et me parle avec méchanceté.
- Tu te défends, vilain bougre ! Le jeune Draco a fait appel à moi pour te garder ici mais mon flair me dit que tu es un genre de fléreur bien particulier. J’ai décelé dans tes yeux plus de pouvoirs que certains de mes bibelots.
Pour détourner les soupçons du marchand, je ne réagis pas à cette remarque et fais mine de me rendormir.
Les hommes solitaires ont cette fâcheuse manie de se parler tout haut. Mr Barjow s’éloigne un peu puis se retourne vers moi.
- Il faut absolument que je retrouve ce trousseau. Je ne peux le laisser où il est. Si ce chat trouve un moyen de s’échapper, je devrai supporter la colère du jeune Malefoy et je ne veux pas prendre le risque de voir disparaître le petit magot que me rapportera sa carcasse. Je dois trouver le moyen de le sortir de sa cage sans me faire charcuter. Oui, mais alors, il risque de me filer entre les pattes et j’en aurai du boulot pour le retrouver dans mon capharnaüm ! Je ne peux faire cela seul…. Oui ! Je vais demander de l’aide et, avec un peu de chance, demain matin, je pourrai fouiller cette cage.

La journée passe plus vite que je ne le pense. Ce que je viens d’entendre ne me paraît pas de bon augure. Mes réflexions sont interrompues par l’arrivée de plusieurs clients. Je vois passer une silhouette féminine.
La personne est plutôt trapue. La femme s’arrête à hauteur de ma cage et je vois sa grosse tête flasque se tourner vers la table. Ses gros yeux globuleux observent l’œil de verre qui reste toujours immobile en journée.
Elle s’empare de l’objet et demand à Mr Barjow. Une voix ridiculement enfantine sort de sa large bouche.
- Mr Barjow ! Qu’est-ce donc que cet objet ?
Le marchand répond de sa voix huileuse et lancinante :
- Cet œil provient de ce masque que vous voyez accroché au mur du fond. Je dois le replacer dans son orbite mais j’ai dû commander la glu nécessaire à ce travail. Plusieurs tentatives infructueuses…
La femme interrompt le discours du marchand.
- Cet œil me fait penser à quelqu’un ! N’auriez-vous pas un certain Alastor Maugrey parmi vos clients, Mr Barjow ? demande la femme en regardant froidement le commerçant.
- Voyons, Mrs Ombrage ! Vous voyez le mal partout. Ceci est un simple œil de verre ! Que voudriez-vous qu’il ait comme pouvoir ? dit le vieil homme en tentant de dévier la question embarrassante.
Mrs Ombrage poursuit son inspection et s’arrête devant ma cage. Je fais semblant de dormir. Je l’entends poser sa question :
- Tiens ! Un chat blanc dans votre boutique, Mr Barjow ! J’adore les chats. Je vous l’achète surtout que celui-ci me semble en bien piteux état. Votre réputation en prend un coup, Mr Barjow ! Comment pouvez-vous laisser cet animal dans de telles conditions d’hygiène.
Le marchand se courbe et penche la tête sur le côté.
- Malheureusement, ce chat est déjà réservé, Mrs Ombrage ! Je ne pourrai satisfaire votre amour immodéré pour les félins. Mon client a dit qu’il viendrait le chercher mais un contretemps est venu détourner ses projets. Il ne pourra l’emporter que ce soir ! mentit le vendeur.
- Vous n’avez donc rien de nouveau depuis mon dernier inventaire ? Vraiment rien de neuf ni d’intéressant, depuis la disparition de Mr Ollivander et de Fantarôme ?
La vieille femme aiguise son regard avant de scruter les réactions de Mr Barjow.
Déçue de ne rien voir de bien compromettant autour d’elle, Mrs Ombrage détourne brusquement son regard pour se pencher à nouveau sur ma cage.
- Vraiment dommage que je ne puisse emmener ce pauvre chat ! dit-elle sur un ton dépité qui sonnait faux.
D’un petit pas trottinant, la femme s’en va vers la sortie.
Mr Barjow revient en bougonnant.
- Quelle sale bonne femme, cette Dolores Ombrage ! Elle vise toujours juste quand elle raisonne, celle-là. « N’auriez-vous pas un certain Alastor Maugrey parmi vos clients ? » minaude le commerçant.
« Votre réputation en prend un coup, Mr Barjow ! »
Elle voit le mal partout mais elle a quand même l’œil ! insiste le vieil homme en s’arrêtant encore une fois près de ma cage.
Le marchand parle une nouvelle fois à haute voix.
- La patience a toujours récompensé les Barjow et Beurk ! dit-il en ricanant. Demain, je fouille ta cage et je te mets à l’abri des regards, sale fléreur ! Ta dernière heure va bientôt sonner.

Le vieil homme disparaît de la pièce et je ressors les clés de leur cachette. Elles semblent avoir une importance certaine aux yeux du négociant. Je détaille l’ensemble et je découvre que le petit anneau de métal représente un serpent mordant sa queue. Trois clés y sont accrochées : l’une de facture moderne doit sûrement ouvrir le cadenas qui scelle ma prison, la seconde est beaucoup plus ancienne, toute recouverte de rouille. Pas de fioriture pourtant. Une simple clé de porte.
Par contre, la dernière est extraordinaire.
Elle a la forme d’un arbre et les racines d’acier qui font saillies de part et d’autre de la tige doivent ouvrir une porte bien étrange.
Faute d’ouvrir la porte de ma liberté, elle ouvre pour moi la porte des songes.

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Message par Apsara Ven 1 Juin - 16:41

Ça y est, j'ai pu me remettre à te lire !
Pas le temps de reprendre " Le Sorcier aux 1001 baguettes" mais je relis avec plaisir et profit "La Main de Gloire" : j'ai grand besoin de raffraîchir ma mémoire en mythologie nordique !
C'est pourquoi ce conte m’intéresse particulièrement. Very Happy
Je suis contente de voir que Leiko s'entend bien avec Snowpuff Wink D'ailleurs "Léiko" doit-il quelque chose à "Loki" Question Aurais-tu eu inconsciemment le nom du dieu dans un petit coin de ta mémoire en choisissant son nom scratch

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Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 Empty Re: Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours)

Message par Suzywa Mer 6 Juin - 20:13

A Apsara Non pas d inconscient pour le choix de Leiko. Genial que tu reviennes lire Snowpuff Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 187879

La Main de Gloire
(quatrième volet)

Je me suis installée au jardin. La soirée offre enfin un peu de chaleur.
Le souvenir de Snowpuff m’a terrifiée. L’état d’urgence est à son comble et c’est bon que j’ai ce brave fléreur, là, à mes côtés dans ma petite maison de banlieue, sans quoi j’aurais parié gros sur sa disparition plus que probable.
J’ai emporté tous les livres de Harry Potter, toutes les notes que j’avais prises sur internet, tous les bouquins que j’avais rassemblés sur la mythologie. Tout est entassé sur la table ovale mais j’ai beau tourner les pages, plonger dans les illustrations, j’ai beau tordre les mots et les phrases pour en extraire toutes les significations possibles, jamais les textes ne me révèlent comment le fils terrible de Loki s’est libéré du Gleipnir.

Je cherche alors des renseignements sur le Dieu Heimdall que j’ai déjà croisé dans le récit des « Premiers actes des Dieux »
Ce Dieu possède cinq sens dont la finesse est exacerbée.
C’est lui qui a la garde du pont qui mène au domaine des Dieux d’Asgard.
Ce passage protégé se nomme le Bifröst, magnifique arc-en-ciel érigé dans ce monde lointain.
Heimdall y va et vient imperturbablement portant la lourde charge de souffler dans le Gjallarhorn le jour où Fenrir viendrait jusqu’à lui.
- Le Gjallarhorn… répété-je à mi-voix. Quel joli nom pour une corne destinée à mettre le feu aux poudres.
L’instrument doit encourager les Dieux à rassembler tous les élus, soldats valeureux morts au combat, pour lutter contre Loki et ses alliés.

Je reprends la magnifique représentation de l’Yggdrasil.
Cet if aux dimensions gigantesques me fait penser à la clé en forme d’arbre que Snowpuff avait réussi à dérober à Mr Barjow.
Qui a bien pu réaliser ce petit bijou ? Je regarde les Mondes possibles. Mes pensées se dirigent vers les Nains et je cherche leur domaine. Malheureusement, je n’en découvre aucune trace.
Je repère alors l’arc-en-ciel qui descend du monde d’Asgard vers notre Monde humain, le Mannaheim, mais en caressant le pont de lumière, les aurores boréales de « West of the Moon and East of the Sun » me reviennent, soudainement, en mémoire.
Le fameux conte qui avait ouvert de nouveaux horizons dans la vie de Mrs Figg acquiert soudain une nouvelle dimension au travers de cette illustration.
Je souris en réalisant que tout ce que Snowpuff m’avait raconté, il y a quelques mois, avait un lien manifeste avec son passé mystérieux.
Après quelques instants de réflexion, je me replonge dans les livres de Mrs Rowling.
Ne trouvant rien d’intéressant dans l’instant, je laisse tomber les ouvrages sur mes genoux en poussant un énorme soupir.
Je suis vraiment découragée. Je regarde autour de moi et cherche Snowpuff des yeux.
Il est couché sur le petit banc de bois du jardin. Les rayons du soleil couchant font étinceler son pelage.
Il m’observe, en fait, et, quand mes yeux croisent son regard, quand il y lit mon découragement, il descend du banc et se dirige vers moi.
Souplement, il saute sur la table de jardin et se couche sur mes feuilles de notes.

- Tous les efforts que tu fais pour m’aider me touchent beaucoup, tu sais ! me ronronne le fléreur avec tendresse.
- Cela m’amuse aussi ! Tu me donnes l’occasion de voyager dans l’espace et le temps. J’aime ça.
Le fléreur ronronne intensément.
- Pourquoi ronronnes-tu si fort, Snowpuff ? demandé-je doucement en le caressant.
Le félin se relève et s’installe sur mes genoux.
- Je voudrais te montrer la suite de mon souvenir. Les animaux de mon espèce ronronnent quand ils sont sereins mais ils le font aussi quand ils souffrent.
Mr Barjow m’a laissé sans soin.
Il ne m’a pas donné une seule goutte d’eau. Ronronner m’a fait du bien pour surmonter cette épreuve. Je sais aussi que tu souffres quand tu m’accompagnes dans ces souvenirs et je ronronne ainsi pour que tu acceptes de me suivre encore une fois.

Je hoche de la tête et je souris pour lui faire comprendre que j’apprécie sa délicatesse.
Je pose mon livre sur la table et j’accueille mon ami dans le creux douillet de mes bras.
Je me laisse emporter par ses ronronnements sonores.
Peu m’importe que le vent emporte mes notes, je sais que Snowpuff va me faire découvrir ce qu’elles ne recèlent pas.
Progressivement, les ronronnements de souffrance deviennent les miens, je me retrouve dans cette cage de torture.
Assoiffé, affamé, je somnole dans une position inconfortable.
L’inactivité physique me fait atrocement souffrir.
Une torpeur m’enveloppe. La boutique commence à s’obscurcir mais je ne peux plus me situer dans le temps.
Le sommeil m’emporte pour me donner un moment de répit et je fais un rêve étrange comme on peut en faire quand le malheur vous saute à la gorge tel un loup sanguinaire.

Je me retrouve suspendu dans le néant.
Cet espace vide et infini est pourtant plein d’une présence. Je me balance dans le temps.
Le passé, le présent et le futur réunis me bercent dans leurs bras vigoureux.
Le temps prend tout l’espace.
Une femme apparaît sur ma gauche. Elle est vieille et ridée mais elle me recueille. Elle caresse mon pelage et une portée de runes scintillantes s’élève au-dessus de nous. La femme traduit la phrase magique et me la souffle :
« Look at the lock, the old lock ! »
La mélodie de la phrase se déroule dans mes oreilles.
La consonance étrange des mots s’enchaîne plusieurs fois pour finalement ressembler au tic-tac de l’horloge.
Soudain, la vision disparaît sans que je ne me sente abandonné, pour autant.
Les bras du temps me consolent encore.
Une femme d’âge mûr me sourit alors et me confie ce qu’elle veut me dire.
Mes yeux éblouis contemplent avec émerveillement le message du Destin qui m’est destiné : « There’s another lock to find ! Look for it ! »
Je grave ce conseil dans ma mémoire et retombe dans l’obscurité.
Les bras d’une jeune femme au visage avenant m’emportèrent ensuite. Elle rit avant de me révéler son mystérieux message :
« And at the door, you’ll knock ! »
Les bercements se ralentissent.
La mécanique du temps s’arrête.
Doucement, les bras m’abandonnent et je me retrouve dans l’espace.
Un espace figé.
Je flotte dans une eau glacée et saumâtre.
Ma vision est trouble, mais je vois à côté de moi un objet qui miroite.
Il repose sur le fond sablonneux. L’éclat s’estompe pour disparaître complètement.
Je retrouve le manteau noir de l’oubli et je me réveille en sursaut.

J’ouvre péniblement les yeux et je ne suis pas surpris de me retrouver face aux deux masques de bois. Ils sont plongés dans l’obscurité de ce magasin. Combien de temps s’est-il écoulé depuis le dernier souvenir ?
Je l’ignore.
Je retrouve toujours cet éternel rituel, cette danse nocturne et macabre. Cette mascarade.
L’œil de verre épie encore et toujours la Main de Gloire endormie.

Seule chose dont je suis sûre, je sais que le temps de rendre des comptes est arrivé.
Je me dois de rassembler le peu de force qui me restait pour affronter cette cour implacable.
Le masque divin s’exprime sur un ton cérémonial :
- Fléreur, voici arrivée l’heure du crépuscule, l’heure où les grandes cérémonies se passent. Es-tu prêt à répondre aux questions qui t’ont été posées par les Dieux ? Es-tu prêt à nous prouver que tu es Wingith le Brave ?
- Je ferai de mon mieux, masque divin, mais avant de le faire, je désire déposer une requête.
- Parle, je t’écoute ! répond le masque à la bouche tordue.
- Je désire qu’on me délivre de cette cage.
- Je le ferais bien, sois en sûr ! Mais je n’en ai pas le pouvoir. Je peux entendre, voir mais non agir comme je l’entends. Il me faut une main qui m’obéisse !
J’insiste malgré l’objection :
- Ai-je vraiment votre parole que vous me délivrerez ? N’agirez-vous pas comme vous l’avez fait avec Fenrir si je ne vous suis d’aucune utilité ?
Le masque se tait un moment et le Matagot de bois se met à ricaner face au trouble manifeste de son compagnon de bois.
Je reprends la parole pour combler le silence persistant.
- Je ne répondrai aux questions que si je suis libre de mes mouvements !
- Tu as de l’audace, fléreur. Je ne puis prendre la responsabilité de te répondre seul. Il faut que les Dieux décident.

Le masque divin se tait.
Il s’allume et s’anime.
Quatre voix se concertent. Elles chuchotent puis la discussion devient plus vive.
Les timbres étouffés se transforment en éclats de voix tant et si bien que la Main de Gloire s’éveille, se redresse et offre sa paume ouverte.
L’œil de verre se fige, pivote en direction de ma cage, puis tourne comme une toupie en proie à une excitation que je ne lui connaissais pas.

La Main de Gloire se tourne vers les faisceaux de lumière qui émanent du masque divin. Je l’observe avec intérêt. Elle aussi se fige.
Puis le silence revient.
Les deux masques entrent dans le rayon lunaire qui éclaire la boutique et l’objet de bois représentant Asgard donne sa réponse.
- Les Dieux ont constaté que la Main de Gloire s’était éveillée. Leur courroux est grand car il eut mieux valu pour toi qu’elle restât endormie. Ils ont donc décidé de te libérer uniquement si tu réponds correctement à leurs questions.

La réponse me fait l’effet d’une douche glacée.
Je fais le seul mouvement qui m’est permis dans cet espace réduit. Je baisse la tête et tente le tout pour le tout.
Je prends le petit trousseau de clé dans ma gueule et accroche l’anneau à l’une de mes canines.
Intentionnellement, je mets en évidence la petite clé en forme d’arbre ainsi que la grosse clé rouillée.
Dès que ces dernières sont bien visibles, je tends ma gueule en avant afin que mes juges puissent les observer.

L’œil de verre tourne sa pupille vers le trousseau, les masques reculent brusquement et la Main de Gloire pivote vers moi.
Je reste dans la position pour que tous le voient bien puis je le dépose entre mes pattes et reprends la parole.
- Je redépose la même requête qu’il y a quelques minutes. Je demande qu’on me libère de cette cage. Je pense que ces clés vous intéressent. Elles seront vôtres si vous me rendez ma liberté.

Le silence remplit une nouvelle fois l’espace.
Le masque divin et celui du chat se rapprochent un peu plus du trousseau.
L’effet de surprise passé, ils semblent curieux d’observer les clés de plus près.
C’est alors qu’un fait incroyable se réalise devant nous.
La Main de Gloire quitte son coussin de velours rouge et se dirige vers moi.
Elle rampe sur la table dans le noir, ses doigts ressemblent aux pattes d’une araignée. Elle s’arrête et s’accroche aux barreaux de ma cage.
Avec avidité, elle faufile ses doigts pour rechercher frénétiquement les clés.
Dans un mouvement de défense, je serre mes pattes l’une contre l’autre pour faire obstacle mais les phalanges squelettiques ont une force incroyable.
La Main de Gloire pêche le trousseau.
L’anneau en forme de serpent lové glisse sur la dernière phalange du majeur.
Les clés se balancent dans le vide, éclairées par le rayon de lune.
Les masques ne bougent plus mais je les sens vibrer d’une tension paroxystique.
L’œil de verre qui contemple également les clés connaît la même excitation. L’iris bleu a l’éclat du métal.
Emerveillement ou convoitise ? Tout est de l’ordre du possible.
Les doigts agiles laissent tomber le trousseau sur la table. Le bruit qu’il fait en touchant le bois nous fait tous sursauter.
Avec dextérité, les doigts de la Main de Gloire s’emparent de la plus petite des trois clés et l’introduisent dans le cadenas de ma cage.
Le cliquetis du mécanisme résonne dans mes oreilles et la porte de la cage s’ouvre sur ma liberté.
Je suis stupéfait de constater que la Main de Gloire a agi à mon avantage.
Je reste malgré tout sur mes gardes, la ruse pouvant animer ces doigts magiques.

Je sors de la cage. Je ne dois pas traîner.
Le temps s’écoule.
Ma fatigue physique risque de me ralentir dangereusement.
Avec satisfaction, je constate que la résistance des chats n’est pas vaine légende.
Je m’étire de tout mon long et une décharge de plaisir court sur mon dos jusqu’à la pointe de ma queue en panache.
J’ai grand soif mais il n’y a pas d’eau à proximité. Je mets donc ce désir dans un recoin de ma conscience.
Le simple fait de ne plus sentir d’entrave m’a redonné courage et la première étape de mon plan a réussi. De plus, la Main de Gloire a laissé la clé dans le cadenas avant de ramper vers son coussin de velours.
Je reprends délicatement le trousseau entre mes dents et le dépose sous mes griffes.
J’expose les clés comme trophées d’échange sur la table qui va, à présent, servir de barre de jugement.

Les deux masques de bois se rapprochent au plus près de moi.
Ils sont si près que j’ai le loisir d’observer tous les détails sculptés.
L’orbite de ces yeux me renvoient dans la profondeur de ce néant que j’ai vu en rêve, il y quelques heures, quelques minutes, quelques secondes.
Je ferme les paupières pour mieux me souvenir de ce bercement qui m’avait apporté tant de réconfort.
Je respire à pleins poumons l’air qui me paraît étrangement parfumé dans cet endroit poussiéreux à l’extrême.
J’ouvre les yeux de surprise et me rends compte que cette odeur délicieuse provient de la mèche de cheveux blonds du masque divin.
Je reconnais le parfum des Dieux.
Il est unique.
Il sent le miel.
Quand l’effluve s’infiltre dans mes narines, je me souviens des paroles de mon rêve.
« Look at the lock, the old lock », « there’s an another lock ! Look for it », « and at the door, you’ll knock ! » et j’eus comme une illumination.
Je souffle sur la mèche blonde « the old lock ». Je vois une fine entaille sur le front du masque divin « the other lock ».
L’œil de verre a suivi tous mes gestes.
La Main de Gloire alors se remet en mouvement.
Telle une araignée fonçant sur sa proie, elle s’empare du globe oculaire et délicatement, elle l’ajuste dans l’orbite droit du masque divin.
La bouche du masque s’ouvre un peu plus comme sous l’effet de la stupeur.
L’œil se met à tourner dans tous les sens, dans un mouvement nerveux.
Le masque aveugle a retrouvé la vue.
Le Matagot se rapproche de moi, lui aussi, comme pour mieux voir.
Je pense quant à moi que c’est plutôt parce que l’heure de vérité approche.

Je vais devoir affronter les questions et la colère des Dieux que j’ai provoquée.
Suis-je bien Wingith le Grand ? Moi j’en suis sûr, à présent, mais je dois encore le prouver !

La Main de Gloire, elle, allait bientôt révéler ses origines.
Est-elle ancienne Main de voleur appartenant au premier des Gregorovitch ou Main du Dieu Tyr offerte en sacrifice pour ne jamais connaître la fin du Monde ?

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Message par Apsara Jeu 7 Juin - 16:54

Je suis toujours stupéfaite de voir comment on peut faire "coller" les écrits de J.K. avec ces mythes !
Beau travail de recherche, Suzy ! satisfait

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Message par Suzywa Mer 13 Juin - 23:31

A Apsara: :DDD C'est vrai mais je pense que JKR avait fait ces recherches avant d'écrire son oeuvre pour nourrir son histoire. Je pense que l'histoire de Harry Potter peut être une branche de l'Yggdrasil.

La Main de Gloire
(cinquième volet)

Le temps presse.
La nuit est déjà bien avancée.
L’horloge de la boutique sonne douze coups.
Je fais le point de la situation et je suis horrifié de constater qu’elle n’est pas brillante.
Où que mon regard se pose, le Destin montre ses crocs.
Je fixe le masque du félin et son expression sournoise indique qu’il tenterait l’impossible pour me refiler sa place auprès du Diable.
Je tourne la tête vers le représentant d’Asgard.
Maintenant qu’il a retrouvé son œil magique, il me fixe avidement.
J’ai la tâche ardue de le convaincre de ma véritable identité et cette partie-là n’est pas gagnée non plus. Loin de là !
Je regarde ensuite la Main de Gloire. Elle est liée à l’un de ces deux personnages de bois et je ne sais lequel.
Va-t-elle finalement décider de mon sort ?
Quand je regarde la lune dans le ciel pour y trouver un peu de réconfort, je comprends que le chariot solaire remonte la dernière pente de la nuit.
Je pense aux menaces qu’a proférées le propriétaire de cette boutique. Même si la déesse Freyia m’a offert l’éternité, je vois se profiler une aube aux couleurs de sang.
Où que mon regard se pose, les crocs du Destin tentent de me dévorer.

Le Masque divin se met à parler. Je détache mon regard du ciel pour le regarder bien en face.
- Nous écoutons ce que tu as à nous dire, fléreur !
Qu’as-tu à nous révéler pour nous convaincre que tu es bien Wingith le Brave ?
Je réponds doucement pour assurer ma défense.
- Ma mémoire est défaillante, Masque divin, et j’ai oublié ce qui s’est passé sur l’Ile de Lyngvi mais le récit des Maîtres d’Asgard m’a rappelé quelques souvenirs.

Un profond silence se fait.
Le Masque entre en contact avec ses représentants.
Soudain, la voix de Freyia se fait entendre, douce et chaude.
Elle me pose la question qu’elle m’avait soumise, quelques temps auparavant.
- Qu’as-tu à me dire, Fléreur ? Qu’ai-je donc remis à la femme barbue sur l’Ile de Lyngvi ?
Je baisse la tête en signe de dénégation.
- Je ne sais plus, bonne Freyia. Je ne veux pas vous décevoir mais je ne peux pas non plus vous mentir. J’ai oublié, Maîtresse ! Je n’en ai aucune idée… dis-je avec dépit.

Le Masque du Matagot se rapproche un peu plus de moi.
Son sourire me paraît plus ironique qu’il y a cinq minutes. Mon flair de félin soupçonne l’élaboration d’un projet qui ne me dit rien qui vaille.
Au même moment, la Main de Gloire quitte son coussin de velours et pose ses doigts sur la surface de la table.
Puis, plus rien ne bouge. Les pièces de cet étrange échiquier ont terminé de se positionner.

Après quelques instants suspendus, la voix d’Odin s’élève dans cet espace restreint. Elle éclate comme un coup de tonnerre.
- Tu commences mal, fléreur ! Il faudra te montrer plus prolixe si tu veux calmer notre colère !
La peur me submerge.
Pourtant, je relève la tête pour montrer que je n’ai pas encore perdu courage.
- J’attends ta réponse à mes deux questions. Quelle fut mon action pour empêcher Fenrir de nuire à mes frères et quel objet t’ai-je demandé d’apporter à Heimdall au cas où le fils de Loki parviendrait à se défaire du Gleipnir ?
Je me concentre et pour mieux évoquer les souvenirs vagues qui envahissent mon être, je plonge mon regard dans l’orbite aveugle du grand masque qui me fait face.
L’impression de vide m’enveloppe et je suis pris de vertiges.
Une image prend vie dans mon cerveau.
Elle est floue.
Je tente, néanmoins, de la rendre nette.
Machinalement, j’avance mon museau plus près de la cavité et je décris à voix haute ce que je vois.
- Je vois une silhouette… Un homme… Non ! Un Dieu, au vu de la carrure qui se dessine.
Cet être tient un objet entre ses mains… Une masse noire agresse mon champ de vision, je devine des mouvements brusques… Des mouvements de tête… Une gueule et des mâchoires terribles…Fenrir… Je vois Fenrir !
On place un objet dans la gueule de ce monstre. Vous avez mis un objet dans la gueule de Fenrir.
Je souffle la réponse. Cet effort m’épuise.
- Mais encore ! s’exclama Odin. Est-ce vraiment tout ce que tu peux me révéler ?
Je ne réponds rien mais je regarde le masque en signe de défi.
- Je n’ai aucune mauvaise intention ! ronronné-je avec vigueur. Je vous offre le meilleur de moi-même et j’affronterai mon destin la tête haute. Je ne perçois pas l’objet que vous m’avez confié mais je sais qu’il sert d’entrave.
Le Masque divin ne reprend plus la parole. Odin semble avoir rejoint Asgard.
Le silence abat ses lourdes ailes sur la boutique.

Le Matagot en profite pour continuer sa danse macabre et se rapprocher de moi.
La Main de Gloire court sur la table. Je sens comme un piège se refermer sur moi.
Le Masque divin reprend vie.
Thor arrive.
La colère résonne aussi dans sa voix.
- Je ne pense pas que tu t’en tireras à si bon compte, fléreur. Tes visions ne me convainquent pas ! Tu nous offres un bien piètre exercice de style, digne des voyantes de Mannaheim, ce Monde des Hommes ! s’exclame le Maître d’Asgard dans un rire impressionnant.
Les Nornes ne semblent pas te connaître ! Tu es loin de la qualité de leurs prestations ! Cela ne joue pas en ta faveur ! tonne la voix courroucée. Qu’as-tu à me fournir en guise de réponse ? Qu’ai-je confié à l’ours, ton compagnon de garde ?
Epuisé, découragé, je me laisse porter par mon seul instinct. Ainsi, je reproduis le même mouvement que précédemment. Je plonge mon regard dans le vide de l’orbite oculaire du masque.
L’obscurité profonde qui se cache derrière la face de bois me rassure. J’ai la nette impression d’y retrouver ma propre mémoire.
De plus, les Nornes qu’avait évoquées le Dieu Thor réappaissent sous mes yeux et j’entends à nouveau le cliquetis de leurs paroles.
« Look at the lock, the old lock », « There’s an another lock ! Look for it ! »,
« And at the door, you’ll knock ».
Les paroles se superposent dans le temps et dans l’espace infini de ce monde inconnu.
Elles m’hypnotisent.
Je les entends dans un chaos sonore. Je vois les lettres s’entremêler.
Comme dans un jeu d’illusion, un mot attire mon oreille, un mot attira mon regard :
« locket »
En le voyant, je me retrouve dans mon songe.
Je suis dans l’eau glacée et saumâtre.
L’objet qui miroite tout près de moi devient soudainement net.
Dans un ronronnement de stupeur, je crie :
- Locket ! Un médaillon !
Le masque me fixe et je lis l’étonnement dans la pupille qui se rétracte.
Le silence retombe mais je sais que Thor est toujours présent parmi nous.
Le masque de félin recule de quelques pas.
Son projet semble compromis.
Son rictus s’efface.
La Main de Gloire poursuit son déplacement. Elle rampe un peu plus pour se rapprocher du trousseau de clés que je serre sous mes griffes.

Le dernier des Dieux se manifeste, enfin.
Sa voix était toujours aussi triste.
- Fléreur ! Tu as marqué un point important en répondant ainsi ! Cette précision ne te sort pourtant pas de l’embarras car si tu es bien Wingith le Brave, ta présence ici à Mannaheim reste à expliquer. Je te demande donc de répondre à ma question.

La Main de Gloire s’est rapprochée du Masque divin quand la voix s’est élevée.
L’objet s’est ensuite interposé entre le Masque de félin et moi.
Je profite de cet intermède pour intervenir.
- Je suis épuisé, Maître, je n’ai plus bu ni mangé depuis plusieurs jours et j’implore votre complaisance.
- Même si je suis le Dieu de la Justice, fléreur, je ne peux rien t’accorder. Il te faut affronter l’épreuve jusqu’au bout et répondre à chacune des questions.
Le juge poursuit imperturbablement :
- Qu’ai-je confié à l’oiseau ?
Je plonge une dernière fois dans l’orbite vide du masque qui vient de parler mais je ne vois rien. Rien du tout. Tout tourne autour de moi et je fais un effort sur moi-même pour ne pas m’évanouir.
Je me couche dans la position du Sphinx pour reprendre mes esprits. De toute façon, je n’ai plus rien à dire. Je ne veux pas non plus épuiser mes dernières forces.
J’ignore si l’opportunité s’offrirait mais je rassemble mes dernières ressources pour qu’elles me servent à fuir cette boutique au cas où…
La voix du Masque me fait sursauter.
- Les Dieux doivent se concerter !
J’entends cette sentence avec horreur.
Je sais que les Dieux sont des êtres capricieux et colériques.
Les débats risquent de prendre un temps infini.

Le Masque de Matagot profite de cette pause pour se déplacer latéralement. Manifestement, il évite d’avoir la Main de Gloire dans son champ d’action.
Je remarque qu’il a retrouvé son sourire ironique.
- Tu n’as pas beaucoup de chances de t’en sortir, fléreur. Même si les Dieux te reconnaissent, ils risquent de prendre un sacré temps de réflexion !
La voix féline est mielleuse.
Elle a un pouvoir lénifiant.
Elle me charme.
Conscient de son action sur moi, le Masque de Matagot poursuit son discours.
- Regarde le ciel, fléreur. Les étoiles pâlissent ! Auras-tu le temps d’échapper aux tortures de Mr Barjow ? Profite de cet intermède divin pour fuir avec moi !
Tu as dérobé ce trousseau de clés et, par la même occasion, tu as trouvé celle de ma liberté. Ce marchand m’a emprisonné et je ne peux m’exprimer qu’au travers de ce Masque félin qui traîne dans ce débarras. Je suis enfermé dans un des coffres de l’arrière boutique. Barjow me nourrit et me force à lui donner l’or que je produis. Son âme était déjà perdue. Je perds mon temps ici. Je dois me libérer de l’emprise de ce pirate pour rapporter de nouvelles âmes à mon Maître. Si tu ne m’aides pas, ce marchand continuera de piller les Mondes dont les chemins aboutissent ici même. Cette clé en forme d’arbre lui en donne l’accès. Il faut que cela cesse. Viens avec moi ! Après, je t’emmènerai auprès du Diable, là où les chats sont rois. Tu seras un Matagot bien plus attrayant que moi avec cette toison étincelante. Tu pêcheras des âmes bien plus efficacement que je ne le fais. Je t’en prie, laisse-moi prendre la clé du coffre où je croupis.

La voix ensorcelante du masque de félin avait amoindri ma résistance. Je rentre mes griffes et replie mes pattes sous moi.
Le Matagot en profite pour s’approcher encore.
Le trousseau est à sa portée. Je ne réagis pas.
Un sourire de satisfaction se dessine sur sa face de bois.
Sa gueule s’ouvre largement et s’abaisse vers les clés qui sont exposées.
Il veut les voler toutes et, malgré tous mes efforts, je ne peux contrecarrer les intentions du chat diabolique.

La Main de Gloire se met alors en mouvement. Ses doigts agiles se déplacent et, avant que la gueule ne se referme sur son butin, la main plaque sa paume sur le trousseau tant convoité.
Le Matagot miaule de rage en constatant l’intervention de la Main.
Ce cri de colère me fait sortir de ma torpeur.
Le félin de bois ouvre sa gueule et se penche vers les doigts squelettiques. Il tente les mordre.
C’est à ce moment précis que le Masque divin se retourne.
- Arrête Matagot ! Tu enfreins les règles que nous avions mises en place de commun accord !
Le Masque observe alors la Main de Gloire et se remet à parler.
- Il semble que la Main de Gloire n’ait pas les mêmes intentions que toi !
Le Matagot ne se laisse pas démonter.
- Qu’en savez-vous ? Avez-vous été témoin de la scène ? Cette Main de Gloire s’est emparée de ce trousseau pour me le remettre ! dit-il le regard rempli de ruse.
- Nous constaterons cela plus tard, Matagot ! Reprends ta place et écoute l’avis des Dieux.
Les masques et la Main reprennent leur position. Les clés sont exposées devant moi.
La voix de Tyr retentit dans la pièce.
- Fléreur, après concertation, voici notre verdict ! Nous avons reconnu en toi, Wingith le Brave, le compagnon de Freyia qui a contribué à la fabrication du Gleipnir. Tu avais la tâche de surveiller Fenrir sur l’Ile de Lyngvi.
Le fait que tu aies pu nommer le médaillon de Thor t’a valu la vie sauve. Ton cran et l’audace de tes requêtes ont également joué en ta faveur. Freyia t’a reconnu au travers de tes paroles et de ta bravoure.
Reste, à présent, à connaître le verdict de la Main de Gloire. Va–t-elle te reconnaître ? Si oui, nous saurons que l’organe, ici présent, est bien la Main de Tyr. Sinon, nous nous serons trompés sur ton compte et le Matagot t’emportera où bon lui semble, dans un Monde qui ne nous appartient pas.

De manière tout à fait inattendue, les doigts magiques s’emparent du trousseau de clés et ouvrent l’anneau en forme de serpent.
Avec lenteur et délicatesse, ils retirent les trois clés pour les poser séparément sur la table.
La Main se débarrasse alors de l’anneau devenu inutile.
Elle le jette sur le sol de la boutique.
Les phalanges squelettiques se mettent en mouvement et la Main tourne autour des trois clés.
Elle écarte celle qui avait ouvert ma cage. D’une pichenette, l’index l’envoie rejoindre le serpent de métal qui vient de tomber sur le sol.
La Main touche alors la clé rouillée puis celle qui ressemble à un arbre.

Après quelques moments d’hésitation, elle jette la clé rouillée sur le sol pour ne garder que la dernière sur la table de bois.
Je vois alors la Main se redresser et s’approcher de moi. Elle ouvre les doigts. Je suis exténué.
La main noire envahit tout mon champ de vision.
Je vois se lever des étoiles dans la nuit de cette paume et je ne sais pourquoi, je reconnais une des constellations de notre univers.
- La coupe !
Ce terme s’échappe dans un ronronnement.
La Main arrête sa progression et se fige comme sous l’action de la surprise.
Je sens alors le contact des doigts sur mon pelage.
Je pensais qu’ils allaient se refermer sur ma gorge asséchée mais au contraire, ils se font doux et me caressent.
La Main de Gloire m’a reconnu.

Dans un soupir de soulagement, je tourne la tête vers la vitrine.
L’horreur me coupe le souffle. Le ciel commence à changer de couleur. Même l’Etoile du berger efface sa lumière dans ce ciel d’été. Le soleil va franchir la cime des maisons de ce quartier mal famé.
La Main de Gloire se courbe alors devant moi.
Elle s’empare de cette clé aux allures d’arbre que j’ai toujours préférée aux deux autres.
Tyr se met à parler.
- Tu as passé la seconde épreuve avec panache, Wingith le Brave.
Grâce à toi, nous connaissons à présent la vérité à propos de cette Main de Gloire. Tu as également confirmé que tu étais bien présent à Lyngvi. J’ai donc retrouvé ma Main et j’ai à présent la conscience de ce qui lui est arrivé dans ce Monde de Mannaheim.
Elle a bien suivi le courant de bave et a été emportée dans le Lac d’Amsvartnir.
Elle a coulé au fond de cette étendue d’eau, s’est enfoncée dans la vase qui donne accès au Svartalaheim, le Monde des Alfes Noirs, les Nains qui nous ont rendu tant de services. Ils ne l’ont malheureusement pas vue passer et n’ont pu l’intercepter. La Main a continué son chemin de fortune et a fait surface dans le Mannaheim, ce monde des hommes dans lequel nous sommes arrivés.
Elle a réapparu dans l’actuelle Durmstrang et a conféré ses pouvoirs magiques sur tout ce territoire. Un homme s’en est, en effet, emparé, un nommé Gregorovitch qui l’a transformée en Main de Gloire dans de mauvaises intentions.
Le Masque se tourne alors vers le Matagot.
- Vous aviez raison mais en partie, cher compère !
Le félin de bois ne répond rien. Il n’y avait rien à répondre d’ailleurs et le Masque divin se retourne vers moi :
- J’ai à présent le pouvoir de te libérer de cet endroit bien sombre, Wingith !
Il faut encore résoudre un mystère. Que fais-tu ici à Mannaheim ? Que fais-tu ici chez les Hommes ? Où est Fenrir ?
- Ma réponse risque de vous lasser, Dieu Tyr, mais je répète que je ne puis vous répondre. Si je suis ici c’est pour une bonne raison. Je dois retrouver la mémoire et remplir cette tâche qui m’échappe toujours ! Faites-moi confiance !

Un rayon de soleil entre dans la pièce comme pour appuyer cette dernière requête.
A ce moment précis, je remarque de l’animation dans la rue.
Barjow arrive.
Les événements s’enchaînent alors très vite.

Je regarde le Masque divin en face et dans un étonnement complet, je découvre le sens caché des runes que les Nornes m’avaient révélés.
« Look at the lock ! The old lock !”
- Lock ! Mèche de cheveu en Anglais.
La face de bois est si proche de moi que je souffle sur la mèche de cheveux blonds pour faire apparaître, une nouvelle fois, la cicatrice ouverte dans le front.
« There’s another lock ! Look for it ! »
- La cicatrice serait-elle une serrure ?
En guise de réponse, la Main de Gloire introduit la clé dans cette fine entaille. Dans un dernier effort, je laisse aller ma tête en avant, et du front, je frappe au bois de ce masque pour que se réalise le conseil de la plus jeune des Nornes : « And at the door you’ll knock ! »
A cet instant, je vois le Masque se transformer.
Sa bouche s’ouvre tel un gouffre pour m’offrir un passage secret des plus étonnants.
La Main de Gloire me pousse dans le trou noir formé par cet orifice aux dimensions démesurées avant de retirer la clé de sa serrure magique.
Je suis emporté par le Masque de bois dans un mouvement arrière.
Il regagne sa place habituelle contre le mur de la boutique.
La bouche se referme lentement sur moi.
La Main de gloire se dépêche de retirer l’œil de verre de l’orbite du Masque avant que celui-ci ne soit hors de portée.
Heureux de sentir la liberté à portée de patte, je me penche pour satisfaire ma curiosité.
La Main de gloire pousse la cage par terre.
Elle termine son travail de voleur expert en cachant la petite clé en forme d’Yggdrasil dans les replis de son coussin de velours.
Mr Barjow arrive juste pour constater mon évasion.
Il ne trouve que la cage et le trousseau de clés éparpillé sur le parquet poussiéreux.
Je l’entends hurler sa colère.
Il se tourne vers le Masque de bois où je suis à présent réfugié mais je n’entends que ses pas se diriger vers moi.
Je suis hors d’atteinte, dans le noir le plus total.
Un ronronnement de bonheur m’échappe :
- Trop tard.

J’ouvre grand les yeux et j’inspire l’air à pleins poumons.
Quelques minutes me sont nécessaires pour me resituer dans le temps et dans l’espace.
Snowpuff est encore sur mes genoux, au creux de mes bras.
Je suis dans le jardin. Entre chien et loup.
Quelques gouttes de pluie commencent à tomber.
- Quelle aventure, n’est-ce pas ? me ronronne le fléreur.
- Tu peux le dire ! je lui réponds les yeux écarquillés. J’ai plein de nouvelles informations, je peux me replonger dans mes notes et….
Je ne continue pas.
Je me relève en vitesse pour ramasser les feuilles de mon bloc, éparpillées sur la pelouse. La pluie tombe plus drue et je ne veux pas perdre les informations que j’ai déjà rassemblées.

Les bras chargés, je rentre dans ma petite maison de banlieue pour me faire une théière de Gunpowder bien corsé.
Snowpuff et Leiko me suivent dans la cuisine.
Leur queue frétillent de plaisir. Le fléreur ne me lâche pas d’un pas. Le chien jappe avec insistance. Quand je vois l’heure, je comprends que la faim et la soif tenaillent leur estomac. Vingt et une heures trente frappent déjà au portillon du cadran.
- Le temps passe vite dans tes souvenirs ! m’exclamé-je. C’est d’ailleurs un truc qui me chipote, Snowpuff…
Je me tourne vers lui pour le questionner mais je vois mes amis se délecter de leur pâtée et de l’eau fraîche.
Je les laisse donc à leur régal pour me calfeutrer dans le fauteuil du salon.
La tasse de thé au parfum amer m’aide à prendre du recul.
Un gros morceau que m’a offert mon ami bien étrange.
J’en avais pour quelques jours de recherche avant de découvrir un autre souvenir.

Les notions de temps et d’espace m’intriguent dans la vie de Snowpuff.
En entrant dans la bouche du Masque divin, j’avais eu la nette impression que le temps s’écoulait bien plus lentement que dans ce monde qui est le mien.
Le temps que j’avais vécu dans le souvenir semblait avoir duré une éternité comme si Snowpuff faisait partie d’un espace et d’un temps immense.
Je fais instantanément le rapprochement avec les images du premier alunissage où Neil Armstrong se déplaçait lentement dans cet univers stellaire dont nous ne voyons pas la fin.
La chronologie de la vie de ce fléreur est vraiment étrange.
La chute de la Main du Dieu Tyr semblait remonter aux temps d’Orry Ollivander, bien avant la naissance du Christ.
Elle était tombée dans notre monde humain et semblait avoir transmis ses pouvoirs magiques au territoire de Durmstrang et à celui qui s’en était emparé.
Freyia, Odin, Tyr et Thor étaient toujours vivants en cette année de grâce 1996, date de la captivité de mon ami chez Barjow.
Pourtant eux sont mortels tout comme nous, simples humains, mais ils semblent avoir des millénaires.

Snowpuff arrive au salon. Ses yeux ont un éclat particulier.
D’un pas décidé, il s’approche du fauteuil et saute à côté de moi.
Dans un seul regard, il embrasse toutes les remarques que je venais de rassembler dans mon cerveau.
- L’espace ? Le temps ? me souffle doucement Snowpuff.
J’acquiesce d’un mouvement de tête, avant de parler :
- Oui, j’ai un problème avec le temps et l’espace qui sont les tiens, Snowpuff. Où étions-nous quand nous avons franchi la porte en forme de bouche ?
- Nous devions être dans l’Yggdrasil, sans aucun doute ! La sève circule dans son tronc immense et ses canaux transportent les éventuels voyageurs là où ils le désirent.
- Que s’est-il passé après ? Où es-tu allé ?
- J’ai pensé au Chemin de Traverse et à Mr Ollivander, puis, une lueur lointaine a illuminé un canal. Je suis monté sur une barque, je me suis laissé porter et elle m’a mené jusqu’à une bouche d’égout. Je suis sorti et j’ai bien retenu la configuration des lieux au cas où je devrais retrouver l’accès à l’Yggdrasil ! C’est là maintenant, bien blotti au creux de ma mémoire…
- Pourquoi craignais-tu Barjow ? Tu es immortel si j’ai bien compris ! Qu’avais-tu donc à redouter ?
- La Mort, souffla doucement le fléreur. Si je meurs, je renaîtrai mais j’aurai à nouveau oublié la quasi totalité de mes souvenirs. Il faudra que je les fasse revenir et je n’ai plus le temps nécessaire. Je sens que le temps presse.
Je dois remplir une mission : Fenrir a un projet et je dois empêcher qu’il aboutisse…

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Dernière édition par Suzywa le Dim 17 Juin - 21:33, édité 1 fois
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Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 Empty Re: Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours)

Message par Apsara Dim 17 Juin - 21:19

Un chapitre bien angoissant : pauvre Snowpuff-Wingith ! Retrouvera-t-il sa mémoire et échappera-t-il à des vies successives consacrées à la poursuite de souvenirs qui s'échappent ?

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Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours) - Page 3 Empty Re: Contes et souvenirs de fléreur. ( En cours)

Message par Suzywa Mer 20 Juin - 21:53

pale Oui et pourtant ce sont les chapitres que je préfère dans cette histoire. Peut-être parce que je commence à mieux connaître Snowpuff, je le comprends mieux, j'entre plus vite et plus facilement en connexion avec lui.
L'été est là, on profite un peu du jardin. Je rêvasse.
Ce souvenir à propos de la Main de Gloire est vraiment extraordinaire. Snowpuff vient de m’offrir de nouvelles pistes de recherche et je ne sais plus où donner de la tête.
Une chose était sûre, il avait dû se passer un événement grave sur l’Ile de Lyngvi. Le médaillon n’était plus entre les pattes de l’ours qui avait aidé à la réalisation du Gleipnir.
Snowpuff s’était retrouvé dans l’eau du Lac et le bijou sacré avait disparu dans la vase vers un autre Monde.

Depuis quelques semaines, j’ai fait des recherches sur l’amnésie.
Snowpuff n’était pas un être humain, aucune maladie nerveuse ne pouvait donc le toucher. Par contre, un traumatisme important risquait fort d’avoir perturbé sa mémoire.
La chute dans l’eau glacée, le passage dans d’autres mondes en suivant les canaux de l’Yggdrasil représentaient des chocs suffisamment importants pour causer une amnésie si importante.
Je reprends la gravure de l'Ygddrasil et j'observe les racines de l’Arbre-Univers. Les circonvolutions particulières dessinées sur le papier journal me font penser aux Nœuds de Moëbius dont on dit qu’ils servent de passage vers des mondes parallèles invisibles à nos yeux. A l’âge de 15 ans, j’étais une passionnée du paranormal.

Le temps et l’espace…. Je retrouvais les facteurs qui m’avaient tant troublée au retour du souvenir passé.
Quelle peut bien être la chronologie de tous ces événements qu’a vécus Snowpuff ?

Le Dieu Tyr avait perdu sa main quelques siècles avant Jésus-Christ.
Je me souviens soudain de l’histoire de Orry quand Gregorovitch avait volé ses secrets et emmené Maya, sa compagne.
Personne n’avait ni entendu, ni vu quoique ce soit, la nuit du drame…
La Main de Gloire apparaît alors dans mon esprit.
Gregorovitch avait déjà la Main de Gloire peu avant la mort de l’aïeul de Mr Ollivander. Il avait dû l’utiliser pour commettre ses méfaits et plonger le village antique dans la tristesse et la colère.

Je quitte cette vision pour suivre une autre idée.
J’imagine Snowpuff surveiller Fenrir sur cette Ile de la désolation.
L’attente, la surveillance, l’ennui et les éventuelles disputes que ce sentiment avait dû causer entre une femme, un ours, un oiseau, un fléreur, un poisson et un rocher me paraissaient un fardeau très lourd à supporter.
Un fait était survenu, un événement inconnu des Dieux.
Fenrir était parvenu à se détacher pour on ne sait quelle raison avec l’intention de rejoindre Mannaheim, le Monde des Hommes.
Le médaillon était tombé à l’eau.
Snowpuff aussi.

L’objet cédé par Thor a très vite attiré mon attention.
Ce bijou en or fin m’est apparu très nettement, pendant un court instant.
Il ressemble au médaillon de Salazar Serpentard décrit par Mrs Rowling, après la fuite de Rogue. Lui aussi était marqué d’un S. L’auteur avait même ajouté ces mots étranges : « … un S censé être la marque de Serpentard »
Les paroles du Dieu Tyr me reviennent alors en mémoire :
« … J’ai donc retrouvé ma Main et j’ai à présent la conscience de ce qui lui est arrivé dans ce Monde de Mannaheim.
Elle a bien suivi le courant de bave et a été emportée dans le Lac d’Amsvartnir.
Elle a coulé au fond de cette étendue d’eau, s’est enfoncée dans la vase qui donne accès au Svartalaheim, le Monde des Alfes Noirs, les Nains, qui nous ont rendu tant de services. Ils ne l’ont malheureusement pas vue passer et n’ont pu l’intercepter. La Main a continué son chemin de fortune et a fait surface dans le Mannaheim.
»

Si on suit le chemin parcouru par la Main de Tyr, il est facile d’imaginer le trajet que le bijou devait avoir suivi.
Je reprends, une fois de plus, l’illustration de l’Yggdrasil et j’observe la configuration du Svartalaheim, autrement dit « le Monde des Nains ».
Entre chaque Monde, un sas semble servir de passage.
Un canal démarre à Asgard et descend vers le Monde des Nains. De là, un second passage débute pour remonter vers Mannaheim.
Tout semblait concorder.
Si le médaillon de Thor est bien celui de Salazar Serpentard, ce pendentif serait apparu aux environs de l’an 1000 sur le sol de notre Monde, au temps des quatre fondateurs de Poudlard.
Plus de 1200 ans séparaient les deux événements.
Snowpuff aurait surveillé Fenrir pendant plus d’un millénaire ou bien… ou bien le temps de Asgard passe plus lentement…
Une année dans le Monde des Dieux en vaudrait, par exemple, mille chez nous !

Snowpuff arrive au jardin au terme de ce raisonnement et je lui en fais part.
Il se met à marcher de long en large. Cette attitude révèle que j’ai fait mouche.
Un détail a dû le frapper et évoquer un nouveau souvenir.
Toute à mes réflexions, celles-ci suivent des rails qui m’amènent vers une autre conclusion.
- Snowpuff, ce médaillon que nous avons vu dans ta mémoire, tu l’as déjà vu. C’est celui que Mrs Hepzibah Smith possédait. Tu as été proche de cet objet pendant des années avant d’en perdre la trace à cause de Tom Jedusor.
Snowpuff arrête ses allers et venues. Il saute sur la table de jardin et s’assied devant moi. Il plonge son regard dans le mien et ronronne :
- C’est exactement ce à quoi je pensais !
- J’ai une autre question, Snowpuff. Que faisait Thor avec un médaillon ? Que faisait Salazar Serpentard avec un bijou de femme ? C’est une question que je tourne dans ma tête depuis quelque temps.
Snowpuff sourit soudainement dans ses moustaches.
- Tu es précieuse ! Tu ne peux savoir comme tes questions et tes raisonnements m’aident à rassembler mes souvenirs perdus.
Tu vas avoir réponse à tes questions.
Viens ! Je t’emmène auprès de


Kreattur et Compagnie…


Snowpuff ne se fait pas attendre.
Il me fait plonger dans les paillettes dorées de ses yeux et m’emmène dans un des tourbillons de sa mémoire.
Je m’y enfonce et atterris dans une grande pièce.
Un salon bien entretenu et richement décoré. Une quinzaine de personnes y discutent.
L’ambiance est animée.
Les femmes et les hommes s’exclament, échangent des idées sur un ton parfois vif.
Moi, je suis caché sous un meuble, meilleure manière de passer inaperçu.
Soudain, la frimousse d’un petit bonhomme d’environ six ans apparaît. Je fais le gros dos mais il n’est pas intimidé pour autant. Le gamin aux cheveux blonds se met à plat ventre devant moi et il m’aurait sûrement attrapé si sa mère n’était pas intervenue :
- Venez, Bartemius ! Ce n’est pas distingué de se vautrer sur le tapis ! Levez-vous, je vous prie.
Le bruit d’une petite fessée vient clore mon problème et je me détends.
Je fixe, à présent, un autre objet.
La mise au point fait apparaître une grande tapisserie brodée d’or.
Tout en haut, je peux lire :

La Noble et Très Ancienne Maison des Black
« Toujours pur »

Un fil étincelant avait écrit les noms et les prénoms de la famille, avait tissé les liens de sang et de mariage.
Un blason surplombe l’arbre généalogique.
Pour je ne sais quelle raison, je le contemple pour en mémoriser les moindres détails.
L’écu est noir et un gros chevron blanc pique le ciel du blason. Deux étoiles blanches à cinq branches y brillent. Une à gauche, une à droite.
Dans la partie inférieure, une épée dressée vers le haut s’insère parfaitement dans la pointe du chevron.
Entourant le blason, deux lévriers se font face et touchent le bord de l’écusson de leur patte supérieure comme pour l’empêcher de bouger.
Un ruban noir se déroule au pied de cette armoirie.
La devise « Toujours pur » s’y étale en lettres gothiques.
Je peux lire les noms.
Les derniers que je vois tout en bas étaient nés d’Arcturus et de Melania Mc Millan : « Lucretia ( 1925- ) Orion ( 1929-) ». Ils sont installés juste à côté de leurs cousins « Walburga (1925-), Alphard (1930-) et Cygnus (1929) », tous trois issus de Pollux et d’Irma née Crabbe.

En cette année 1945, la famille Black est assise confortablement dans ce salon décoré à la Serpentard.
Tous les représentants encore en vie à cette époque y font acte de présence.
Les doyens, Sirius et son frère, que tous appellent Arcturus l’Ancien pour le différencier du mari de Melania, mène de main de maître cette discussion qui doit faire rage dans toutes les familles sorcières aisées de Londres.
Le meurtre de Mrs Hepzibah Smith par Hockey, son elfe de maison que tous connaissaient ici, échauffe les esprits.
- Cette nouvelle est terrible ! Le portrait de notre aïeul, Phineas, enrage de devoir rester dans son cadre sans pouvoir partager notre réunion familiale. s’exclame Sirius Black d’une voix forte.
Le plus jeune des deux Arcturus répond:
- Je ne vous le fais pas dire, Père ! Il faudra prendre des mesures ! Imaginez, que je retrouve ma chère Melania, empoisonnée par Kreattur pour s’emparer de ses bijoux, en plus !
Irma Black appuie cette intervention en lançant un regard soutenu à son cousin par alliance :
- Arcturus, mon cher ! Vous êtes bon legilimens ! Je faisais justement la même réflexion à Pollux, ce matin. Mrs Smith était trop proche de Hockey. La solitude sans doute ! Comme quoi donner trop de responsabilités et trop de confiance à un elfe de maison peut se retourner contre vous. Notre société mérite vraiment que quelqu’un reprenne les choses en main.
Melania s’accroche au bras de son époux pour le forcer à se détourner d’Irma. Elle lui dit avec douceur:
- Je suis d’accord avec vous, Arcturus. Il faudra être plus sévère encore avec nos elfes ? Quel exemple pour eux.
Violetta, la belle-sœur de Sirius Black, le maître de maison, pousse le débat un peu plus loin. Cette femme âgée, toute de noir vêtue depuis le décès de son époux, relève ses paupières lourdes pour s’adresser à l’assemblée. Elle est assise dans le sofa, placé au centre de la pièce. Un détail rehausse son vêtement sombre. Un bijou pend à son cou, retenu par une chaîne très fine. Un petit médaillon en or, tout simple, tout lisse, repose sur ses genoux. Elle le caresse de ses longs doigts, puis, d’un air pincé et distingué, elle s’exclame :
- Il est vraiment dommage que Grindenwald ait été défait. J’espérais que ce fût lui le fameux héritier des Serpentard. Cette nouvelle de Poudlard m’avait ravie, il y a deux ans. J’imaginais un juste retour des choses.
Arcturus l’Ancien applaudit les paroles de sa belle-sœur et embraye :
- Il faudrait que l’un de nous se fasse élire aux prochaines élections ministérielles pour préserver ces valeurs ancestrales que nous défendons depuis des siècles. Ce Dumbledore ne me dit rien qui vaille ! De nouveaux décrets devraient être votés pour que les relations avec les moldus et autres êtres inférieurs soient réglementées de manière stricte.
Un brouhaha s’élève alors approuvant cette pensée et la vieille femme au maintien raide sourit ironiquement en entendant la réaction des membres de la famille.
Pollux Black tente de calmer l’effervescence. Il s’adresse à l’assemblée sur un ton offusqué :
- Voyons ! N’exagérez pas ! Nous ne pouvons comparer notre situation avec celle de cette regrettée Hepzibah. Notre tante Elladora était son amie, bien sûr.
Elle a été influencée par cette femme fantasque qui a toujours aimé être le centre d’attraction de notre communauté magique. Toutes deux avaient décidé de mettre les elfes de maison à l’honneur en décapitant ces vieux serviteurs et en gardant leur tête en souvenir de leurs bons et loyaux services mais nos rapports avec eux n’ont jamais été amicaux.
Chacun a toujours gardé sa place et tout est pour le mieux ! Non ! Vous avez tort de vous inquiéter !
Irma s’éloigne impétueusement de son époux pour marquer son désaccord avec les paroles qu’il vient de prononcer. La jeune femme est intelligente. Elle est jeune encore, svelte et avenante malgré des traits un peu lourds hérités des Crabbe. Au nez et à la barbe de tous, elle choisit de marquer son indépendance et s’installe aux côtés de sa belle-mère, Violetta. Elle lui prend le bras affectueusement et indique qu’elle a choisi son camp.

Sirius ainsi que son frère, Arcturus l’Ancien, et sa belle-sœur Violetta sont vraiment très pessimistes en pensant aux conséquences qu’aura ce drame sur les rapports entre les elfes de maison et leurs maîtres. Cela se lit sur leurs traits que la vie a burinés.
Leurs enfants, quant à eux, sont plus partagés. Leurs filles et brus ont l’imagination fertile. Elles se nourrissent de l’inquiétude générale pour tisser des scénarios catastrophes mettant en scène des elfes de maison motivés par l’appât du gain.
Les fils et gendres, eux, font preuve de plus de tempérance. Pollux, surtout, se démarque davantage. Il est le seul à afficher un optimisme sans faille.

L’heure du thé sonne, heure sacrée qui suspend les débats temporairement.
Les femmes se rassemblent autour de la table où les elfes ont dressé le service.
Les hommes font comité pour déguster un verre de Firewhisky, toujours excellent chez les Black.
La porte du salon s’ouvre brusquement et deux jeunes adolescents d’environ quinze ans entrent dignement pour se mêler aux adultes.
Orion et Cygnus rejoignent leur père respectif.
Alphard et Lucretia les suivent. Un éclat de rire commun les précède. Le jeune homme est d’un naturel optimiste comme son père et prend un plaisir manifeste à voir sa cousine s’amuser autant.
Enfin, solitaire, Walburga apparaît.
Elle arbore ses vingt ans, l’âge rêvé mais terni par un physique ingrat et un visage bougon. La marque de fabrication des Crabbe est inscrite au creux de chacun de ses traits.
Elle s’assied à côté de sa mère, Irma, et lance un regard noir à son frère afin qu’il arrête ses plaisanteries. Walburga observe ensuite le jeune Orion sans grand enthousiasme. Ce dernier a encore des traits enfantins malgré ses seize ans.
Fine observatrice, la vieille Violetta a remarqué le manque d’allant de sa petite-fille, elle souffle alors quelque chose à l’oreille de sa bru.
Pendant qu’elle écoute le message de sa belle-mère, Irma suit des yeux les gestes du jeune Orion.
D’un geste engageant, elle encourage sa fille à rejoindre le jeune homme mais Walburga se renfrogne. Pour couper court à toute nouvelle tentative, cette dernière s’adresse d’une voix forte à sa grand-mère et relance le débat.
- Grand-mère Violetta ! Que s’est-il donc passé chez cette vieille Mrs Smith ? On dit que Hockey l’a tuée ! Est-ce vrai ?
L’aïeule acquiesce sèchement d’un mouvement de tête.
- C’est cela même ! Vous avez très bien résumé la situation, Walburga.
La jeune fille met précipitamment sa main devant sa bouche pour étouffer un cri.
- Père ! Les elfes de maison vont-ils se révolter ? demanda Alphard sur un ton très sérieux qui trahissait une certaine appréhension.
Pollux répond d’une voix calme et sèche :
- Non ! Je ne pense pas ! Ce n’est qu’un regrettable fait divers qui n’aura aucune suite. J’en suis persuadé !
Cygnus pose, lui aussi, une question mais sur un ton plus vif où pointe la colère :
- Père ! On raconte que l’elfe a été emprisonnée à Azkaban. Comment peut-on considérer ces êtres inférieurs comme des sorciers ? Ne devrait-on pas les enfermer ailleurs ? Quelle honte de mettre les elfes sur le même pied d’égalité qu’un humain.
Violetta Black empêche son fils de répondre.
- Pollux ! Arrêtez de trouver toujours de bonnes excuses ! Cygnus a raison ! Toutes ces décisions hâtives sont du plus mauvais effet. Un elfe ne peut être considéré comme égal des sorciers et je vous dis que tout cela aura des répercussions regrettables dans un avenir plus ou moins proche. Quelque chose ne tourne plus rond. Où sont les valeurs que nous inculquons à nos enfants ? Où sont les règles que nous imposons à nos elfes depuis des siècles ?
La supériorité de notre sang pur ne fait aucun doute. Imposons-la à tous les êtres vivants qui ne sont pas comme nous.

Kreattur entre dans la pièce.
Il est déjà vieux mais il se déplace facilement en portant un énorme plateau d’argent sur lequel sont posés cinq rafraîchissements.
Son arrivée interrompt le cours de la conversation. Pressé de le voir repartir vers d’autres occupations, Sirius Black, lui parle sèchement :
- Pose tout cela sur le guéridon et laisse-nous, elfe.

Je vois passer les pieds velus du serviteur devant moi et profite de ce que personne ne regarde dans sa direction pour le suivre furtivement.
Kreattur se dirige vers la cuisine.
Il bougonne tout seul :
- Le maître est bien sec avec Kreattur, depuis que Hockey a mal agi ! Que va devenir Kreattur ? Kreattur n’a rien fait de mal, lui. Il sert ses maîtres avec déférence, lui ! Kreattur n’aime pas du tout qu’on lui parle sur ce ton !

L’elfe est plongé dans ses pensées. Il n’est pas content et le phrasé qu’il a adopté était carrément insolent.
J’accélère le pas pour le dépasser. Je lui coupe le passage pour l’empêcher d’entrer dans la cuisine. Kreattur s’arrête, surpris de ne pouvoir continuer son chemin. Je ronronne pour le rassurer
- Hockey n’a rien fait de mal, Kreattur !. Ce n’est pas elle qui a tué notre maîtresse. C’est un homme, un voleur, qui l’a assassinée pour lui voler des bijoux ! J’ai tout vu, Kreattur ! Tu peux me croire.
Kreattur me regarde étrangement. Son regard jauge le mien.
Après quelques secondes d’hésitation, il répond :
- Kreattur serait heureux que Snowpuff me raconte ce qui s’est passé. Kreattur connaissait bien Hockey.
Kreattur ne croit pas que sa vieille amie ait pu faire du mal à sa maîtresse qui était si proche de Mrs Elladora !

J’entre avec lui dans le domaine des elfes. L’office est vaste.
Kreattur n’est pas le seul serviteur de la maison.
Cinq autres elfes se sont regroupés, vraisemblablement pour parler de Hockey et de la méfiance que tout cela faisait naître chez leurs maîtres.
Kreattur ne se mêle pas à eux. C’est déjà un être solitaire. Comme il n’a plus rien à faire avant une heure ou deux, il dépose son plateau sur la table de travail et m’emmène dans son nid afin d’écouter mon récit et je lui raconte tout de A à Z.
Je remarque chez lui un regain d’attention quand je lui parle de ce que Tom Jedusor convoitait.
Ses pupilles s’élargissent quand je cite le médaillon et la coupe ayant appartenu respectivement à Salazar Serpentard et à Helga Poufsouffle.
L’elfe lâche une confidence recelant un certain mystère :
- Kreattur savait que la Maîtresse de son amie Hockey possédait ces trésors ! Hockey l’avait confié à Kreattur. Hockey était une elfe très importante.
Kreattur est pourtant contrarié. Il n’est pas bon qu’un sorcier s’empare de ces deux objets…

Je poursuis mon récit et le petit serviteur se bouche les oreilles quand je raconte comment Mrs Hepzibah Smith est morte et ce qu’il est advenu dans l’antre de la Mort. Kreattur se balance d’avant en arrière, tout en tenant sa tête entre ses mains.
Ce récit le perturbe tant qu’il finit par se taper le front contre le mur de son nid.
- Ce que Snowpuff vient de raconter est terrible ! Tout va devenir très compliqué. Il faut que Kreattur avertisse Winky et Dobby qui sont venus avec leurs maîtres.
Nous redescendons dans la cuisine au pas de course.
Kreattur fonce sur eux. Ceci a comme effet de disperser le petit groupe d’elfes de maison pour laisser place à un jeune serviteur. Ses yeux verts et globuleux illuminent son visage expressif.
- Dobby ! Dobby doit venir avec Kreattur ! Dobby et Winky doivent écouter le récit de Snowpuff, l’ami de Hockey.
Rien qu’à l’énoncé de ce prénom, tout le groupe se met à pleurer et à se moucher bruyamment dans le torchon de cuisine qui leur sert de livrée.
Une jeune elfe sort alors du groupe. Son visage était caché dans une grande serviette à carreaux. Seules deux énormes oreilles se balancent mollement, signe d’une profonde tristesse.

Nous nous dirigeons lentement vers le nid de Kreattur.
Une fois bien installés, les trois elfes m’écoutent attentivement, la bouche ouverte, partageant mes peurs et ma peine.
Dobby et Winky réagissent exactement comme Kreattur.
La surprise se lit dans leurs grands yeux globuleux à l’évocation du médaillon et de la coupe.
Les trois serviteurs se bouchent les oreilles en rabattant violemment leurs larges pavillons. Entendre ce que ces objets précieux sont devenus entre les mains de Tom Jedusor est un véritable supplice pour eux.
Au terme du récit, les elfes relèvent la tête et se regardent.
Je peux lire la même expression d’inquiétude dans leurs yeux. Ils se regroupent alors en petit cercle et concertent à voix basse, me laissant en dehors de leur conciliabule.

Le souvenir se termine sur cette image étrange.
Elle se brouille et je reprends pied dans la réalité.
Snowpuff a gardé son regard rivé dans le mien. Il découvre mon étonnement. Il n’attend pas ma question, il me donne les explications que j’attends.
- Après le décès de ma maîtresse, c’est à Square Grimmaurd que je suis allé car c’était le seul refuge que je connaissais. Mrs Smith fréquentait cette famille depuis qu’elle avait été à Poudlard en compagnie de Elladora Black. A chaque réception, les cartons d’invitation de ce clan étaient rédigés en priorité.
J’avais accompagné Mrs Smith une ou deux fois dans cette bâtisse. Hockey l’accompagnait aussi. Pendant que ma maîtresse parlait avec ses hôtes, Hockey et moi passions l’après-midi avec Kreattur dans la cuisine.
Les rapports s’étaient fortement rafraîchis depuis le décès de Elladora. La famille Black appréciait de moins en moins les frasques de ma vieille maîtresse excentrique.
Quand je me suis retrouvé complètement abandonné, Kreattur m’a recueilli quelques jours à Square Grimmaurd en prenant soin de me cacher. Si la famille Black m’avait repéré, il m’aurait chassé d’un mauvais coup de pied dans les flancs.

Les explications de Snowpuff m’aident à voir plus clair.
En fait, je n’avais jamais imaginé que Kreattur, Dobby et Winky aient pu se connaître avant 1992. Mais, finalement, cela était tout à fait possible.
Je m’étais replongée dans cet arbre généalogique que Mrs Rowling avait dressé.
Une phrase retint mon attention. L’auteur de la saga l’avait écrite à la main :
« There are many stories between the lines. »
Je souris en guise de réponse.
Je remonte le temps en sautant de branche en branche.
Mon doigt glisse jusqu’à Sirius Black, fils de Phineas Nigellus.
La maison de Grimmaurd Square lui aurait appartenu en priorité puisque c’était le fils aîné de la famille.
Il y aurait vécu avec son fils, sa bru et ses petits-enfants, Orion et Lucretia jusqu’à sa mort en 1952. La maison serait ainsi passée de fils aîné en fils aîné pour revenir finalement à Orion Black.
Kreattur serait tout simplement resté au service d’Orion Black après son mariage avec sa cousine, Walburga.

Je refais le même raisonnement pour découvrir les maîtres de Dobby en 1945. Je savais qu’il avait servi les Malefoy dans les années 1980. Dobby avait sans doute vécu avec Pollux et Irma pour ensuite servir Cygnus, son épouse Druella Rosier et leurs trois filles, Bellatrix, Andromeda et Narcissa. Il était fort probable que la benjamine ait reçu Dobby à l’occasion de son mariage avec Lucius Malefoy.

La famille de Winky, quant à elle, allait servir les Croupton sur plusieurs générations. Il était donc fort probable que la jeune elfe se soit retrouvée au service de Charis Black, la fille d’Arcturus Black dit l’Ancien et de Lysandra Yaxley, dès le jour de son mariage avec Caspar Croupton.

Oui, tout cela était de l’ordre du possible.

Je quitte mes documents. J’ai envie de libérer mon esprit et de respirer les parfums du jardin.
La nuit tombe, l’air est frais.
Je ferme les yeux pour mieux goûter l’odeur de l’herbe humide.
Les images du souvenir me reviennent soudain en mémoire.
Kreattur, Dobby, Winky et Hockey se connaissaient, appartenaient tous les quatre à l’humble famille des elfes de maison, êtres dits inférieurs mais aux pouvoirs magiques étrangement puissants pour de simples serviteurs…
Ce petit groupe reprend forme dans ma tête.
Leurs petits bras serrant ainsi leurs épaules semblent les réunir avec tant d’ardeur.
Il est évident que cette attitude trahit leur tristesse d’avoir perdu une amie, mais elle indique aussi une solidarité telle que je viens à penser qu’ils sont tous les trois propriétaires d’un secret que j’ignore encore.
Ils ont un point commun : le médaillon…
Je marche dans l’herbe humide et je lève les yeux.
Les nuages s’effilochent et laissent apparaître les étoiles dans ce ciel noir, si noir qu’il me fait penser à la paume de la Main de Gloire où s’était levée une constellation que je ne connaissais pas.
- La coupe ! m’exclamé-je en cherchant le fléreur des yeux. Tu as vu la constellation de la Coupe dans la Main de Gloire, Snowpuff ! Y aurait-il un lien entre Tyr et la coupe de Helga Poufsouffle ? J’ai vu la Main de Gloire s’arrêter un instant dans ton souvenir quand tu as prononcé ce mot.
Snowpuff est là, immobile, sur la table de jardin.
- Oui ! ronronne-t-il dans l’obscurité. La coupe pourrait finalement être l’objet confié par Tyr.
- Serait-elle aussi tombée dans le Lac Amsvartnir, Snowpuff ? demandé-je instamment.
Le fléreur descend de la table pour venir se frotter contre mes mollets puis il saute dans mes bras :
- Il me semble… miaule-t-il tout en s’installant sur mes épaules au plus près de mon oreille.
- Et les elfes de maison ? Ils ont en commun la coupe et le médaillon ! Les elfes de maison, viennent-ils aussi d’un des Neuf Mondes de l’Yggdrasil ?
Le ronronnement du fléreur se fait hésitant :
- Cela se pourrait aussi…
Le fléreur n’a rien à dire de plus et nous restons là, un long moment, à contempler ce ciel d’été constellé de diamants.

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Dernière édition par Suzywa le Ven 22 Juin - 17:40, édité 1 fois
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Message par Apsara Ven 22 Juin - 8:59

Snowpuff n’était pas un être humain, aucune maladie nerveuse ne pouvait donc le toucher
Sûr ? Il me semble pourtant que les névroses et les psychoses peuvent exister chez les animaux ... Question et Snowpuff est bien proche psychiquement de l'humain...

Beau travail de recherhe sur la généalogie des sang-purs ! applaudis

Les elfes de maison, viennent-ils aussi d’un des Neuf Mondes de l’Yggdrasil ?
Il y a, décidément, " beaucoup d'histoires dans l'histoire " ! :super:

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Message par Suzywa Ven 22 Juin - 17:17

Snowpuff n’était pas un être humain, aucune maladie nerveuse ne pouvait donc le toucher
Sûr ? Il me semble pourtant que les névroses et les psychoses peuvent exister chez les animaux ... et Snowpuff est bien proche psychiquement de l'humain...

Rolling Eyes Grand débat ! C'est vrai que les spécialistes ont fait beaucoup de progrès dans le domaine de la psychologie animale mais il me semble que les troubles psychiques et comportementaux soient induits par l'action de l'homme : sevrage trop précoce, ennui, mauvaise alimentation, amputation des griffes ou des dents pour éviter les dégâts dans les maisons ou dans les appartements, etc... Penses-tu vraiment que certains troubles puissent être innés à une race ou à un bagage génétique ?

Merci du compliment ! J'ai adoré faire ces recherches, il existe un fil conducteur dans l'oeuvre de JKR qui te connecte vers ces mondes magico-mythologiques. Je pense qu'il y a encore sujet à fan fic en fouillant plus loin ou ailleurs. Il suffit de trouver l'amorce d'un autre fil pour développer d'autres histoires dans l'histoire.

Merci pour ta review, Apsara Bisou
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Message par Suzywa Mer 27 Juin - 12:34

Kreattur et Compagnie…
(second volet)

Je replonge dans mes recherches pour découvrir des informations générales à propos des médaillons.
Snowpuff s’est installé sur la planche de travail de mon petit secrétaire.
Il fixe l’écran de l’ordinateur et dévore des yeux les images qui défilent, inlassablement, sur le site du moteur de recherche.
En français le mot « médaillon » fait référence aux médailles qu’elles soient militaires ou d’ornement.
Insatisfaite de ce que la « toile » nous donne en pâture, je décide de revenir au mot anglais « locket », bien plus précis.
Les documents sélectionnés ressemblant enfin à ce qui est décrit dans les livres de Mrs Rowling, nous découvrons des bijoux d’une grande beauté.

La question que j’avais posée à Snowpuff était toujours sans réponse.
Pourquoi Thor avait-il confié un objet typiquement féminin à l’ours, gardien de Fenrir ?
Je poursuis mes recherches plus loin et questionne le précieux moteur de recherche.
De nombreux articles anglais confirment que ces médaillons sont des bijoux typiquement féminins.
Je suis surprise d’apprendre qu’ils étaient destinés à recueillir des boucles de cheveux ou des reliques d’enfants décédés. J’ignorais complètement cette tradition et je me mets à imaginer que Thor avait peut-être eu une fille ou un fils perdu.
J’avais lu que son épouse se nommait Sif et que celle-ci était amoureuse de son époux divin, malgré un faux pas amoureux, partagé avec Loki.
J’ajoute ces trouvailles au creux de mes notes manuscrites.
Toujours en recherche d’autres possibles, je découvre, dans un autre article, que les médaillons peuvent aussi renfermer du poison.
Cette information retient toute mon attention. Cela correspond mieux aux projets tortueux d’un Salazar Serpentard. Par contre, je ne vois pas bien ce que Thor aurait bien pu faire avec cette substance mortelle.
Ne trouvant rien d’autre à me mettre sous la dent et ne voyant aucune réaction particulière de Snowpuff, je change de cap et pars à la découverte de la constellation de la Coupe que je ne connais pas du tout.

L’encyclopédie d’internet me dévoile que c’est une petite concentration d’étoiles de l’hémisphère sud et me précise in texto :
La Coupe est une constellation ancienne, car déjà répertoriée par Ptolémée dans son Almageste. Il s'agirait, dans la mythologie grecque, de la coupe tenue par Apollon.
Apollon fait son apparition…
Cela ne m’arrange pas vraiment mais je suis intriguée. Je sais que, parfois, les Dieux des différentes mythologies se rejoignent dans le passé des hommes qui les ont imaginés. L’espace et le temps n’ont pas la même valeur que dans notre petit monde humain.

Avec l’accord de Snowpuff qui ne rate rien de mes manipulations et de mes raisonnements, nous partons à la découverte de la vie d’Apollon.
Nous lisons avec attention tout ce que cette encyclopédie virtuelle a rassemblé sur ce Dieu qui finalement a suscité l’intérêt de nombreux professeurs et je tombe sur ceci :
Le dieu-loup ?
Dans Apollo the Wolf-god, Daniel E. Gershenson voit en Apollon un dieu d’origine indo-européenne, dont les attributs principaux seraient rassemblés dans l’expression Apollon dieu-loup. Cet auteur s’inscrit dans la lignée des travaux de Louis Gernet Dolon le loup et de Henri Jeanmaire Couroï et Courètes.
Par là, il faut entendre non pas le culte de l’animal en lui-même, mais de son symbolisme de loup mythique, lequel n’est autre que le vent considéré tant par ses vertus bénéfiques que destructrices. Les vents, comme Zéphyr le vent-loup, peuvent être favorables aux semences, mais sont aussi tenus pour issus des cavernes et cette origine souterraine les met en relation avec les Enfers. Le vent est ainsi le passage entre le chaos et le cosmos.
Ceci explique le rôle de la divinité comme tuteur des éphèbes, de jeunes guerriers qui accomplissent leur initiation d’adultes, sa fonction de protecteur du grain semé et enfin sa qualité de dieu de la prophétie qui révèle les mystères et initie les musiciens et les poètes. Le Lycée (Λύκειον / Lykeion) rendu célèbre par Aristote est placé dans un gymnase jouxtant le temple d’Apollon Lykeios. Apollon Lykeios, le dieu-loup, serait le maître des passages, dieu qui transforme les forces chaotiques des confréries de loups-garous de l’adolescence vers l’âge adulte, qui dévoile par la prophétie ou la Pythie le monde caché vers le découvert.
Gershenson présente de nombreux témoignages dans le monde européen qui pourraient montrer que ce dieu-loup et dieu-vent remonte à une période antérieure à la séparation des peuples européens qui ont pénétré en Europe centrale et méridionale. Ses déductions ont été confirmées plus tard par Bernard Sergent, un auteur qui a notamment souligné le lien d'Apollon avec les loups et son rôle joué dans les initiations, ainsi que son origine indo-européenne. Apollon est particulièrement associé à Borée, le Vent du Nord. Lug, son équivalent celtique, est un « chevaucheur de tempêtes ». Sergent a cependant accusé Gershenson de donner une vision trop réductrice d'Apollon, ce dieu ayant une personnalité beaucoup plus riche que celle décrite dans cette thèse.

Snowpuff me regarde avec intérêt après avoir lu ce passage. Il voit que je suis interloquée.

Comme toujours, il me faut confirmer de cette information et j’en cueille d’autres deci delà. Sur le site « Insecula », nous lisons ceci :

Apollon
Fils de Léto et Zeus
Frère de Héraclès (Hercule) et Artémis
Apollon est le fils de Zeus et de Léto, et le frère jumeau d'Artémis. Ce dieu-archer d'origine étrangère, qui compte parmi les plus importants dans le panthéon grec et romain, interviendra dans plusieurs domaines, notamment la prophétie, la divination, les arts, notamment la musique et la médecine.
Il protégera les bergers tout en étant l'ami des loups.


- La médecine ? m’exclamé-je. Je vis un objet apparaître instantanément dans mon esprit.
Apollon est le père d’Asclépios, le Dieu de la Médecine, lui-même père d’Hygie, Déesse de la santé.
- Une coupe ! ronronne Snowpuff plein d’admiration.
- Oui, Snowpuff ! La coupe de la santé !
Entre les mains d’Helga Poufsouffle, cette appellation prend toute sa valeur ! m’exclamé-je.
Helga était férue en botanique matière première des potions et des remèdes.
La Coupe sert aussi à les préparer. La Coupe de la Santé fait aussi penser aux fruits et aux richesses de la corne d’abondance. Sans une alimentation saine et suffisante, point de santé !

J’ai le cœur battant de découvrir cette logique si simple.
Toujours en quête d’informations supplémentaires, nous tombons sur un autre article intéressant qui nous conforte dans notre idée d’un lien possible entre la mythologie nordique et Apollon.
Cet article parle des origines d’Apollon et nous découvrons qu’il n’était pas un Hellène pur.
Outre l’origine crétoise, asiatique, les spécialistes entrevoient également une origine nordique. Il aurait eu des contacts avec les Hyperboréens qui, pour beaucoup d'auteurs dont Hérodote, étaient des personnages merveilleux. Ces êtres pouvaient vivre jusqu'à mille ans, sans travail, sans luttes, dans l'euphorie la plus totale.
- Comme les Dieux de Asgard ? dit Snowpuff émerveillé.
J’acquiesce de la tête.
- Juste que la Coupe de Hepzibah comporte un petit blaireau ! précise Snowpuff.

La réflexion du fléreur est judicieuse. Qu’avaient donc en commun ces animaux sauvages ?
Mon clavier crépite, proposant des sujets de recherche.
En quelques minutes, nous découvrons que le loup et l’ours sont les prédateurs des blaireaux.
Un autre article nous raconte que dès le 9ème siècle les « luparii » (chasseurs de loups au temps de Charlemagne) puis, plus tard, les louvetiers ont mené une guerre incessante aux « bêtes rousses et noires » : loups, renards, blaireaux, sangliers, chats sauvages.
Partant du principe qu’on ne peut connaître un animal sans s’intéresser à son habitat, nous apprenons que blaireaux et loups ont un point commun.
Ils vivent dans des tanières.
Les louves vont même jusqu’à s’introduire dans les tanières spacieuses, creusées par les blaireaux, pour mettre bas.
- « Cherchez le blaireau et attrapez le loup qui menace ! » conclut Snowpuff dans un éclair de lucidité.
Je regarde le fléreur avec intérêt. Cette phrase digne d’un oracle m’avertit qu’il va m’emmener vers un nouveau souvenir.
- Que me racontes-tu là, Snowpuff ?
- Ta machine intelligente m’a fait penser à un détail que j’ai découvert dans la maison de Square Grimmaurd. Kreattur avait pris l’habitude de m’inviter à chaque fois que du monde venait dans cette maison. Il savait que je menais une vie de vagabond et il ne manquait jamais l’occasion de me nourrir décemment, en souvenir de son amie Hockey. Je parvenais toujours à me faufiler dans ce salon. J’aimais cette œuvre d’art généalogique qui poussait le long des murs comme une plante grimpante.

Cette dernière phrase me touche et je prends Snowpuff dans mes bras pour l’embrasser juste entre ses deux oreilles.
Nous nous installons dans le jardin. Il se cale sur mes épaules et ronronne son souvenir au creux de mon oreille.

Je tombe dans cette sensation de tourbillon que je connais bien maintenant.
L’obscurité et le silence laissent la place à des réjouissances.

Je suis à nouveau caché sous ce meuble de salon qui dissimule si bien ma présence.
Deux enfants courent dans le salon. Deux petites filles vont et viennent, crient en jouant au jeu du loup.
L’une doit avoir quatre ans, elle tourne autour de la seconde, plus jeune, en poussant des grands « Ouououou ».
La petite essaie d’échapper à ce jeu qui la fait hurler de peur.
Sa course est maladroite. Elle est si concentrée qu’elle serre très fort les pans de sa petite robe de sorcière pour s’empêcher de tomber.
Les adultes rient de plaisir.
Les parents viennent alors les séparer et calmer le jeu. Elles s’éloignent de mon champ de vision et je retrouve la tapisserie.
Je découvre que l’arbre a planté ses racines bien plus profondément que lors du premier souvenir.
La jeune génération des Black est présente. Elle arbore maintenant la trentaine sereine.
Lucretia s’est unie à Ignatius Prewett, Orion et Walburga vivent ensemble, Cygnus et Druella Rosier ont donné vie à trois enfants, trois petites filles nommées, Bellatrix, Andromeda et Narcissa, leur petite dernière qui vient d’ouvrir les yeux sur ce monde magique.
Je lis « 1955 » sous le nom de cette enfant. L’arbre termine juste d’ancrer la dernière lettre de ce prénom, fragile racine au parfum de fleur.

La génération d’Arcturus dit « le Jeune » a atteint l’âge mûr.
Les frères et sœurs, cousins et cousines sont rassemblés dans le salon de Grimmaurd Square, partageant le bonheur de cette naissance.
Pollux Black et Irma, née Crabbe est heureux. Ils sont même un peu trop à l’aise dans cette bâtisse, régie par Arcturus et Melania.
Irma rayonne en maîtresse de maison. Elle sourit et se déplace avec enthousiasme de petit groupe en petit groupe.
A quarante-sept ans, cette dernière a gardé sa silhouette de jeune fille.
Ses longs cheveux noirs savamment relevés en chignon mettent en valeur ses yeux sombres.
Sa manière de bouger, son sourire et son regard au pouvoir magnétique évident effacent les traits grossiers de son visage. Cette femme connaît ses atouts et sait en user pour charmer son entourage.
Pollux est fier également, arborant pour l’occasion la médaille de l’Ordre de Merlin- 1ère classe, reçue pour service rendu au Ministère.
Mais en regardant et écoutant de plus près, je comprends que ce bonheur n’est qu’apparence.
Ce qu’on peut prendre pour des petits groupes mouvants sont en réalité des clans qui échangent nouvelles et ragots.

Arcturus et Melania sont le centre du premier regroupement. Lycoris, Regulus discutent avec leur frère, Lucretia et Ignatius les écoutent.

- Regardez Irma ! Elle est comme chez elle, ici ! chuchote Melania d’un ton piquant.
- C’est l’heureuse grand-mère de la petite Narcissa, ma chère ! temporise Arcturus. Vous n’allez pas reprocher son enthousiasme. J’aimerais également tenir un de mes petits-enfants dans les bras. termina-t-il en regardant ses propres enfants.
- Vous êtes d’une délicatesse, Arcturus. Vous excusez quelqu’un qui nous fait du tort et vous faites des reproches à ceux qui vous aiment.
Irma a dû verser quelques gouttes de philtre d’amour dans votre Firewhisky, mon cher, pour que vous réagissiez de telle manière ? dit-elle, offusquée. Ne pensez pas que ses regards soutenus posés sur votre personne m’aient échappé ! pique Melania.
Lycoris poursuit les remarques.
- Regardez ! Irma a mis le médaillon de Tante Violetta ! C’est elle qui l’a reçu, en héritage.

Je porte mon attention sur le seul bijou porté par cette femme élégante. Il ne pend plus au bout de la fine chaîne d’or comme du temps de Violetta. Irma l’a élégamment accroché à sa ceinture mettant en évidence sa taille fine.
Le boîtier d’or qui n’offre qu’une surface pure et lisse scintille au rythme des pas de sa propriétaire.
Alphard se joint au groupe. Il a entendu la réflexion et répond à l’exclamation de sa tante.
- Vous le vouliez, Tante Lycoris ? Vous vouliez ce bijou, gardien de la « promesse » qui se transmet de génération en génération ?
Elle secoue la tête négativement.
- Alors, je vous en prie. Ne faites pas l’envieuse. Il est des sujets plus réjouissants que celui-là ! Je préfère le savoir entre les mains de ma mère qu’au sein de votre chère famille.
Alphard fixe Lucretia puis s’adresse à Ignatius.
- Cet objet ne transmet que malédiction. Je ne voudrais pas que le joli rire de ma cousine se fane sous les assauts du malheur ! Je compte sur vous, cher Ignatius !

Consciente qu’on parle d’elle, Irma choisit ce moment pour se diriger vers ses cousins et cousines.
Le sourire est sur ses lèvres mais son regard noir n’exprimait pas le même bonheur.
- Tout vous plait-il, cousins ? demande-t-elle par formalité. Avez-vous vu la petite Narcissa ? Quel ange ! Elle ne posera aucun souci à ses parents ! Quel bonheur de voir la famille s’agrandir, n’est-ce pas ?
Irma fait une pause, puis reprend d’un air faussement navré.
- Je me mets à votre place, ce doit être triste pour vous, Melania, de ne pas encore connaître cette joie d’être grand-mère !
Melania reçoit les mots comme une gifle. Ses joues en rosissent de colère. Elle rétorque en douceur.
- Oh, cela viendra ! Je préfère attendre quelques années de plus et connaître mes petits-fils. Vous avez trois jolies petites-filles, Irma et j’en suis sincèrement heureuse pour Cygnus et Druella, mais ce sont des filles et le nom des Black ne s’inscrira plus au pied des racines de notre arbre généalogique.

Un silence froid comme le zéphyr passe au-dessus des têtes.

Irma tente de sauver la face. D’un air hautain, elle se tourne vers son fils, Alphard.
- Je compte sur Alphard ! Nous nous occuperons de son mariage prochainement.
Alphard regarde sa cousine Lucretia avec tristesse pendant une fraction de seconde.
- Ne comptez pas trop sur moi, Mère. Les mariages arrangés ne sont pas pour moi. L’amour croisera peut-être ma route et je préfère gérer seul ma destinée tout comme vous l’avez fait vous-même, avant d’épouser Père.
Melania sourit en entendant ces paroles anodines. Elle a vu le rictus vainqueur d’Irma s’effacer, preuve que ces quelques mots ont craché un venin sournois.
Irma fixe les yeux de son fils. Alphard affronte leur courroux et ne baisse pas la tête. Il sait que sa mère n’est pas chez elle et qu’elle ne lancera aucun autre commentaire.
Pour soutenir moralement son neveu, Melania laisse échapper une remarque.
- Vous portez le médaillon de Tante Violetta, chère Irma ? Vous êtes bien assortie avec votre époux, le cousin Pollux ! Lui aussi porte sa nouvelle médaille de l’Ordre de Merlin ! Quel genre de service a-t-il donc rendu car, si je ne m’abuse, c’est à mon fier Arcturus qu’elle était destinée…
La belle Melania tourne la tête pour scruter l’expression du visage de son mari. Elle plante soudain ses yeux bleus dans le regard noir de sa cousine.
- Quel genre de service avez-VOUS rendu, Irma ? Je pense sincèrement que cette question est plus pertinente que la première.
Le ton est léger mais tout aussi venimeux que celui d’Alphard, quelques instants auparavant.

Un démon passe.

L’arrivée d’Orion permet à Irma de garder la face.
- Orion ! Venez nous rejoindre ! Où est donc Walburga ! dit-elle d’un air désinvolte.
- Elle est avec Druella, Mère. Elle s’occupe de Bellatrix et d’Andromeda.

C’est à ce moment que j’entends des pleurs.
Walburga a pris Andromeda dans ses bras mais la petite se débat, donne des coups de pied violents.
Alphard quitte le groupe pour aider sa sœur.
Il va chercher un petit balai miniature pour distraire les fillettes.
Lucretia rejoint son cousin et soulève Andromeda pour l’asseoir confortablement sur l’engin volant. Bellatrix reste avec Alphard.
Elle s’installe sur les genoux de son jeune oncle. Ils sont face à l’arbre généalogique de leur famille. Bellatrix demande enjouée :
- Mon oncle ! Je veux que tu racontes l’histoire d’Orion Black !
Alphard sourit à cette injonction
Il constate que la petite a un regard de feu, le même que celui d’Irma. Les lourdes paupières héritées de feue Violetta lui confèrent un charme accru auquel il ne peut résister.
Alphard se tourne ensuite vers Lucretia.
- La vie est étrange, cousine ! Te souviens-tu ? C’était ton grand-père à toi qui nous la racontait quand nous étions petits.
Les deux jeunes gens sourient à l’évocation de ce bon temps qu’ils vont maintenant offrir à Bellatrix.
Discrète mais néanmoins attentive, Andromeda descend de son petit balai pour s’installer sur les genoux de Lucretia. Elle met son pouce en bouche. Pour rien au monde, elle n’aurait raté le récit de cette histoire extraordinaire.

Alphard prend sa nièce dans ses bras, se lève et s’arrête devant la tapisserie.
Il sort sa baguette magique de sa poche et la donne à Bellatrix. Le jeune homme enfouit la petite main dans la sienne. Tous deux posent la pointe de l’outil sur le nom de leur ancêtre le plus ancien : « Orion Black » (1035-1178). Les deux voix se mêlent pour ne plus en faire qu’une. De concert, ils ordonnent : « Reditus ad fontes ! »

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Dernière édition par Suzywa le Dim 1 Juil - 17:35, édité 3 fois
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Message par Apsara Dim 1 Juil - 15:35

Le réseau se complexifie : voici que la mythologie grecque rejoint la mythologie nordique...
Et une Bellatrix déjà volontaire !

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Message par Suzywa Mer 4 Juil - 20:51

Oui, une petite Bellatrix qui sait de qui tenir ! En voici le détail ! Suspect

Kreattur et Compagnie…
(troisième volet)

- Reditus ad fontes !
Le sortilège qu’ont lancé la jeune Bellatrix et son oncle Alphard a fait coulisser une petite porte à côté de la tapisserie.
Une tablette en ébène se déploie magiquement puis, trois bulles de verre translucide sortent de la niche et s’alignent de gauche à droite sur le support en bois précieux prévu à cet effet.
Dans chacune des sphères, des images s’animent de manière anarchique.
Sans rien demander, Bellatrix, qui est toujours dans les bras d’Alphard, s’empare de la baguette magique de son oncle et la pointe sur la première boule scintillante.
Celle-ci éclate comme si elle avait été faite de savon et le souvenir, libéré de sa coquille, raconte son histoire en trois dimensions, là au beau milieu du salon.

L’effet est époustouflant.
Les Black, silencieux, vont assister aux exploits de leur ancêtre, en différé de plusieurs siècles.

Le décor forestier envahit la pièce en une fraction de seconde.
L’herbe tendre d’une clairière pousse sous mes pattes.
L’obscurité m’enveloppe. La forêt sent le printemps.
Un fin croissant de lune se lève au-dessus des arbres.
Les bourgeons viennent juste d’éclater et leur parfum vert pique le museau.
La nuit est claire, fraîche et l’humidité me fait frissonner.
Rien ne bouge.
Mon instinct de chasse s’éveille, des odeurs de proie chatouillent soudain mes narines et je m’avance pour mieux surveiller les alentours.
Après quelques minutes, un animal sauvage souple et habile sort de terre.
Des pattes courtes, le corps tout en longueur terminé par une longue queue touffue, un blaireau adulte jaillit de sous terre comme un diable d’une boîte.
L’animal hume l’air.
Il reste quelques moments à en renifler les parfums revigorants.
Soudain, il se met en mouvement, se dirige vers l’étang qui repose à proximité, puis, comme pris de peur, il se faufile dans un fourré et disparaît.
Tout redeveint calme.

- Pffff ! Oncle Alphard ! Quand est-ce qu’il arrive ?
Je sursaute en entendant cette voix impatiente et claire qui pousse un long soupir. Le contexte saisissant m’a fait oublier que nous sommes encore en compagnie des Black, au creux d’un salon confortable. Je me rends compte que je me suis avancé imprudemment hors des limites du meuble qui me cache. Je recule pour me remettre à couvert.
- Chhhhht Bellatrix, il arrive, regarde !

Derrière un buisson, je vois une silhouette se relever lentement.
Quelques secondes après, un autre personnage se redresse tout aussi précautionneusement.
Je les distingue mal.
Une simple tunique de laine, nouée à la taille, semble les habiller. Elle est courte tombant à mi-cuisse.
Les jambes sont protégées de chausses noires.
La lumière fragile du croissant lunaire dévoile le visage du premier individu.
Il est noir. La suie qui le masque en estompe les volumes et les creux.
Seuls les yeux sont mobiles.
Le second personnage porte un mantelet qui recouvre ses épaules. Un capuchon relevé sur la tête maintient son visage dans l’ombre.
Des ombres.
Voilà le terme le plus adéquat pour les décrire.
Ces deux hommes ont l’épaisseur d’une ombre. Ils se fondent naturellement dans ce milieu forestier.
- Viens, Malefoy ! Inspectons les alentours de cette tanière. Le blaireau y passe de temps à autre mais ne semble plus y vivre. Cela fait trois semaines que je surveille ce point d’eau et la configuration est parfaite pour attraper ce que nous cherchons.
Le compère fait un tour d’horizon pour observer la clairière.
- Tu as raison, Le Noir... Un point d’eau, une butte, des buissons en suffisance et cette tanière abandonnée ! Tout ce que notre ennemi recherche est là.
Le personnage s’accroupit alors pour inspecter les empreintes gravées dans la terre meuble.
- As-tu repéré des traces intéressantes ? Des restes enfouis ?
Le Noir répond vaguement en humant l’air.
- Non, rien, mais la période de mise à bas approche et cette forêt de Jumièges raconte de drôles d’histoires qui font frémir le boyau de mon arc. En disant ces mots, le chasseur tape sur sa poitrine, je m’aperçois alors qu’il porte cette arme en bandoulière.
J’aimerais attirer notre Seigneur par ici... Je verrais bien une battue en septembre, dans les champs voisins. Je pense que nos lévriers se réjouiront de leur part de trouvailles dans ce coin, d’ici l’automne. Nous aurons de grandes chances de rabattre une meute avec ses jeunes.
Le compagnon de Le Noir approuve de la tête.
- Je pense comme toi, Le Noir. Tu as dû être loup, il y a longtemps, pour posséder ce flair infaillible ! Mais qu’est-ce que tu dis ? De drôles d’histoires hantent ce bois ? répète Malefoy d’un air intrigué.
- Je te raconterai ça derrière un bon pichet, un de ces jours, Malefoy. Des histoires de magie…
Malefoy rit sous cape et lance une bourrade à son compagnon.
- Rien que des histoires de bonne femme, tout ça ! Nous, nous sommes des chasseurs, des vrais. Ce n’est pas la magie qui va nous aider à débusquer les loups mais bien notre ruse et notre intelligence. Nous sommes plus forts que ces bêtes et nous le prouvons à chaque fois que les noirs, roux et bruns passent à portée de notre arc.
Le Noir se tourne doucement vers Malefoy. Ce dernier pense que son compagnon va lui répondre. En effet, Le Noir a ouvert la bouche mais aucun mot n’en sort. Il a, par contre, les yeux exorbités.
Malefoy se retourne pour comprendre le pourquoi de cette attitude figée.

Un loup énorme émerge d’un buisson.
C’est un loup gris, maigre et efflanqué.
Il arrête sa progression et fixe attentivement Malefoy ainsi que Le Noir.
Son poil se hérisse et la bête montre ses crocs.
Tout en observant les moindres mouvements du loup, les deux hommes, expérimentés en l’art de la chasse, se préparent mentalement à pointer leur arc sur l’animal sauvage.

Contre toute attente, le loup est distrait par un détail invisible à l’œil nu ou à l’oreille la plus attentive.
Il hume l’air.
Le vent du Nord s’est soudainement levé apportant des effluves qui font grogner la bête.
Celle-ci se dirige vers le point d’eau et s’y désaltère.
Le loup se tourne alors vers les deux chasseurs.
Le Noir et Malefoy ont profité de ne plus être en point de mire pour bander leur arme et la diriger, menaçante, sur le loup.
Fait étrange, ce dernier tient, à présent, un objet dans sa gueule.
Il l’a sorti de l’étang.
Cette chose est recouverte de vase, coincée entre ses crocs redoutables et les rayons de lune la font briller par endroit.
Le loup s’approche sans faillir. Il se couche aux pieds des deux hommes et pose son butin dans l’herbe mouillée.
L’animal ouvre la gueule et, fait prodigieux, des paroles humaines en sortent.
- Je suis le Loup de Sainte-Austreberthe, le loup docile et solitaire que cette femme dévote a soumis à une tâche domestique pour l’éternité. Même si l’instinct éveille parfois mes sens, vous n’avez rien à craindre de moi. Vous êtes venus à point au rendez-vous de votre destinée. Prenez ce médaillon et vous aurez plus de pouvoir que le Roi en personne. Votre vie se comptera en siècles si aucun obstacle extérieur ne vient en couper le fil fragile.

Les deux chasseurs n’en croient pas leurs oreilles. Ils baissent leur arme. Devant leur air interloqué, le loup pousse le bijou doré au plus près des deux hommes qui se jettent, de temps à autre, des coups d’œil de connivence.
Le Noir et Malefoy s’accroupissent pour observer l’objet sans le toucher pour autant.
Leurs yeux, habitués à l’obscurité, distinguent un gros médaillon ovale.
Un motif sculpté est gravé sur la partie supérieure du boîtier. Une merveille.

Le Noir ne résiste plus, il prend délicatement le bijou au creux de sa main épaisse. Il le fait sauter dans sa paume pour en estimer le poids et la valeur. Malefoy, lui, touche le couvercle du bijou pour en ôter la boue qui le salit.
Un « S » étincelle, éblouissant.
Subjugué par l’étrangeté de cette découverte, Malefoy ouvre le couvercle du boîtier sans prendre aucune précaution.
Un morceau d’arc-en-ciel illumine alors la clairière, dévoilant deux visages, dévorés par la curiosité et la surprise.
A ce moment même, Le Noir et son compère s’évanouissent. Les deux corps tombent au ralenti, projetés par une force inconnue qui jaillit du médaillon.
Le loup qui assiste à la scène, s’exprime une dernière fois avant de disparaître :
- Celui que le médaillon choisira devra rester toujours pur pour que sa descendance puisse être plus forte que le Mal qui s’est libéré ce jourd’hui.

Les paroles s’évanouissent et la forêt profonde redevient sombre et silencieuse.

Les corps des deux chasseurs gisent mollement sur le dos.
Comme pour confirmer les liens d’amitié qui se sont tissés entre eux dans le quotidien, leurs doigts se touchent dans cet état d’inconscience qui les rend si vulnérables.
Leurs paumes sont ouvertes. Elles semblent attendre un don des étoiles.
Le médaillon qui a été projeté haut retombe lourdement. Il tourne comme un écu jouant un pile ou face. Et il termine sa chute sur face, touchant finalement les doigts des deux mains. Le « S » du couvercle fait scintiller ceux de Malefoy et le lourd boîtier repose sur les phalanges épaisses de Le Noir. Le reste de liquide irisé qu’il renferme glisse sur la peau du chasseur, s’infiltrant goutte par goutte dans le terreau fertile de cette forêt rouennaise.

Le salon cossu retrouve ses fauteuils et ses spectateurs.
Le jour reprend ses droits.
Andromeda a enfoui son visage dans le cou de Lucretia. Sa petite poitrine se soulève rapidement trahissant une peur contenue.
Lucretia caresse les cheveux de l’enfant et souffle doucement :
Andromeda ? C’est fini…
Rassurée, la fillette relève la tête et, les yeux encore humides, se met à rire en voyant le spectacle que donne sa sœur.
Bellatrix est excitée comme une puce. Elle s’est levée et imite Orion Le Noir chassant le loup avec son arc et, toute occupée à sa traque imaginaire, elle demande à son oncle :
- Alphard ! C’est vrai qu’Orion ne faisait que ça ? Il chassait le loup toute la journée ?
Alphard acquiesce.
- Oui, Bellatrix ! Orion Le Noir était louvetier tout comme Malefoy. En 1065, les loups dévastaient les campagnes et attaquaient les troupeaux et les gens. Ces animaux avaient une réputation diabolique. Notre ancêtre était au service d’un Seigneur et il était devenu Maître louvetier tant son instinct de chasse était infaillible !
La petite répond.
- Moi aussi, je veux chasser ! Je chercherai les tanières des blaireaux et je chasserai avec mes chiens ! Je serai la meilleure et mon Seigneur sera fier de moi ! dit-elle en dressant le menton.
Alphard lui répond sérieusement.
- Attention, Bellatrix, les loups mangent les humains ! Ils mangent les morts mais aussi les vivants et la meute est intelligente. On raconte que ces bêtes peuvent courir des jours entiers sans se fatiguer, on dit aussi qu’un serpent vit dans les reins des plus vieux et si tu te fais mordre par l’un d’eux, il te sucera le sang ou te mordra d’une manière si venimeuse que tu en perdras d’abord tes bras et puis tes jambes.
Les yeux de la petite Bellatrix cillent en entendant cette cruauté mais elle ne baisse pas pour autant le regard.
Vaillamment, elle pose une autre question pour faire diversion.
- Pourquoi Orion s’appelait « Le Noir » ! Pourquoi, il s’appelait pas « Black » comme nous ? Il a changé de nom ?
Alphard sourit en entendant les questions futées de sa nièce.
- Oui ! Orion est né en France, à Rouen. Il s’appelait Orion Le Noir. Ce surnom lui a été donné car il se mettait de la suie sur le visage. Il avait trouvé ce camouflage imparable et lui seul l’utilisait. Puis, il est venu en Grande-Bretagne, plus tard. « Le Noir » est devenu « Black », tout simplement.

Irma s’approche de sa petite-fille. Elle la soulève de terre avant de s’asseoir à côté de Lucretia.
Bellatrix s’installe à califourchon sur les genoux de sa grand-mère paternelle pour lui faire face.
La petite s’empare alors du médaillon qui pend à la ceinture d’Irma.
La fillette ouvre de grands yeux naïfs et demande :
- Grand-mère ? Où est le serpent ? Il est parti ?
Irma sourit de fierté en s’adressant à tous les Blacks présents.
Elle aime voir l’intelligence poindre dans le comportement de ses petits-enfants et se plait à constater que tous apprécient la vivacité d’esprit de la petite.
Elle répond avec douceur.
- Non, Bella. Le médaillon que nous avons vu dans le souvenir n'est pas celui-ci. Orion l'a donné à quelqu'un. Il l'a donné à Sa-la-zar Ser-pen-tard ! dit-elle en scandant lentement ce nom propre. Tu te rends compte ?
- Je pense plutôt que Sa-la-zar Ser-pen-tard l’a volé, Mère ! rectifie Alphard.
Irma se raidit en entendant ces paroles blasphématoires.
- Comment oses-tu, Alphard ?
- Je ne dis que la vérité ! Salazar Serpentard et notre aïeul étaient proches puisque beaux-frères par alliance après leur mariage avec deux des filles Peverell. Mais je suis navré de vous apprendre que Salazar Serpentard a volé ce médaillon, tout illustre fût-il ! Je l’ai découvert grâce à cet arbre généalogique, un soir où je m’ennuyais… répond le jeune homme en s’efforçant de ne pas croiser le regard de sa cousine.
- N’écoute pas ton oncle, Bellatrix ! Il veut toujours se rendre intéressant en société ! prétexte Irma sur un ton railleur. Nous faisons partie de la Noble et Très Ancienne Maison des Black.

Un des membres de la famille qui était resté très discret, jusqu’à présent, se manifeste.
Dorea Black, la sœur de Pollux, est de petite taille, plutôt replète. Ses rondeurs généreuses sont rassurantes.
Elle s’avance doucement vers le sofa et se place derrière Irma afin d’avoir la petite fille bien en face. Dorea s’adresse à elle d’une voix calme.
- Il faut que tu saches, petite Bella, qu’il fût un temps où nous n’avons pas été si Noble que cela, ni même sorcier d’ailleurs ! Je pense personnellement que c’est le gros médaillon que tu as vu dans le souvenir qui a transmis ses pouvoirs magiques à notre aïeul. D’ailleurs, la preuve en est, ton grand-oncle Marius qui est mort maintenant n’avait aucun pouvoir magique. C’était un cracmol tout simplement.

Irma fait la moue.
Elle n’aime pas qu’on parle de ces « tares » familiales. Elle ne considère que ce qui l’arrange.
- Nous sommes des sorciers de souche ! pique Irma en s’adressant à Bellatrix. Nous avons sûrement dû avoir des druides dans notre famille pour que le pouvoir magique traverse ainsi les siècles.
- Irma ! reprend calmement Dorea qui ne voit que le chignon de sa belle-soeur. Qu’en savez-vous ? Vous ne portez le nom de Black que grâce à votre mariage avec Pollux. Que connaissez-vous de nos secrets de famille ? N’avez-vous pas entendu les paroles de nos aïeux ? Malefoy l’a dit haut et clair, pourtant :
« Nous, nous sommes des chasseurs, des vrais ! Ce n’est pas la magie qui va nous aider à débusquer les loups mais bien notre ruse et notre intelligence.
Nous sommes plus forts que ces bêtes et nous le prouvons à chaque fois que les noirs, roux et bruns passent à portée de notre arc ! »

Dorea a gardé son calme. Sa voix est restée douce et claire et son argumentation est imparable.
Irma ferme, malgré tout, les yeux, refusant d’entendre ces paroles pleines de bon sens. Dorea tente une nouvelle offensive :
- Vous devez accepter l’évidence suivante, Irma. Si nous avions été vraiment de souche sorcière, jamais Marius n’aurait eu à être chassé d’ici. Jamais, un cracmol n’aurait vu le jour dans notre si Noble Maison.
Irma monte sur ses ergots :
- Nous avons connu un cracmol dans la famille parce que tous n’ont pas respecté la devise familiale : « Toujours pur », Dorea !
Isla Black « la douce » s’est mariée avec un moldu, Cedrella a épousé un traître à son sang. C’est à cause de ces impures-là que nous en sommes au point actuel. Nous n’avons plus de descendance mâle et la malédiction arrive à grand pas car nous n’avons pas TOUS tenu la promesse faite par Orion Black, le Premier !

Irma est fascinante dans la colère.
Le pouvoir de ses yeux est décuplé et la petite Bellatrix la regarde avec dévotion, la bouche ouverte, les yeux écarquillés, ensorcelée par ce message regorgeant de sous-entendus et de non-dits.
Le silence suit ce coup de colère.

Melania reprend son rôle de maîtresse de maison et profite du silence pour s’imposer au centre du débat.
- Vous estimez-vous être un modèle du genre, Irma ? Pensez-vous que la famille ait été aveugle à ce point pour ne pas s’apercevoir de votre manège avec notre oncle Cygnus ?
Irma se tourne brusquement vers Arcturus, l’époux de Melania, mais celui-ci reste de glace. Constatant qu’elle a visé juste, l’hôtesse se dirige vers l’arbre généalogique. Melania caresse le fil qui a brodé le nom de Walburga avant de poursuivre son laïus :
- Irma, nous croyez-vous assez naïfs pour penser que votre fille ait pu être conçue par votre cher Pollux à l’âge de treize ans, seulement ?
Melania fait une pause afin que les jeunes générations puissent faire un rapide calcul mental.
- Oui, Pollux est né en 1912 et Walburga seulement treize ans après ! reprend Melania. Sa main fine et gracieuse court sur la branche juste supérieure et caresse le nom de Cygnus puis celui de Violetta.
- Pauvre Tante ! Elle aussi, a dû être trompée par votre charme… calculé !
Des « oh » de surprise et d’indignation s’élèvent dans le salon. La rumeur est connue mais elle n’est pas partagée par tous.
Irma tremble de colère. Elle crie :
« Toujours pur » fut ma ligne de conduite. Le sang des Black doit rester pur pour que le pouvoir magique ne s’estompe jamais !
Dorea répond, toujours maîtresse d’elle-même :
- Quand Orion Black a parlé sur son lit de mort, il a imposé notre devise, bien sûr ! Mais, une fois de plus, je ne l’ai pas comprise comme vous, chère Irma !
A nouveau, les membres de la famille Black s’animent. La plupart se ralliant à Irma, d’autres, moins nombreux, viennent soutenir Dorea et Melania.

Irma s’apprête à rétorquer avec vigueur quand la porte du salon s’ouvre.
Kreattur passe timidement la tête dans l’encoignure.
A sa vue, tout le monde se tait et Melania intervient, courroucée :
- Quelle audace, Elfe ! Qui t’a permis d’entrer ?
Le serviteur ouvre grand la porte et répond d’une petite voix :
- Miss Narcissa, Maîtresse ! Miss Narcissa s’est réveillée à l’étage. Elle crie très fort et mes Maîtres ne réagissaient pas…Alors, Kreattur a cru bon de vous avertir … poursuit-il en faisant une courbette si profonde que ses grandes oreilles s’étalent par terre comme deux petits tapis de sol.

Kreattur se redresse et regarde l’assistance d’un regard un peu trop naïf pour être sincère. Il lit la gêne sur tous les visages présents.
Melania accompagne Druella pour rejoindre le bébé et, au passage, ordonne à Kreattur :
- Puisque tu es là, apporte à boire à nos invités et fais vite !
Le calme s’impose de force, chacun reprenant une nouvelle conversation.
Bellatrix est toujours sur les genoux d’Irma.
Pour attirer l’attention de sa grand-mère, la fillette tire sur la manche de la robe de la sorcière.
Elle lui montre le bijou et pleine d’assurance, elle demande :
- Grand-mère, si l’autre médaillon est parti, comment tu as eu celui-là ?
Irma répond avec animosité. Elle s’estime avoir été calomniée. La répartie qu’elle n’a pu hurler en raison de l’intervention de Kreattur lui reste en travers de la gorge et elle éprouve beaucoup de difficulté à retrouver son calme.
C’est le médaillon de Mary Peverell, l’épouse de notre aïeul Orion, le sorc…
- …le chasseur ! Mère… rectifie Alphard qui est toujours à l’affût des paroles de sa mère.
Irma lance un regard noir à son fils par-dessus l’épaule de Bellatrix et poursuit :
- On dit qu’il contient une mèche de cheveu d’Ignotus Black, leur premier fils. Il est mort quand il avait quatre ans comme toi ! dit la femme en serrant sa petite-fille sur son cœur dans un élan de tendresse rigide, calculé à point.
La fillette repousse cette étreinte avec impatience. Son regard est à nouveau vif.
- Je peux voir ? demanda-t-elle avec empressement.
- Non ! répondit impérieusement Irma. Personne ne peut ouvrir ce médaillon sous peine d’un grand malheur !

Vexée par ce refus, Bellatrix quitte maladroitement des genoux de sa grand-mère.
La petite Andromeda suit l’élan de sa sœur. Elles se dirigèrent vers les sphères scintillantes posées à côté de l’arbre généalogique. Bellatrix prend tout l’espace disponible pour mieux scruter les images qui y défilent. Elle ressemblait à une petite voyante devant sa boule de cristal.
Andromeda tire sur la robe de sa sœur pour qu’elle lui laisse une petite place mais Bellatrix fait la sourde oreille. En désespoir de cause, Andromeda se tourne alors vers Alphard et lance, implorante :
- Encore…
Le naturel des deux enfants détend l’atmosphère.
Amusé, Alphard se lève pour prendre Bellatrix dans ses bras, il pointe sa baguette magique sur la seconde bulle à souvenirs.
- An de grâce 1066 ! Voici Orion Le Noir, un an plus tard...

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